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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

La « dirty dozen » (douze salopards) : Sciences et Avenir fait les poubelles de l'activisme

24 Mai 2020 , Rédigé par Seppi Publié dans #critique de l'information, #Pesticides

La « dirty dozen » (douze salopards) : Sciences et Avenir fait les poubelles de l'activisme

 

 

Les derniers « salopards » de la liste étendue

 

 

Les médias ont un problème – nous avons un problème avec les médias : quelques clics, et voici publié un article sur Internet. Sans contrôle, sans vérification, sans recul, sans application d'une mini-dose d'esprit critique.

 

Sciences et Avenir nous en livre un parfait exemple avec « Les "dirty dozen", les 12 aliments les plus riches en pesticides » (notez que « Les […] dozen » (pour la douzaine) est un pluriel bien singulier ; l'emploi de l'adjectif « riches » est aussi bien pauvre...).

 

Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer le sujet de fond en avril 2018 avec « Slate, les fruits et légumes, les pesticides... et la connerie ».

 

C'est que, tous les ans, l'Environmental Working Group (EWG) états-unien se fait une publicité à bon compte en publiant une liste des 12 fruits et légumes prétendument les plus « contaminés » en pesticides (les « douze salopards » ou la « dirty dozen »). Dans le temps, elle venait avec quelques explications et une liste des « clean fifteen », des quinze « propres » ; aujourd'hui, il faut deviner que pour accéder aux explications, il faut cliquer sur l'onglet « menu », puis « read the report ». C'est aussi par le menu déroulant qu'on peut accéder à la deuxième liste.

 

Aujourd'hui, la liste des salopards est aussi extensible à 47 et inclut des fruits et légumes qui figurent dans la liste des « propres »...

 

 

Le début de la liste des « propres »

 

 

Elle vient aussi avec un proposition de faire un don de 15 dollars US en contrepartie de l'envoi d'un guide de poche.

 

 

 

 

Nous n'entrerons pas dans le détail des allégations de l'EWG. Il s'agit d'une affaire d'intérêt pour les états-uniens – enfin, sans aucun intérêt puisqu'il s'agit d'une gesticulation outrancière. Pensez donc : « Près de 70 % des fruits et légumes frais vendus aux États-Unis contiennent des résidus de pesticides chimiques potentiellement nocifs ». Mais ce qui vaut (peut-être...) pour les États-Unis ne peut avoir cours en Europe pour bien des raisons liées par exemple aux modes de production, aux maladies et ravageurs à contrôler, aux pesticides autorisés et à leurs conditions d'emploi...

 

Cela n'a pas empêché Sciences et Avenir (tout comme précédemment Femme Actuelle) de reprendre l'« information » avec un chapô prescriptif :

 

« Une ONG américaine livre comme chaque année depuis plus de 15 ans sa liste des 12 aliments les plus riches en pesticides à éviter. »

 

L'article est évidemment fondé sur le catéchisme de la secte du bio :

 

« Depuis 2004, celui-ci [l'Environmental Working Group] s'est en effet donné comme mission d'informer le public sur les moyens de vivre plus sainement. »

 

Mieux encore :

 

« Pour rappel et selon l'Organisation mondiale de la santé, Ies résidus de pesticides présents dans l'alimentation peuvent avoir des effets indésirables sur la santé, parmi lesquels des cancers, des atteintes de la fertilité, du système immunitaire ou nerveux. »

 

Aucun travail sérieux n'a démontré la supériorité de l'alimentation bio sur l'alimentation conventionnelle, et nous aimerions bien connaître « [p]our rappel » la source de l'allégation qui implique l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

 

Nous croyons savoir que l'OMS – en particulier dans le cadre de ses travaux conjoints avec l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO) sur les résidus de pesticides – s'attache à définir les modalités d'emploi des produits de protection des plantes de nature à éviter « des effets indésirables sur la santé ». Cela a dû échapper à Mme Sylvie Riou-Milliod, qui ne doit pas savoir non plus que nos autorités en font de même, avec du reste un zèle surmultiplié.

 

 

(Source)

 

 

Bien évidemment, cet article est un appel à peine voilé à consommer « bio », avec un intertitre explicite, « Choisir les aliments issus de la culture biologique »... et aussi un infomercial :

 

« En France, l'association Générations Futures effectue un travail équivalent à celui de l'EWG. »

 

Notons pour le fun que nous n'avons pas trouvé le « melon d'eau » – une traduction fautive de « watermelon » (pastèque) – dans la liste des quinze « propres ». Ce qui est appelé « cantaloups » par l'auteure est un melon brodé, connu en France comme melon charentais – un type de melon, pas un melon en provenance des Charentes et bénéficiant d'une indication géographique. La liste des quinze inclut également le « honeydew melon », un autre type de melon (melon miel).

 

Il est déjà arrivé que Sciences et Avenir fasse une boulette et, devant les protestations et remarques, retire l'article défectueux. À l'heure où nous mettons en ligne, Sciences et Avenir fait toujours la promo du bio et de GF (qui fait la promotion du bio...).

 

 

(Source)

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I
Cmme l'a signalé un ami sur le compte twittter de la magnifique Emmanuelle Ducros, Sciences et Avenir a vendu son âme aux biotausaurus depuis belle lurette et a été rappelé à l'ordre à plusieurs reprises par l'Afis pour ses conneries sur les pesticides et les OGM. D'ailleurs, comme l'a rappelé cette connaissance, Sciences et Avenir et la seule revue de vulgarisation scientifique à avoir refusé de soutenir le film Food watch Evolution<br /> Donc un tel article pro-biotausaurus de cette revue, ce n'est pas étonnant.
Répondre
I
N'exagérons pas non plus, Fm06, il y a encore de très bons articles dans cette revue, c'est juste sur les sujets liés à l'agriculture qu'il faut se méfier, pour le reste, elle me semble intéressante. <br /> <br /> Pour l'AFIS, et bien étant déjà fidèle à 6 revues, je n'ai pas vraiment envie d'en rajouter une septième, du coup je me contente du site internet de l'association.<br /> <br /> Cela dit je me permets de vous poser une question. J'ai cru comprendre que vous étiez climato-sceptique, or, l'AFIS défend les conclusions du GIEC sur l'évolution du climat, notamment via François-Marie Bréon. Du coup vous en pensez quoi ?
F
Je confirme. Il y a bien longtemps que Sciences & Avenir n'est plus un magazine de vulgarisation scientifique. C'est juste un magazine qui surfe sur les sujets à la mode pour faire plaisir à ses lecteurs. On ne peut pas vraiment leur reprocher car c'est comme ça qu'ils gagnent leur vie. On peut juste regretter qu'ils contribuent à la dévalorisation de la science dans l'esprit du public.<br /> <br /> Puisque vous évoquer l'AFIS, je recommande vivement leur magazine"Sciences & Pseudo-Sciences" qui je trouve très bien fait. Disponible en kiosque ou sur abonnement (achat au numéro possible sur le site web).<br /> https://www.afis.org/-La-revue-Science-et-pseudo-sciences-