Le Président Emmanuel Macron rend visite à un producteur de tomates : les apparatchiks du bio étalent leur intolérance
(Source)
Le 22 avril 2020, le Président Emmanuel Macron s'est donc rendu en Bretagne, à Cléder dans le Finistère, pour visiter une exploitation de production de tomates sous serres, puis un magasin Super U à Saint-Pol-de-Léon, afin, selon le Télégramme, « de rendre hommage à toute la chaîne de "la ferme France", symbole de la "2e ligne" de la "guerre" contre le coronavirus et qui assure l’alimentation des Français ».
Pour une comparaison historique, on peut hésiter entre Georges Clemenceau rendant visite aux soldats dans les tranchées et Patrice de Mac Mahon s'exclamant (selon les racontars) « Que d’eau, que d’eau ! ».
Les esprits chagrins chagrineront, tout comme les esprits rationnels : à quoi cela rime-t-il ?... De plus en période de confinement... Et pour un impact médiatique, et donc sociétal, limité... à l'image de ce titre insipide d'Ouest-France : « Quatre choses à retenir sur la visite d’Emmanuel Macron dans le Finistère, ce mercredi ».
Les grincheux grincheront qu'il aurait pu visiter une exploitation produisant des fraises, fruits de saison...
Mais tout cela n'est rien par rapport à la réaction de la Fédération Nationale d'Agriculture Biologique (FNAB).
L'hystérie commence dès le titre du communiqué de presse : « Emmanuel Macron déclare la guerre à la transition écologique ».
En bref,
« Pour son premier déplacement dans le monde agricole depuis le début de la crise du COVID-19, le Président de la République a choisi de valoriser le modèle agricole hors sol, artificiel, déconnecté du monde vivant, un modèle qui devrait être remis en question quand on comprend le rôle que l’agriculture a joué et jouera encore dans les crises sanitaires et écologiques, passées et à venir. »
On comprend bien que pour les idéologues du bio, le hors-sol, etc. est une hérésie. Il permet pourtant de produire – dans des serres, en... confinement – des légumes et quelques fruits sains, sans pesticides (de synthèse, donc honnis par lesdits idéologues, mais aussi « pas de synthèse », utilisés en bio).
On comprend moins bien, en fait pas du tout, le rôle de l'agriculture dans les crises sanitaires – si ce n'est qu'elle nous nourrit aussi pendant lesdites crises.
Le Président Emmanuel Macron aurait fait preuve d'« Arrogance, mépris et méconnaissance des sujets » :
« Dans ses déclarations publiques d’hier, le Président de la République dénigre les circuits courts, qui sont pourtant en ce moment un véritable refuge pour les consommateurs. Avec le drive, ils sont le mode de consommation le plus plébiscité pendant la crise avec + 73% de vente sur les semaines 12 et 13. Ce sera sûrement la plus grande leçon de cette crise : les territoires qui ont les circuits de proximité les plus développés sont aussi les plus autonomes et agiles pour assurer la sécurité alimentaire de leur population.
D'où sort le 73 % du communiqué ? (Source)
Là, ou bien ils sont d'une incommensurable bêtise, ou bien ils nous prennent pour des blaireaux. Mélanger circuits courts et drives – qui ne sont du reste pas l'apanage de l'agriculture biologique – sans préciser qu'une partie de l'augmentation s'est certainement faite au détriment des autres formes de commercialisation et que la situation a pris le chemin du retour à la normale par la suite, il faut oser ! C'est + 73 % par rapport à quelle part de marché et quel écart de prix entre les deux termes de la comparaison ? Qu'ont-ils livré, les « circuits de proximité » pour « assurer la sécurité alimentaire », une sécurité qui n'a jamais été menacée ?
L'éloge du bio suit, évidemment :
« En 2018, l’IDDRI démontrait qu’il était possible de nourrir l’Europe avec un système 100% biologique, mais pour ça il faut une véritable volonté politique et un projet de société qui mettrait l’écologie au cœur des enjeux de demain. »
Là aussi... Le titre du document de l'IDDRI est : « Une Europe agroécologique en 2050 : une agriculture multifonctionnelle pour une alimentation saine ». « ...agroécologique », ce n'est pas « biologique ».
En bref :
« Le scénario TYFA [« Ten Years For Agroecology in Europe »] s’appuie sur la généralisation de l’agroécologie, l’abandon des importation de protéines végétales et l’adoption de régimes alimentaires plus sains à l’horizon 2050. Malgré une baisse induite de la production de 35 % par rapport à 2010 (en Kcal), ce scénario :
-
nourrit sainement les Européens tout en conservant une capacité d’exportation ; – réduit l’empreinte alimentaire mondiale de l’Europe ;
-
conduit à une réduction des émissions de GES du secteur agricole de 40 % ;
-
permet de reconquérir la biodiversité et de conserver les ressources naturelles.
Des travaux complémentaires sont à venir quant aux implications socioéconomiques et politiques du scénario TYFA.
En bref, un kriegsspiel sur tableur impliquant des « hypothèses radicales et originales », notamment en matière d'alimentation, aux « implications socioéconomiques et politiques » opportunément laissées dans l'ombre. Nous l'avions abordé dans « Servons Sevrons l'agriculture ! Les préconisations de Socialter pour un avenir morose avec tickets de rationnement » et « Nourrir l'Europe sans pesticides……« La laitière et le pot au lait », version moderne ».
Et, pour conclure le communiqué de presse, il y a la dose d'anticapitalisme :
« La FNAB réitère sa demande que l’Etat ne laisse pas seul le marché donner le cap de la transition agro-écologique. Il serait inacceptable que les plans de relance ne soient pas conçus comme des accélérateurs de transition écologique et sociale. »
Là aussi, de qui se moque-t-on ? N'est-ce pas « l'État »-Ubu qui est à la manœuvre, par les décisions gouvernementales et administratives, les lois et règlements auxquels contribuent des parlementaires frénétiques, etc. ?
On peut voir une sorte de jalousie dans cette diatribe. C'est chez les gens « d'en face », et précisément ceux qui sont à la pointe de la technique, que le Président Emmanuel Macron a déclaré :
« Je suis venu pour remercier les exploitants et leurs salariés. La chaîne alimentaire a tenu. Tout le monde agricole, agroalimentaire et la distribution ont joué le jeu de façon formidable. Je rends hommage à celles et ceux qui permettent de nourrir le pays. »
et :
« Merci à la ferme France. Elle a tenu. On peut en être fier. J'espère que nos concitoyens vont être réconciliés avec ce beau métier qui est celui de nourrir la nation. »
Dans un monde raisonnable, les états d'âme de la FNAB seraient bien futiles. Mais cela a fait le bonheur de quelques médias. Ainsi, après un « En Bretagne, Emmanuel Macron remercie la France qui tient », le Parisien a produit un « Visite de Macron dans des serres de tomates : les agriculteurs bio voient rouge »... Non... Pas « les agriculteurs bio »... les apparatchiks de la FNAB.
(Source)
Selon le Parisien,
« Lors de sa visite, Emmanuel Macron a estimé que la France ne pouvait pas compter uniquement sur les circuits courts et le bio pour se nourrir, et souligné la complémentarité avec l'agriculture conventionnelle. »
Voilà donc le motif de l'irritation des apparatchiks...
Petit rappel :
(Source)