La technologie favorise la durabilité dans une ferme familiale brésilienne
Henrique Fiorese*
Henrique Gustavo Fiorese, membre du Global Farmer Network (réseau mondial d'agriculteurs), raconte comment sa famille dépend de la technologie et de la durabilité dans cet article de Joan Conrow, de l'Alliance Cornell pour la Science.
Comme le pense l'agriculteur et avocat brésilien Henrique Gustavo Fiorese, l'avenir de l'agriculture dépend de la technologie et de la durabilité.
Bien que ces deux concepts puissent être adoptés indépendamment, ils sont de plus en plus étroitement liés dans l'agriculture moderne, a-t-il déclaré, citant les cultures génétiquement modifiées qui permettent aux agriculteurs comme lui de réduire leur utilisation de pesticides chimiques, et les applications pour économiser l'eau qui identifient exactement le moment où les cultures ont besoin d'irrigation et la quantité à apporter.
Fiorese, qui cultive avec son frère et son père à Brasilia, a vu par lui-même l'intérêt de protéger la nature sauvage et d'employer des pratiques durables. Ils produisent du soja, du maïs, du blé et des féveroles – un haricot brun qui est un aliment de base au Brésil – sur 2.800 hectares, tout en laissant intacts 1.200 hectares de forêt tropicale.
Bien que la loi brésilienne oblige les agriculteurs à préserver la forêt indigène, Fiorese et sa famille protègent bien plus que les 560 hectares prescrits par la loi. Ils ont également érigé volontairement des clôtures autour de la réserve pour éloigner le bétail et dissuader les humains de chasser et de pêcher. Ils ont pris ces mesures car ils reconnaissent à la fois la valeur intrinsèque et pratique de la protection de la forêt tropicale, qui est pour eux un élément hydrologique critique.
« Il y a d'immenses arbres et aussi des rivières qui y naissent », a-t-il expliqué. « La majeure partie de l'eau utilisée dans notre ferme est empruntée à cette région. Nous en sommes responsables. Nous la protégeons pour les générations futures. Nous pouvons voir qu'en préservant non seulement la forêt, mais aussi le sol que nous utilisons chaque année, qu'en faisant les deux en même temps, cela peut augmenter la production. Et nous vivons avec des animaux et des insectes indigènes qui nous aident, comme les pollinisateurs. »
Les Fiorese, qui ont un partenariat avec Bayer, ont mis en œuvre l'un des projets de « soins aux abeilles » de l'entreprise pour en savoir plus sur les pollinisateurs et cataloguer les espèces qui vivent sur leur ferme. Dans le cadre de ce projet, des chercheurs universitaires effectuant des prospections d'insectes dans leurs champs ont récemment découvert une toute nouvelle espèce d'abeille indigène.
« Ce fut une surprise », a-t-il déclaré, notant avec fierté que sa famille allait pouvoir nommer la nouvelle espèce. « Avant de commencer ce projet, nous ne savions pas grand-chose sur les abeilles, seulement que certaines produisent du miel et qu'elles sont essentielles à la pollinisation. Nous n'avions pas réalisé l'importance de tous les pollinisateurs. Maintenant, nous prenons plus de précautions. »
Ils ont même planté un jardin saisonnier qui fournira les abeilles en nectar et en pollen, et la ferme en miel, ainsi que des herbes aromatiques et des légumes. « C'est un nouveau projet pour nous », a-t-il déclaré. « Peut-être que si ça se passe bien, nous aurons du miel à vendre. Et nous aurons des pollinisateurs pour le soja et les féveroles. »
De gauche à droite, Henrique, Oli et Kaio Fiorese inspectent les graines de soja dans leur ferme de Brasilia.
Parce que la ferme dépend de l'eau de la réserve pour l'irrigation des cultures, la famille Fiorese la considère comme une ressource précieuse qui doit être gérée avec soin. « Nous avons des applications qui surveillent notre consommation d'eau et nous indiquent exactement la quantité d'eau dont les plantes ont besoin et quand elles en ont besoin », a-t-il expliqué.
Ils utilisent également des applications pour surveiller les populations d'insectes nuisibles afin qu'ils sachent précisément quand et où ils doivent traiter, et quelle quantité utiliser. « Nous allons uniquement aux endroits qui ont besoin d'être traités, nous économisons donc de l'eau, du gazole et du temps », a expliqué Fiorese.
Les cultures transgéniques, ou génétiquement modifiées (GM), jouent un autre rôle important dans les pratiques de durabilité de la ferme. Fiorese a déclaré que son frère, son père et lui étaient unanimes dans leur décision de cultiver des plantes GM, et ce, pour plusieurs raisons. « Vous traitez moins, vous utilisez moins de produits chimiques et d'eau, c'est plus facile sur les machines, cela réduit nos coûts et cela nous aide à améliorer notre production, uniquement grâce à la technologie des semences », a-t-il expliqué. « Et ça s'améliore chaque année. »
Les rendements plus élevés leur permettent de produire plus sur la même surface, ils n'ont donc pas besoin d'ouvrir de nouvelles zones de culture, protégeant ainsi les terres sauvages, a-t-il déclaré. « C'est un grand avantage pour tout le monde. Je ne vois pas d'études qui disent le contraire ou quoi que ce soit qui prouve que c'est nocif. Je ne vois pas pourquoi certaines personnes ne peuvent pas utiliser cette technologie ou pourquoi certains pays ne l’autorisent pas. »
La famille mange tous les jours ce qu'elle produit, a noté Fiorese, « donc pour moi, les OGM ne sont pas une chose que je considère comme mauvaise. »
Ils produiront des cultures conventionnelles s'ils ont un contrat à cet effet, a-t-il dit, mais « cette année, tout est transgénique. C'est déterminant ici pour de bons rendements. C'est très répandu. »
La famille Fiorese dans sa ferme de troisième génération à Brasilia.
La plupart des agriculteurs brésiliens, en particulier ceux qui envisagent que leur famille reprennent l'exploitation, adoptent la technologie, a-t-il déclaré. « À l'avenir, tout le monde ira dans cette direction. Je ne vois pas l'agriculture se poursuivre sans elle. »
Il pense qu'il est important pour ceux qui s'opposent à la technologie GM de voir « la réalité de l'agriculture au Brésil ou en Afrique. Nous n'avons pas d'hiver, donc c'est un très bon environnement pour le développement des ravageurs. Si nous n'avions pas de technologie, et seulement des produits chimiques, pour les éviter, ce serait une catastrophe que de planter. Il est essentiel de rendre l'agriculture viable. Nous ne produirions rien sans cette technologie. »
Fiorese a déclaré que les Brésiliens ont largement accepté la technologie GM parce que « la majeure partie de notre économie est fondée sur l'agriculture et la production d'aliments. Il est donc fondamental pour notre économie d'avoir cette technologie. Il y a une certaine opposition, mais la plupart des gens comprennent l'importance des transgéniques. »
En tant qu'avocat, Fiorese fournit une représentation légale à l'Association Brésilienne des Producteurs de Grains et gère également tous les contrats, les finances et la paperasse nécessaires au fonctionnement de la ferme. Il aime mettre ses compétences juridiques à la disposition de la ferme que ses grands-parents ont commencée après avoir émigré d'Italie à Brasilia, et où il a passé ses vacances scolaires dans sa jeunesse.
« Je ne me vois pas faire quelque chose d'autre », a déclaré Fiorese, notant qu'il aime la variété des activités journalières. « Au début, j'étais vraiment mis au défi, mais j'ai aussi beaucoup aimé. »
Même si c'est parfois difficile de travailler avec la famille, « c'est aussi une opportunité », a-t-il déclaré. « C'est vraiment bien de voir pousser les graines que vous avez semées avec la famille. Lorsque vous travaillez avec quelque chose qui a commencé avec vos grands-parents et que maintenant j'aide à faire prospérer, étape par étape, c'est vraiment gratifiant. »
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Henrique Fiorese, agriculteur, Brésil
Henrique est un avocat spécialisé en droit du travail. Il est directeur juridique d'une association brésilienne de producteurs de grains, ABRASGRÃOS. Il est de la troisième génération de la ferme familiale, née lorsque son grand-père a émigré d'Italie au Brésil. Il produit avec son père et son frère du soja, du maïs, des féveroles, du blé et du sorgho sur 2.800 hectares. Une attention particulière est accordée à 1.200 hectares de forêt indigène.
Source : https://globalfarmernetwork.org/2020/03/henrique/