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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Traction animale : l'agriculture de grand-papa au Ministère de l'Agriculture

3 Février 2020 , Rédigé par Seppi Publié dans #Politique

Traction animale : l'agriculture de grand-papa au Ministère de l'Agriculture

 

 

 

 

Je suis tombé sur une page du site du Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation et les lunettes me sont tombées du nez... il a fallu que je me frotte les yeux devant « Chevaux, ânes et labours : une pratique ancestrale aux nombreux atouts ».

 

Non, vous ne rêvez pas ! Dans cette page un peu ancienne à l'heure de l'instantané, du 3 mai 2019, l'auteur a fait le catalogue des vertus de la traction animale pour faire l'article pour une formation « traction animale » du Centre de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole (CFPPA) du « Lycée Nature » (La-Roche-sur-Yon).

 

La formation en tant que telle est plutôt bienvenue : puisqu'il y a des gens qui s'entichent d'une activité impliquant l'utilisation de la traction animale – pour de bonnes raisons dans le cas du débardage en milieu difficile ou par choix dans le cas, par exemple, du maraîchage – autant leur assurer des bases solides.

 

 

 

 

Non, c'est le discours benêt. Florilège :

 

«... un cheval dressé coûte bien moins cher qu'un tracteur » ? Vraiment ? Quel tracteur faut-il pour une petite exploitation maraîchère de 1 à 4 hectares (une des cibles de la formation) ? Quel est le coût de l'entretien du cheval (ou plutôt des chevaux car ils n'aiment pas rester seuls) ? Quel sont le temps et la surface qui doivent lui/leur être consacrés ?

 

« La traction animale – ou hippomobile – permet d'effectuer un travail de précision en maraîchage, en vigne […] ? Ah bon ! Pas le tracteur ou le motoculteur ?

 

Et le bouquet :

 

« Autre avantage, non négligeable : "on travaille dans le silence. C'est également un autre rapport au temps, on avance au rythme plus lent de l'animal, contrairement au monde qui nous entoure où tout s'accélère". »

 

Vous comprendrez sans peine pourquoi mes lunettes me sont tombées du nez...

 

Trouver ça sur le site web du Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation... Sur une page qui s'ouvre avec un lyrisme plutôt hors-sol par : « En maraîchage ou encore en viticulture, les chevaux et les ânes sont de précieux auxiliaires pour les travaux des champs. » Tellement précieux que l'essentiel des travaux est motorisé... Ne précise-t-on pas dans la foulée que :

 

« La méthode avait été un peu délaissée, mais elle rencontre un engouement chez les néo-ruraux qui se reconvertissent en agriculture et qui souhaitent s'installer en maraîchage sur des petites exploitations de 1 à 4 hectares » ?

 

Ça fleure bon « La terre qui ne ment pas ».

 

Notons incidemment que l'établissement propose aussi des « formations » en biodynamie et en « permaculture ». L'agriculture française du 21e siècle est (bien – ou plutôt bien mal) avancée...

 

 

 

 

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R
L'idée de recourir à la traction animale peut paraître farfelue, sauf à la mettre dans un contexte de civilisation post thermo-industrielle. A l'heure actuelle, une majeure partie des machines agricoles sont mues par des énergies fossiles (essentiellement pétrole). En considérant que le pétrole est une ressource en quantité finie sur Terre et que sa consommation croît chaque année, il viendra un moment où la planète ne pourra plus fournir autant de pétrole que nécessaire. La démonstration de ce fait est purement mathématique. Cela signifie donc que, si la demande ne décroît pas, il arrivera un moment où l'offre de pétrole sera insuffisante pour satisfaire tout le monde. A un horizon lointain, on peut même considérer que le pétrole aura totalement disparu de nos usages.<br /> Beaucoup de voix d'accordent à dire que nous approchons du pic pétrolier, c'est à dire le moment où les industries pétrolières atteindront leur maximum de production, et qu'elle décroitra dans la foulée. En imaginant dès à présent de renouer avec les techniques basées sur la traction animale, donc décorélées de toute source d'énergie fossile, nous opérons une transition choisie à un moment opportun, plutôt que de devoir subir de plein fouet les pénuries et de nous retrouver avec des tracteurs en panne sèche dans les champs.<br /> La traction animale amènera bien évidemment bon nombre d'inconvénients également, surtout la baisse drastique de productivité et donc hausse des prix de l'alimentaire. Les stocks de pétrole étant par définition limitée, nous n'y échapperons pas dans tous les cas.
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H
Deux remarques à ce sujet : 1°/ l'alimentation d'un cheval à l'année, c'est 1ha à l'année si on le nourrit à l'ancienne en comptant foin et avoine et en le maintenant à l'écurie hors des heures travaillées + la paille de litière. Il faut éviter de le mettre en pâture car le cheval est très sélectif dans son alimentation, il laisse quantité de plantes qu'il n'aime pas. Une très bonne pâture peut très vite se détériorer avec un cheval si on ne fauche pas soigneusement les "refus" (plantes non consommées) avant qu'ils soient en graines. Ce sont les refus qui bientôt envahiront la pâture. 2°/ Ensuite, en matière de vigne, contrairement à la "légende", l'entretien de la vigne par le labour à cheval n'est pas du tout une pratique ancestrale. Elle a un peu plus d'un siècle seulement. Avant les ceps étaient plantés en "foule" plus ou moins en ordonnée, attachés sur un échalas de bois, et la vigne était piochée à la main, en circulant autour de chaque pied par des hordes de journaliers qui y passaient leur vie. Les mesures de superficie en ouvrées (4,28 ares) dans la région Beaunoise, reflétaient pour un terroir donné à la nature de son sol, la superficie qu'un bon piocheur de vigne pouvait piocher en une journée. Chaque ouvrée se piochait plusieurs fois, quand on avait fini d'un bout, on recommençait, car la mauvaise herbe n'a pas de répit.<br /> C'est la crise du phylloxera qui entraine arrachage des vignes fin XIXème et replantation sur porte-greffes américains résistants qui va tout changer et donner les paysages de vignes soigneusement palissées en lignes que nous connaissons aujourd'hui. Mais si on replante en ligne, ce n'est pas par hasard ou pour faire joli, c'est parce qu'à la même époque, grâce à l'industrialisation massive (merci le charbon et la sidérurgie), sont apparus (au départ aux USA) toute une gamme d'outils à atteler plus légers, plus efficaces et surtout infiniment moins chers. Des charrues de vigne efficaces et abordables, attelées derrière un cheval, remplacent donc des hordes de piocheurs. Mais pour travailler, il faut de belles vignes en ligne.
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S
@ Hbsc Xris le jeudi 06 février 2020 à 09:18<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> Merci pour ce complément.
C
Chez nous, nous faisions du tabac et dans la famille de mon épouse des vignes. Nous avons tous les deux guidés des chevaux, l'une dans les vignes et l'autre pour le binage du tabac et nous avons surtout le souvenir d'orteils écrasés par les sabots! Quel soulagement quand est arrivée la bineuse Suoer Prefer ou le tracteur étroit Eicher! Ceux qui travaillent actuellement avec des chevaux, c'est de la com bien ficelée et très efficace vers une clientèle bobo. Quand on constate le mal qu'on a pour recruter des vendangeurs, je me demande comment on trouvera la main d’œuvre pour travailler avec un cheval. Et L214 dans tout ça. Je me trompe peut-être, mais je crois qu'à l'époque de la traction animale et humaine, en moyenne, 40% de la production d'une exploitation était dédiée à l'autoconsommation.Pour être cohérentes, les exploitations qui repassent à la traction animale devraient produire le fourrage nécessaire sur leur terres.
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S
@ Clément d'Alsace le lundi 03 février 2020 à 09:09<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre témoignage.<br /> <br /> La dernière paire de chevaux que j'ai connue avançaient droit.<br /> <br /> La question de la production du fourrage chez les viticulteurs "à cheval" est intéressante. Cela m'étonnerait qu'ils produisent de l'avoine ou de la luzerne.