INRAE et « agriculture sans pesticide chimique » ... dies irae
La rationalité sacrifiée sur l'autel de la démagogie
Notre tout nouvel Institut de Recherche pour l'Agriculture, l'Alimentation et l'Environnement (INRAE) vient d'organiser – conjointement avec deux instituts de recherche allemands (hélas... même les Allemands...) – le passage d'une partie de l'Europe dans l'obscurantisme, le charlatanisme et, pour tout dire, la connerie.
Voyez ce communiqué de presse dégoulinant de fanfaronnade : « Alternatives aux pesticides chimiques : 24 organismes de recherche européens s’engagent sur une feuille de route ambitieuse »
Si vous n'êtes pas tombé à la renverse à la lecture de « pesticides chimiques », vous pouvez peut-être encore absorber le résumé :
« Mobiliser les efforts de recherche pour accélérer la transition agroécologique répond à une forte demande des pouvoirs publics, des professionnels et de la société, en France comme en Europe. Pour faire face à ce défi majeur, repenser la manière dont la recherche doit être conduite et développer une stratégie commune de recherche et d’expérimentation non plus à une échelle uniquement nationale mais européenne est l’objet de la déclaration d’intention "Pour une agriculture sans pesticide chimique". Cette déclaration a été signée aujourd’hui par 24 organismes de recherche de 16 pays européens. Sous l’impulsion de l’institut français INRAE et de ses homologues allemands ZALF et JKI, cet engagement sans précédent permet la mobilisation de toute une communauté de recherche autour d’une vision partagée d’une agriculture sans pesticide chimique. Cette déclaration formalisée à l’occasion du Salon International de l’Agriculture le 23 février, avec le soutien des ministères français en charge de l'agriculture et de la recherche, et en présence d'Amélie de Montchalin, Secrétaire d'Etat aux Affaires Européennes, assoit la mise en place d’une alliance européenne de recherche qui finalisera une feuille de route et la présentera prochainement à la Commission Européenne pour contribuer au Pacte Vert pour l’Europe. »
Un « engagement sans précédent » ? Est-ce un embarquement pour nowhere – nulle part – car on voit mal comment on pourrait se passer de pesticides « chimiques », vu que, déjà, tout est « chimique », ou un tigre de papier annonçant avec cynisme une intention de syphonner des fonds européens, d'une Union Européenne maintenant obnubilée par le Green Deal ?
Toujours assis ?
La suite regorge de mots aussi creux que grandiloquents : « dialogue à l’échelle européenne entre chercheurs, ouvert aux partis prenantes » ; « L’objectif est ambitieux » ; « définir une nouvelle stratégie de recherche, transdisciplinaire et multi-acteurs » ; « transition vers une agriculture sans pesticide chimique partout sur le continent » ; « vision ambitieuse » ; « transition écologique durable à l’échelle du continent » ; « mesures très ambitieuses » ; « développer une agriculture durable et produisant des aliments sains » – implicitement : ceux d'aujourd'hui ne le sont pas... « tout en gardant des systèmes agri-alimentaires productifs et économiquement viable »...
On va donc « mieux utiliser les approches agro-écologiques afin de développer des systèmes de production plus résistants aux maladies, exploiter le fort potentiel de la sélection végétale, développer l’utilisation du numérique et des nouvelles technologies et agroéquipements, approfondir les leviers et verrous de la transition socio-économique ». Va-t-on se lancer dans la génétique moderne, les OGM et les NBT ?
Ça va remuer !
« Une feuille de route en préparation invoque aussi une remise en question des méthodes de recherche en intégrant des approches systémiques et multidisciplinaires. Ces nouvelles méthodes doivent renforcer et accélérer le lien entre avancées des connaissances et expérimentations en laboratoire et sur le terrain. Une science menée de manière ouverte, en lien avec le monde agricole pour que celui-ci s’approprie les changements, en partageant les travaux et les résultats dans tout territoire, sur tout type de culture et en intégrant la variabilité des climats et des sols pour tester à grande échelle des solutions alternatives. »
On n'aurait donc pas encore intégré « des approches systémiques et multidisciplinaires », créé un lien efficace « entre avancées des connaissances et expérimentations en laboratoire et sur le terrain », mené une science « de manière ouverte, en lien avec le monde agricole »...
Oh ! On veut aussi « contribuer à […] permettre d’éclairer les politiques publiques nationales et européennes »... L'expérience nationale avec le glyphosate est tout à fait éclairante...
Voici la liste des 24 organismes de recherche qui vont changer le monde ou plus prosaïquement chasser des subventions :
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Aarhus University, Danemark
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Agricultural Academy, Bulgarie
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Agricultural University of Athens, Grèce
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Agroscope, Suisse
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Alma Mater Studiorum - University of Bologna, Italie
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Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, Cirad, France
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Consiglio Nazionale delle Ricerche, Italie
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Hungarian Research Institute of Organic Agriculture, Hongrie
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French National Research Institute for Agriculture, Food and Environment– INRAE, France
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Institute of Agriculture and Food Biotechnology – IBPRS, Pologne
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Julius Kühn-Institute – JKI, Federal Research Centre for Cultivated Plants, Allemagne
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Latvia University of Life Sciences and Technologies, Lettonie
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Leibniz Centre for Agricultural Landscape Research – ZALF, Allemagne
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National Agriculture Research and Innovation Centre – NAIK, Hongrie
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Natural Resources Institute Finland – Luke, Finlande
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Rzeszow University of Technology, Pologne
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Sant’Anna School of Advanced Studies, Italie
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Swedish University of Agricultural Sciences – SLU, Suisse
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Szent István University, Hongrie
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Teagasc - Agriculture and Food Development Authority, Irlande
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University of Agricultural Sciences and Veterinary Medicine - USAMV – Bucarest, Roumanie
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University of Life Sciences in Lublin, Pologne
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Vytautas Magnus University Agriculture Academy, Lituanie
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Zagreb University, Faculty of Agriculture, Croatie
Seize pays européens, dont la Suisse ? Il en reste douze, pas tous petites ni insignifiants du point de vue de la recherche agronomique, qui n'ont pas (encore ?) cédé à la folie : Autriche, Belgique, Chypre, Espagne, Estonie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Slovaquie, Slovénie.
(Source)