« ImPACtons » ! Un nouveau débat public... l'agribashing organisé
Le 23 février 2020, M. Didier Guillaume, ex-candidat à la Mairie de Biarritz et toujours Ministre de l’Agriculture et de l'Alimentation, a lancé au Salon International de l’Agriculture, « imPACtons ». C'est un débat public sur l’agriculture, plus précisément sur les règles qui devraient régir la Politique Agricole Commune (PAC) pour le cycle 2021-2027 et la répartition des quelque 9 milliards d’euros alloués chaque année à l’agriculture française (soit quelque 37 centimes d'euro par Français et par jour, venant de fonds européens).
Jamais à court d'une tartarinade, il a lancé :
« La France est le seul pays [de l’Union européenne] à lancer un débat. C’est un investissement et un engagement. C’est un budget de 1,2 million d’euros. Ce n’est pas un débat sur la politique agricole française, mais sur la Pac et sur comment la France fera son plan stratégique national (PSN). »
On voit... ImPACtons permettra à des spécialistes de la culture d'herbettes en jardinière, capables de faire survivre un pot de basilic pendant une semaine entière, de dispenser de précieux et avisés conseils au gouvernement pour l'élaboration de son plan stratégique... Faut-il paraphraser le célèbre aphorisme d'Umberto Eco ?
Gageons que bien peu de prescripteurs d'agriculture biologique, d'agroforesterie, de permaculture, etc. n'auront lu le « Projet de diagnostic en vue du futur Plan Stratégique National de la PAC post 2020 » avant de se lancer.
Selon le site dédié,
« Parce que l’avenir de l’agriculture française est l’affaire de tous, vous avez trois mois pour faire entendre votre voix, grâce à ce débat inédit, national et indépendant organisé par la Commission nationale du débat public. »
Plus prosaïquement ;
« Le débat public est une procédure du Code de l’environnement qui permet la participation de tous au processus d’élaboration d’une politique publique ou d’un projet à forts enjeux socio-économiques ou environnementaux. C’est un dispositif de démocratie participative et délibérative en amont des décisions. »
Quel bonheur ! On y trouve une référence à la sécurité alimentaire. Tout n'est pas encore perdu !
Après un travail de débroussaillage de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), il a été décidé de soumettre au débat les cinq questions suivantes :
-
Quels modèles agricoles pour la société française ?
-
Quelle transition agroécologique ?
-
Qu’est-ce que je mange ?
-
Comment cohabiter dans les campagnes ?
-
Qui décide de la politique agricole ?
Mais aucun sujet n'est tabou !
Il en est un qui s'est prodigieusement agacé devant cette situation : M. Jean-Paul Pelras. Cela a donné un excellent « Les paysans devraient immédiatement quitter le Salon de l'agriculture ! » dans le Point.
De la mise en route :
« La consultation publique baptisée "Impactons" durera trois mois. "Le plus grand nombre de citoyens" est invité à y participer pour défendre l'avenir de notre alimentation. Les ONG, les associations, les syndicats pourront rédiger des "cahiers d'acteurs". Les internautes pourront participer à la hiérarchisation des objectifs de la PAC. Une assemblée citoyenne sur l'agriculture composée de 140 personnes tirées au sort se réunira fin mars. Un "kit" sera mis en place pour la tenue de "débats maison"… Sachant que 30 réunions publiques seront organisées en régions. Cette opération, pour en assurer la neutralité, sera pilotée par des "universitaires". Il faut se rendre sur le site ImPACtons et se pencher sur toutes les "entrées" concoctées à la sauce environnementale par le "maître d'ouvrage" pour mesurer la préméditation de cette affaire qui, de toute évidence, n'a pas été couvée dimanche au chant du coq. Ou comment déléguer l'arbitrage en divisant une fois de plus les Français sur les questions écologiques et sur celles qui relèvent des aides publiques ! »
Les ONG – et les « ONG » – pourront aussi produire des réponses prémâchées – comme cela a été fait pour les zones non traitées aux abords des habitations –, demander la publication des statistiques à l'issue de la procédure et, quand leurs propositions n'auront pas été retenues, dénoncer le mépris des autorités pour l'« avis de la population » et attiser encore davantage la contestation du « système ».
Voilà ce qui a été mis en place avec la procédure de « consultation ».