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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Forêts, climat, etc. – trois réponses à Atlantico

10 Février 2020 , Rédigé par Seppi Publié dans #Divers

Forêts, climat, etc. – trois réponses à Atlantico

 

 

Atlantico m'a posé trois questions et a publié les réponses dans « Pourquoi la reforestation de la planète lui fait parfois plus de mal que de bien » (c'est leur choix pour le titre). En voici le texte.

 

 

L'une des solutions envisagées face au réchauffement climatique est la plantation d'arbres qui ont la faculté de capter et d'emmagasiner le Co2. Toutefois plusieurs questions se posent quand à la réalité de l'efficacité des plantations.

 

 

La hausse des surfaces forestières semble être une bonne nouvelle pour l'environnement. Comment caractériseriez-vous cette tendance géographiquement et écologiquement ?

 

Les choses sont rarement simples. Une forêt à l'équilibre n'emmagazine plus de CO2. « L'Amazonie, le poumon de notre planète qui produit 20% de notre oxygène », de M. Emmanuel Macron, est un mythe tenace. Une forêt rasée (ou brûlée) et reboisée captera du carbone pendant la durée de croissance des arbres, et le bilan sera positif si le bois récolté est valorisé dans la durée, par exemple dans le bâtiment. Dans nos régions, les sols de prairie stockent autant de carbone que les sols forestiers ; le crédit carbone acquis par la conversion d'une prairie en forêt est une blague (c'est sans compter l'éventuelle perte de biodiversité). Une plantation de palmier à huile peut avoir un bilan carbone supérieur à une forêt très dégradée qu'elle remplace. Elle implique généralement de fortes émissions de carbone en cas de déforestation, surtout sur sol tourbeux, mais elle a le meilleur ratio pertes de carbone écosystémique/productivité ; pour le rendement en huile, un hectare de palmier équivaut à quelque dix hectares de soja (mais celui-ci produit aussi des tourteaux).

 

 

 

 

Avons-nous une vision réaliste du rôle des arbres dans le cycle du carbone ? J'ai quelques doutes.

 

Mais une chose est sûre : compter sur la forêt pour, en quelque sorte, compenser notre boulimie de combustibles fossiles est un mauvais calcul et ne peut qu'être temporaire. Une autre, l'initiative 4 pour mille, est en revanche crédible : augmenter de 0,4 % par an les stocks de carbone des premiers 30 à 40 cm de sol absorberait une quantité significative du CO2 émis par les activités humaines. Pour cela, il faut, entre autres, une agriculture de conservation et de régénération des sols... et la possibilité de recourir à un usage judicieux du glyphosate...

 

 

Les forêts ont un effet globalement positif – du point de vue de l'Humain – sur le climat ; L'Homme qui plantait des arbres de Jean Giono n'est pas une fable. Elles fournissent d'autres services écologiques comme la stabilisation des sols dans les pentes et la lutte contre l'érosion. De ce point de vue, les efforts d'afforestation entrepris par exemple par la Chine ou par les pays du Sahel avec leur Grande Muraille Verte sont fort bienvenus.

 

D'une manière générale, la NASA a constaté un verdissement de la planète – l'équivalent de la forêt amazonienne en deux décennies –, particulièrement en Chine du fait de l'afforestation et en Inde du fait de l'intensification de l'agriculture (c'est-à-dire de la production alimentaire). Certes, le gain d'un hectare ici ne compense la perte d'un hectare là que sur une feuille de calcul, mais c'est une excellente nouvelle : l'Homme, cette espèce honnie par les collapsologues, contribue à ce phénomène.

 

Il ne faut pas oublier la dimension sociale. Chez nous, la déprise agricole suivie de l'embroussaillement puis d'un boisement de mauvaise qualité n'est pas une bonne nouvelle. Pour nos amis africains, formons le vœu qu'ils réussissent dans leur entreprise, repoussent le désert et créent de nouvelles perspectives écologiques qui pourront produire des bénéfices sociaux, économiques et géostratégiques considérables.

 

 

Pouvez-vous nous expliquer la différence écologique fondamentale qui sépare ce phénomène de l'extension de la mono-arboriculture ?

 

Les peuplements naturels et les plantations monospécifiques sont en règle générale des écosystèmes pauvres par rapport aux peuplements diversifiés, et ce, par nature et, le cas échéant, du fait de la main de l'Homme. Mais, selon le WWF, les plantations « industrielles » d’arbres à croissance rapide fournissent environ 14 % des bois ronds utilisés mondialement (520 millions de m3), alors qu'elles ne représentent que 2% de la surface forestière mondiale (54,3 millions d’hectares).

 

Que vaut-il mieux ? Pas de plantations et une exploitation plus intensive de la forêt dite « naturelle » ? Ou des plantations, bien sûr gérées de manière responsable, et la possibilité de préserver des forêts ? L'écologie n'est simple que pour les écologistes, pas pour les écologues.

 

 

L'actualité en fit état en Californie, au Brésil, au Congo et en Australie : les feux de forêts sont-ils réellement calamiteux pour le réchauffement climatique ?

 

Il y a aussi eu les feux dans l'Arctique, en Sibérie, en Indonésie, en Grèce, au Portugal, en France... Sur onze mois en 2019, les feux de forêts auraient émis 6,375 gigatonnes de CO2 selon le programme européen de surveillance de la Terre Copernicus. Mais les feux sont un phénomène récurrent qu'il faut évaluer, non pas en fonction de la couverture médiatique et, aussi, de la gesticulation politique, mais de l'évolution dans le temps.

 

Ce chiffre est à comparer aux quelque 36,8 gigatonnes issues de l’usage du charbon, du pétrole et du gaz, ainsi que de la fabrication du ciment, et aux 43,1 gigatonnes émises au total en 2019 par les activités humaines. Et aux quelque 3.000 gigatonnes de CO2 présentes dans l'atmosphère.

 

Bien malin qui peut prédire l'effet de ces incendies sur le climat ! Mais faisons preuve de sérénité et d'optimisme dans ce monde harcelé par des prophètes de malheur qui font du climat un nouveau cavalier de l'Apocalypse : tout ce qui a brûlé reverdira et se reboisera, sauf conversion à l'agriculture ou urbanisation.

 

 

Post scriptum

 

On peut aussi lire « Émissions de CO2 : les arbres peuvent-ils nous sauver ? », un article d'août 2019 du Point.

 

 

 

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I
Excellentes interview qui montre bien que les choses sont fort complexes, plus que ce que l'on pense souvent. C'est le souci : depuis que je m'intéresse à l'écologie je sais de moins en moins ce qui est bon ou pas pour l'environnement et j'ai abandonné pas mal de certitudes ancrées. Du coup je suis enclin à me dire que chaque solution est valable pour un territoire donné mais pas pour un autre... et qu'il vaut mieux écouter les scientifiques spécialistes du territoire en question plutôt que les activistes victimes d'un fort syndrôme Dennis-Krueger ou des chercheurs non-spécialistes qui pensent que leur statut de sciebtifique leur donne le droit de parler de tout. <br /> <br /> Encore merci, Seppi
Répondre
C
Monoculture maïs grain parcelle du Piémont<br /> MO g/kg:<br /> 1991:15<br /> 2003:18.2<br /> 2009:19.4<br /> 2011:21.5
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H
Juste excellent. L'occasion de rappeler que si cela a autant brûlé en Australie, ce n'est pas par hasard, mais c'est le résultat d'une vingtaine d'années de politiques écologistes ayant interdit progressivement, sous peine de sévères amendes, les écobuages préventifs. Or quand vous vivez dans des zones marquées par de fortes sécheresses, les tapis de feuilles, de branches, de pelures d'écorces et d'arbres morts ne se dégradent pas comme sous un climat humide, mais constituent des accumulations de combustibles s'empilant au fil des ans. Pire l'eucalyptus cher aux écologistes est surnommé "gasoline tree" en Australie, en raison des huiles qu'il contient et qui en font un arbre propre à alimenter des brasiers infernaux. Pire encore, il germe mieux après un incendie et, en l'absence d'entretien sélectif, en profite pour s'étendre. L'occasion aussi d'attirer l'attention sur copernicus.eu, un site de mesures satellitaires des différentes pollutions atmosphériques et de leurs zones d'émissions sur la planète. Le site comporte une cartographie consacrée aux feux, et on se rend compte que cela brûle bien ailleurs qu'en Australie, mais on en parle pas https://atmosphere.copernicus.eu/charts/cams/fire-activity. L'occasion encore de préciser que nos empreintes carbone sont calculées virtuellement dans des bureaux d'études selon des comptabilités "usine à gaz" et ne reflètent pas la réalité satellitaire. Quid des pollutions impressionnantes que l'on constate émanant des continents africains et asiatiques. Et ne parlons pas seulement des industries que nous avons repoussé à l'étranger, une grande partie de la pollution résulte tout simplement des actes de la vie quotidienne : cuisine, déplacements, etc... Il est bien évident qu'entre une cuisinière électrique à l'électricité nucléaire et la cuisine faite sur un brasero au charbon de bois, en matière de pollutions diverses, il n'y a pas photo. Et même s'il y a moins de voitures dans les pays émergents, je serais curieuse de savoir combien il faudrait aligner de voitures aux normes européennes pour dégager une pollution égale à seulement un seul de leur véhicule. Ne jetons pas la pierre à des continents comme l'Afrique cependant, il est vrai que nous sommes en partie responsables des pollutions qu'ils dégagent en leur refusant l'accès à des sources d'énergie leur permettant un vrai développement. Ce n'est pas avec des panneaux solaires qu'ils vont faire la cuisine ou monter des industries. Et vu les choix énergétiques imposées à l'Afrique par les politiques écologistes des pays riches, les africains ne sont pas prêt d'arrêter d'avoir besoin de groupes électrogènes bien polluants (surtout vu les anciens modèles utilisés là-bas) ou de brûler des forêts pour avoir du charbon de bois.
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H
L'essentiel de la presse internationale est ancrée à gauche et diffuse intox sur intox sans que personne ne relève, donc dire qu'un journal est à droite pour critiquer son contenu et laisser entendre que ce serait forcément douteux, est peut-être un peu excessif. Les interviews ont-ils été inventés ? Admettons l'hypothèse...<br /> Maintenant ma principale source n'est pas ce journal ou d'autre, mais la rencontre avec quelques agriculteurs australiens à l'occasion de rencontres passées entre agriculteurs, puisque je suis moi-même une petite agricultrice de la zone Pacifique. Nous avions notamment discuté de la question du nettoyage des clôtures (sur des km, entendons bien) de pâtures ou de cultures. En zone sèche, le glyphosate est indispensable pour ne pas avoir une touffe poussant sur la clôture, et cela se complète par un no man's land de plusieurs mètres de part et d'autre de la clôture fait au glyphosate ou à la charrue à soc (si c'est possible). Cela étant l'idéal est de pouvoir débroussailler et brûler préventivement très largement tous les endroits sensibles de sa propriété. Je le répète souvent : sans carburant, chaleur ou pas, pas de feu. Vous avez vu brûler dans les déserts sableux ou rocailleux du Sahara ??? Les éleveurs australiens pleuraient devant les interdictions. Effectivement, elles n'ont commencé qu'il y a 20 ans environ, mais se sont étendues progressivement d'état en état partout en Australie, ces dernières années, sous la pression écolo. Les écolos ne voulaient plus de feux dégageant du CO2 (très mal) et s'imaginaient que les feuilles, branches, écorces accumulées se dégraderaient et nourriraient le sol et la biodiversité qui leur est chère. Les pauvres citadins ne savent pas qu'en atmosphère sèche, la dégradation est infiniment, infiniment, infiniment lente. Cela sèche, s'empile et fini toujours par brûler, soit sous contrôle, soit comme cela s'est passé en Australie en tragédie. La catastrophe était prévisible.<br /> Ensuite quand on a Wikipédia comme argumentaire scientifico-écologiste, que répondre ? Ben rien tout simplement..... Je ne tire pas mes connaissances de Wikipédia mais d'une part de mon vécu, d'autre part sur le plan scientifique pur de gros pavés universitaires de Biologie, chimie, botanique, etc... qui n'ont rien à voir..... Sur le plan de la faune, de la flore, de l'agriculture (et sur d'autres) la prétendue encyclopédie libre est un florilège de désinformation et de n'importe quoi non vérifié. J'ai tenté de modifier des articles à une époque, avec de solides argumentaires, mes rectifications duraient 24h maxi et puis l'ancien article plein d'erreurs et écolo-propagandiste revenait. Les khmerts verts sont particulièrement à l'affut sur Wiki, je pense qu'ils ont des systèmes d'alerte automatique et re-rectifient de suite. Et tragiquement, on se rend compte que beaucoup de journalistes ont Wikipédia comme source et que des enseignants le conseille à l'école. Effarant.
C
«Tim Blair is a columnist for Australia’s Daily Telegraph.»<br /> Propriété de News Corporation de Rupert Murdoch. Il faut faire attention avec les journaux de Murdoch, C'est reconnu comme ayant peu de diversité de point de vue.<br /> <br /> De plus, les différents gouvernements était au courant pour les risques d'incendies majeures depuis 2005. Il y a même un rapport qui concluait :<br /> <br /> « Dans l’ensemble », concluait en 2008 un rapport du ministère australien de l’Environnement et des changements climatiques, « ces résultats suggèrent que la saison des feux commencera plus tôt et finira légèrement plus tard, tout en étant généralement plus intense. Cet effet sera plus prononcé vers 2050, quoique il pourrait être apparent vers 2020. »<br /> <br /> https://www.sciencepresse.qc.ca/actualite/2020/01/06/australie-9-signaux-alarme-ont-ete-entendus
J
Wikipédia confirme:<br /> <br /> However, conservative politicians and media primarily blamed a lack of prescribed burning and fire break management, although such assertion has subsequently been heavily criticised and disproven by scientific experts.[394][395][365] Accompanying this was the assertion that environmental groups were responsible for the crisis by inhibiting prescribed burning, despite environmental groups holding relatively negligible political power compared to the Liberal and National parties. Furthermore, the amount of prescribed burning in southeastern Australia has been stated to have increased in recent years, following the recommendation for increased prescribed burning from the 2009 Black Saturday Royal Commission.[396] Experts suggested that prescribed burning has been more difficult to achieve given recent trends towards warmer and dryer conditions.[365] Experts have also cast skepticism on the effectiveness of fuel reduction treatments, citing research that suggests that prescribed burning does little to stop bushfire and save property in south east Australia, with climate and weather conditions having primary influence.[394][365][397] <br /> <br /> Traduction: ils ont fait plus de brulage préventif depuis 2009 qu'avant mais vu que c'est la sécheresse depuis des années, ils ne peuvent pas en faire (on n efait psa de brulage préventif si ça risque de partir en couille à cause de la météo). En tout cas, ce n'est pas la faute des écolos.<br /> Y'a aussi un passage sur le : cramer 5 a 10% préventivement chaque année, est-ce mieux que tout cramer "naturellement" tous les 10 ans...
H
@Justin, je suppose que le monde agricole australien vous est totalement et absolument étranger. Sans vivre en Australie, je vis dans le Pacifique, et ce n'est pas tout à fait mon cas..... https://www.spectator.co.uk/2020/01/fight-fire-with-fire-controlled-burning-could-have-protected-australia/
J
" résultat d'une vingtaine d'années de politiques écologistes ayant interdit progressivement, sous peine de sévères amendes, les écobuages préventifs. "<br /> <br /> Il me semble que c'est faux...