Fongicides SDHI : les fort bienvenues outrances du député Loïc Prud'homme
Le 28 janvier 2020, Contrepoints publiait « Pas de panique ! ni la France ni la planète ne s’appellent Titanic ! » de M. Loïc Le Floch Prigent. Cet article balayait plusieurs sujets et s'ouvrait sur un hommage appuyé à M. Roger Genet, directeur général de l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail (ANSES) :
« En écoutant Roger Genet, Directeur Général de l’ANSES se débattre contre les volées de bois vert reçues de toutes parts contre l’avis de son Agence sur les SDHI, c’est-à-dire les substances qui bloquent la respiration des cellules des champignons affectant les cultures, qui sont la base des fongicides, j’ai eu le cœur serré.
Scientifique infatigable au service de la collectivité, voilà un homme qui ne souscrit pas à l’émoi de quelques scientifiques et il est immédiatement accusé de collusion avec les "lobbies industriels".
Il suffit donc de s’autoproclamer "lanceur d’alerte", de rédiger un texte annonçant l’apocalypse et d’en faire une bonne publicité dans les médias pour se donner le droit de salir deux professions : celle des contrôleurs des produits consommés par la population et celle des industriels qui les fabriquent et les mettent à disposition. »
Cet hommage fait écho à celui que lui a rendu le sénateur Gérard Longuet, président de l'Office Parlementaire d'Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) – et lui-même vilipendé par la « bien-pensance » pour son parcours politique –, à l'issue de l'audition sur les fongicides SDHI du 23 janvier 2020 :
« ...En tout cas, moi je remercie les intervenants de ce matin, les intervenants présents à cet instant, l'Anses, vous avez une responsabilité extraordinairement lourde. Vous êtes sous le feu croisé de l'inquiétude spontanée et naturelle, ET du commerce de la peur, qui est également un commerce profitable, à rentabilité immédiate, et vous y faites face avec ce qui appartient à la culture française, c'est-à-dire le bénéfice d'une tradition de l'État et du service public, qui est quand même établie et rassurante. […] »
Le contexte étant posé, voici la question qu'a posée le 28 janvier 2020 M. Loïc Prud'homme, député La France Insoumise (nous ne nous lasserons pas de fustiger cette appellation) au Ministère de la Transition Écologique et Solidaire sous le titre : « Mettre de l'ordre et de l'indépendance à l'ANSES »
« M. Loïc Prud'homme alerte Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur l'ANSES, l'agence de l'État qui est censée protéger la santé. C'est elle qui autorise la commercialisation des produits phytosanitaires que l'on retrouve dans les champs et les assiettes. Peu connue du grand public, mais également peu efficace à remplir ses missions de protection. Et pour cause ! L'ANSES a autorisé le Round-Up 360 de Monsanto alors qu'elle n'a analysé qu'une seule des substances dans le produit ! Non seulement elle autorise cet herbicide contenant du glyphosate classé cancérogène probable mais n'examine pas les co-formulants, pourtant problématiques. En plus de délivrer des permis d'empoisonner la deuxième mission de l'ANSES est de contrôler a posteriori que le produit qu'elle a autorisé n'est pas en train de décimer la biodiversité ou la santé, voire les deux. Depuis des mois, des scientifiques alertent l'ANSES sur la dangerosité des SDHI, des pesticides massivement épandus sur les cultures depuis dix ans et que l'on retrouve dans 60 % des aliments. Ces fongicides bloquent la respiration cellulaire des végétaux et animaux, et seraient à l'origine de cancers chez l'Homme. S'appuyant sur des études produites par les firmes et un rapport désavoué par les scientifiques, l'ANSES refuse d'interdire les SDHI par principe de précaution. Y a t-il un lien avec le fait qu'une des experte sollicitée par l'ANSES travaille pour le développement des SDHI et présente des conflits d'intérêts de longue date avec les firmes vendant ces SDHI, dont Syngenta ? Quand la déontologie est sacrifiée le scandale sanitaire est assuré. Car s'intéresser au fonctionnement de l'ANSES c'est aussi découvrir les conflits d'intérêt au service des multinationales. Alors que l'autorisation du Round Up 360 a été annulée par la justice en 2019 lors d'une décision historique, le directeur de l'ANSES a dit qu'il ferait appel de cette décision ! Sans doute pour ne pas compliquer les relations avec sa directrice de cabinet ancienne lobbyiste pro-pesticides ? Voilà une agence baignée de conflits d'intérêts qui délivre à la fois les permis d'empoisonner et se charge de les contrôler a posteriori. Quand va-t-elle scinder l'ANSES en deux entités indépendantes ? Il lui demande comment elle va y mettre de l'ordre et de l'indépendance pour que l'ANSES ne soit plus l'agence nationale de sous-évaluation des scandales sanitaires. »
Ce n'est pas l'ultima ratio de Schopenhauer, mais l'ultissima ratio ! Quoique... le pire n'est jamais certain.
En tout cas, c'est démontrer l'absence d'arguments sérieux que de s'abaisser à ce niveau d'invectives, pour un participant actif à la conférence de presse, « plutôt rock » selon Charlie Hebdo, dans laquelle une « petite coalition » incluant « des parlementaires comme les députés Loïc Prud’homme et Delphine Batho ou le sénateur Joël Labbé » ont annoncé une saisine de la justice.