Glyphosate : encore une étude de toxicologie avec des doses invraisemblables
C'est pré-publié pour le moment sur BioRxiv, et c'est « Shotgun metagenomics and metabolomics reveal glyphosate alters the gut microbiome of Sprague-Dawley rats by inhibiting the shikimate pathway » (la métagénomique et la métabolomique Haut débit révèlent que le glyphosate altère le microbiote intestinal des rats Sprague-Dawley en inhibant la voie du shikimate).
Et c'est de Robin Mesnage, Maxime Teixeira, Daniele Mandrioli, Laura Falcioni, Quinten R Ducarmon, Romy D Zwittink, Caroline Amiel, Jean-Michel Panoff, Fiorella Belpoggi, Michael Antoniou – un attelage de l'Institut Ramazzini à la sulfureuse réputation, du King's College de Londres, de l'Université de Caen et de l'Université de Leiden.
En voici le résumé (nous découpons...) :
« Il y a un débat intense sur la question de savoir si le glyphosate peut interférer avec la biosynthèse des acides aminés aromatiques dans les micro-organismes colonisant le tractus gastro-intestinal, ce qui pourrait potentiellement entraîner des résultats négatifs pour la santé.
Nous avons comblé cette lacune majeure de la toxicologie du glyphosate en utilisant une stratégie multi-omique combinant la métagénomique et la métabolomique Haut débit. Nous avons testé si le glyphosate (0,5, 50, 175 mg/kg p.c./jour) ou sa formulation herbicide commerciale représentative MON 52276 aux mêmes doses équivalentes de glyphosate a un effet sur le microbiote intestinal du rat dans un test de toxicité subchronique de 90 jours.
Les mesures de biochimie clinique dans le sang et les évaluations histopathologiques ont montré que le MON 52276, mais pas le glyphosate, était associé à une augmentation statistiquement significative de la stéatose et de la nécrose hépatiques. Des lésions similaires étaient également présentes dans le foie des groupes traités au glyphosate mais pas dans le groupe témoin.
La métabolomique du caecum a révélé que le glyphosate inhibe l'enzyme 5-énolpyruvylshikimate-3-phosphate (EPSP) synthase dans la voie du shikimate, comme en témoigne une accumulation d'acide shikimique et d'acide 3-déshydroshikimique.
Les niveaux de dipeptides du microbiote caecal impliqués dans la régulation de l'équilibre redox (gamma-glutamylglutamine, cystéinylglycine, valylglycine) voyaient leurs niveaux significativement augmentés.
La métagénomique tronquée a montré que le glyphosate affectait la structure de la communauté microbienne du caecum et augmentait les niveaux d'Eggerthella spp. et Homeothermacea spp. Le MON 52276, mais pas le glyphosate, a augmenté l'abondance relative de Shinella zoogleoides. Les Shinella spp. étant connus pour dégrader les alcaloïdes, l'augmentation de leur abondance peut expliquer la diminution des niveaux de solanidine mesurés avec le MON 52776 mais pas le glyphosate.
D'autres formulations de glyphosate peuvent avoir des effets différents, car le Roundup GT Plus a inhibé la croissance bactérienne in vitro à des concentrations auxquelles le MON 52276 n'a présenté aucun effet visible.
Notre étude met en évidence la puissance d'une approche multi-omique pour étudier les effets des pesticides sur le microbiote intestinal. Cela a révélé le premier biomarqueur des effets du glyphosate sur le microbiote intestinal du rat. Bien que davantage d'études soient nécessaires pour déterminer s'il existe des implications pour la santé résultant de l'inhibition par le glyphosate de la voie du shikimate dans le microbiote intestinal, nos résultats peuvent être utilisés dans des études épidémiologiques environnementales pour comprendre si le glyphosate peut avoir des effets biologiques sur les populations humaines.
Nous n'entrerons pas dans une étude détaillée de ce travail, effectué sur des groupes de 12 rattes.
Le résumé est un assemblage astucieux de résultats, de fanfaronnades et d'hypothèses, avec ce qu'il faut d'anxiogénèse (« pourrait potentiellement entraîner des résultats négatifs pour la santé »... une ceinture doublée de bretelles de précaution, on adore).
Les auteurs se font modestes et précautionneux en conclusion, et c'est tant mieux. Reste à savoir comment l'étude sera exploitées dans les sphères médiatiques et activistes. Si les prêcheurs d'apocalypse s'en tiennent au titre, ce sera bien mal barré...
S'agissant du fond, il suffit de relever que les rattes ont reçu 0 (témoins), 0,5, 50 ou 175 mg de glyphosate – soit pur, soit formulé – par kilogramme de poids corporel et par jour.
La dose de 0,5 mg/kg p.c./jour correspond à la dose journalière admissible dans l'Union Européenne.
Pour une petite personne de 60 kg, cela représente 30 milligrammes. Si l'on prend les chiffres tonitrués par les « pisseurs de glyphosate », certes très contestables – de l'ordre de 1 microgramme par litre d'urine – et en comptant large (deux litres d'urine par jour avec la même concentration que le pipi matinal, 20 % de la dose absorbée excrétés par les urines), ces 30 milligrammes représentent une dose 3.000 fois plus élevée que la dose absorbée dans la vie courante (toujours sous réserve des réserves que l'on peut formuler sur les chiffres des activistes).
La dose maximale de 175 mg/kg p.c. représente une dose de 10,5 grammes par jour pour cette personne... plus d'un litre de Roundup prêt à l'emploi…
Ajoutons que l'étude a été financée par the Sustainable Food Alliance (USA) et en partie par le Sheepdrove Trust (UK). Ce n'est pas anodin.