Langouët et son arrêté anti-pesticides : quand on veut grimper sur l'arbre de la renommée, mieux vaut avoir le cul propre
(Source)
Langouët (version bretonne)... Langouet (version française)... c'est ce village d'irréductibles dont le maire est devenu une célébrité en prenant un arrêté interdisant les traitements avec des pesticides* (*de synthèse) à moins de 150 mètres de toute parcelle cadastrale comprenant un bâtiment à usage d’habitation ou professionnel. Arrêté, rappelons-le, qui lui a été fourni clés en mains par une association anti-pesticides, Ragster, dont, incidemment, le siège social est à la Mairie de Bazemont, dans les Yvelines.
Langouët (version bretonne)... Langouet (version française)... c'est aussi, incidemment (bis), ce village qui héberge des militantes anti-pesticides arborant fièrement le coquelicot, celui de l'association Nous Voulons des Coquelicots à la boutonnière et, à la fenêtre, celui d'une marque bien connue d'insecticides à usage domestique appartenant à une méchante bienveillante multinationale de produits ménagers (S. C. Johnson & Son Inc.).
La Coordination Rurale a décidé de prendre le maire de Langouët, M. Daniel Cueff, à son propre jeu. Elle a fait analyser les rejets de la station d'épuration de la commune. Bilan : présence de substances toxiques dans des taux supérieurs aux seuils tolérés.
La Coordination Rurale écrit dans un communiqué de presse du 19 novembre 2019, « Langouët : l’arroseur arrosé ! » :
« Les résultats montrent une pollution minérale, essentiellement par le phosphore (dépasse 25 fois la norme européenne) et chimique avec la présence de quatre éléments. Cette station dégrade le milieu aquatique de la Flume, cours d’eau traversant la commune.
Rappelons que les prélèvements ont été effectués à l’exutoire de la station d’épuration en septembre en présence d’un huissier et ont été analysés par un laboratoire certifié. Les eaux traitées dans cette station sont des eaux usées provenant uniquement des habitations (urines, déjections humaines, des lessives, des détergents, restes de végétaux…). Ces pollutions ne proviennent donc pas de l’agriculture, dans la mesure où la station d’épuration de Langouët est entourée de prés et de bois, loin des parcelles agricoles. »
La Coordination Rurale ajoute :
« Il est indigne de voir un maire, censé être neutre et impartial, créer des tensions au lieu de les apaiser. Notre but, n’est pas de pointer du doigt les habitants de la commune de Langouët, nous voulons juste expliquer à ce maire qu’il se trompe de combat. D’ailleurs, nous regrettons qu’il ne soit pas venu nous rencontrer comme nous lui avions proposé. Ce n’est pas par médias interposés que nous avancerons mais par le dialogue. Les riverains et les agriculteurs ne sont évidemment pas des ennemis. »
La dernière phrase n'est vraie que pour autant que des énergumènes ne sèment pas la zizanie (et n'incitent pas à la chasse à l'homme, n'est-ce pas France Nature Environnement ?
Eaux et Rivières de Bretagne a été bien emm... embêté. Cette entité a donc publié un communiqué, « À quoi joue la coordination rurale ? » qui fait le grand écart.
D'un côté :
« Eau et Rivières de Bretagne salue l’action du syndicat qui joue son rôle citoyen en mettant en lumière une atteinte à l’environnement. »
De l'autre :
« Pour autant, dérouler une telle action dans le but de décrédibiliser le maire de Langouët n’est pas acceptable. Cela fait preuve d’un manque de volonté de dialogue et de négation des réalités et des volontés de changement de la société française.
En annonçant que pour les maires qui prennent des arrêtés anti-pesticides, le syndicat "viendrait analyser l’eau de leurs stations d’épuration", le président national de la Coordination rurale, Bernad Lannes, menace et fait pression sur des maires qui tentent d’agir pour protéger la santé de leurs concitoyens.
Eau et Rivières de Bretagne réitère son soutien au maire de Langouët et à tous les édiles qui prennent des arrêtés anti-pesticides dans leurs communes. »
C'est hallucinant ! Solidarité avec un pollueur (allégué) et reproche fait à la Coordination Rurale de menacer et faire pression sur des maires... qui font pression par des arrêtés illégaux !
(Source)
France 3 Régions Bretagne a rapporté la communication des résultats de l'analyse faite le 13 novembre 2019 à Langouët – l'occasion manquée de rencontrer le maire, d'où le reproche de refus de dialogue – dans « Le maire anti-pesticides de Langouët épinglé par la Coordination Rurale ».
M. le journaleux, c'est une arnaque que d'écrire :
« Le syndicat se dédouane de cette pollution en indiquant que cet excès de phosphore provient en majorité des déchets organiques humains (urines et fèces) et des détergents domestiques comme le lave-vaisselle ou la lessive. »
Il (ou les agriculteurs) n'a aucune responsabilité dans cette situation et ne saurait dès lors se dédouaner : les systèmes de traitement des eaux usées sont conçus pour n'y admettre que les eaux usées, pas les eaux de ruissellement.
M. Daniel Cueff a donc livré sa réponse à France 3 Bretagne. En introduction une sorte de blague de Radio Erevan* : une première déclaration :
« J'ai avec moi d'autres analyses, faites par le département et la DDTM et on se base sur celles-ci pour définir si notre station d'épuration fonctionne. »
Puis la reculade :
« Le souci que nous avons, c'est que depuis quelques mois, la lagune souffre d'entrées d'eaux parasites, qui viennent de la campagne sans trop savoir d'où exactement. Il est vrai que cela perturbe le bon fonctionnement de la station, en azote ammoniacal notamment. »
Faut-il croire à des arrivées d'eau dont on ignorerait la provenance ? Qui se seraient produites « depuis quelques mois », donc lors d'un été qui n'a pas été particulièrement pluvieux ?
Mais plus raide est la chute :
« Ce sont des méthodes de voyous, des méthodes de pression, de menaces. On fait pression sur les élus pour qu'ils se taisent, sur les élus qui disent : nous ne voulons pas de pesticides de synthèse. »
Comment faut-il appeler les méthodes des élus qui, se sachant pertinemment dans l'illégalité, prennent des arrêtés anti-pesticides ?
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* Les blagues de Radio Erevan que l'on trouvait dans des revues allemandes ont été un régal dans ma jeunesse. Elles sontgénéralement bâties en trois temps : une question naïve posée à Radio Erevan (qui n'a jamais existé). Une réponse « En principe oui (ou non) ». Une chute ouverte par « mais ».
Question : Est-il vrai qu'une Trabant [la voiture emblématique de la République Démocratique Allemande] peut aller jusqu'à 130 km/h ?
Réponse : En principe oui. Mais cela dépend de la hauteur de laquelle on la fait tomber.
Ou encore :
Question : Est-il vrai que les salaires seront augmentés prochainement de 50 % pour le dixième anniversaire du socialisme ?
Réponse : En principe oui. Mais seulement dans l'autre sens : de 10 % pour le cinquantième anniversaire du socialisme.