La guerre contre le glyphosate menace l'agriculture australienne et les enjeux sont gros
Andrew Weidemann*
La guerre mondiale contre le glyphosate est arrivée en Australie.
Nos médias ont suivi de près la couverture médiatique des affaires judiciaires récentes aux États-Unis, dans lesquelles des plaignants se sont vu allouer des indemnités de plusieurs millions de dollars dans le cadre de leurs poursuites contre le fabricant du produit phytopharmaceutique le plus largement utilisé au monde – et au mépris de ce que la science nous dit réellement sur la sécurité de cet outil agricole.
Les enjeux sont grands. Si ces attaques sur le glyphosate se poursuivent et si l'accès à cet outil efficace est supprimé, le coût de la nourriture augmentera et notre environnement en souffrira.
En tant qu'agriculteur utilisant le glyphosate depuis près de quatre décennies dans la région de Wimmera, dans l'État de Victoria, je connais ce produit de longue date. (J'ai écrit à ce sujet l'année dernière.)
Je suis convaincu que le glyphosate ne représente aucune menace pour la santé humaine – et je suis soutenu à cet égard par les organismes de réglementation du monde entier, de l’Autorité Australienne des Pesticides et des Médicaments Vétérinaires à l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments en passant par l’Agence Américaine de Protection de l’Environnement.
Les Australiens, les Européens et les Américains peuvent ne pas être d’accord sur le plus beau sport (le football australien), la meilleure bière (Crown Lager) et le meilleur hémisphère (le Sud). Sur la question du glyphosate, cependant, nos scientifiques parlent d’une seule voix : cet herbicide est sans danger.
En août, l’EPA des États-Unis est allée encore plus loin avec une annonce spéciale : « L’EPA n’approuvera plus les étiquettes de produits affirmant que le glyphosate est connu pour causer le cancer – une affirmation erronée qui ne satisfait pas aux exigences en matière d’étiquetage » de la loi américaine. (Voir aussi cet excellent éditorial sur le sujet.)
C’était un puissant rappel du fait que le consensus scientifique est extrêmement favorable à la sécurité du glyphosate. La seule objection majeure vient du Centre International de Recherche sur le Cancer, un organe consultatif qui a qualifié le glyphosate de « probablement » cancérogène.
Pourtant, c'est suspect. Le CIRC a mis en garde contre les effets cancérigènes de la caféine et du travail de nuit – des conclusions qu'aucune personne sérieuse n'a acceptées. Son analyse du glyphosate en particulier a fait l'objet de nombreuses critiques. Le magazine Forbes l'a même appelée « Glyphosate-gate », ce qui dénote l'habitude américaine d'ajouter « gate » à tous les scandales.
Je ne travaille pas dans les laboratoires avec les scientifiques et les régulateurs qui étudient le glyphosate, mais je travaille dans les champs avec cet herbicide. Si des agriculteurs comme moi perdaient l'accès à ce produit phytopharmaceutique, il se passerait deux choses.
Premièrement, nous aurions à traiter beaucoup plus contre les mauvaises herbes, lesquelles priveraient les cultures, moins abondantes, de ressources – et le prix de la nourriture augmenterait pour tous, y compris les personnes qui peinent à nourrir leur famille.
Deuxièmement, nous devrions très probablement revenir aux pratiques culturales du passé qui sont moins efficaces pour la gestion des mauvaises herbes, réduisent l'efficacité de nos efforts pour produire plus avec moins de pluie et augmentent finalement notre empreinte carbone : au final, nous consommerions plus de carburant (produisant davantage de gaz à effet de serre) et devrions travailler le sol (entraînant une érosion accrue).
Ce n'est pas tout. L'interdiction du glyphosate porterait atteinte aux cadres réglementaires fondés sur une analyse factuelle. En fait, les négateurs de la protection des cultures ressemblent beaucoup aux négateurs du climat : ils constituent une minorité bruyante qui rejette ce que la science nous dit vraiment sur le monde dans lequel nous vivons.
Il y a quelques semaines à peine, le magazine télévisé 60 Minutes Australia diffusait « The Spray », animé par Liam Bartlett. Il a affirmé qu'une « nouvelle tempête est en train d'émerger » à propos du glyphosate – et a déclaré que les poursuites judiciaires controversées des États-Unis migrent maintenant vers l'Australie.
L'émission a fétichisé une seule question : boiriez-vous du glyphosate ? Bartlett a laissé entendre que si les agriculteurs et d’autres personnes ne veulent pas en boire un verre, c'est qu'ils savent pertinemment, au fond, qu’il est nocif pour la santé – et que les régulateurs devraient intervenir avec une interdiction totale.
Quelle absurdité ! Nous utilisons tous beaucoup de produits sûrs que nous ne voudrions pas boire, du savon que nous utilisons pour nous laver les mains à l’essence que nous mettons dans les réservoirs de nos véhicules.
Personne ne devrait boire du glyphosate. Il n’est pas fait pour ça. Il est fait pour contrôler les mauvaises herbes, des jardins des banlieues aux fermes comme la mienne – et il est totalement sûr quand il est utilisé à bon escient.
L'agriculture, dans une société moderne, sera toujours soumise à un certain niveau de contrôle et, à tout moment, en Australie ou à l'étranger, les agriculteurs sont continuellement confrontés à l'éventualité d'une intervention politique ou sociale s'imposant dans les choix agricoles.
Je suis frustré quand j'entends dire que les gens n'acceptent pas la science sur l'utilisation de produits chimiques et ne comprennent pas le système de réglementation fort qui sous-tend le processus d'enregistrement des médicaments et des produits chimiques.
Dans ce cas, les négateurs de la protection des cultures nous vendent des illusions – pas de la science. S'ils réussissent, leurs mauvaises idées feront du mal à nous tous.
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* Andrew Weidemann, agriculteur, Australie
Andrew Weidemann pratique l'agriculture avec son épouse Julie, son frère Rodney et son épouse Andrea dans la région de Wimmera, État de Victoria, en Australie, où ils produisent du blé, de l'orge, du canola, des fèves, des pois chiches et des pois, des lentilles, de l'avoine et du foin de vesce, ainsi que des agneaux de qualité de race White Suffolk.