Les joies de la ruralité : Sésame, ne crotte pas !
« Le voisin est un animal nuisible assez proche de l'homme »
(Pierre Desproges)
Il y a eu récemment le coq Maurice, traîné en justice – enfin, par propriétaire interposé. Le tribunal de Rochefort (Charente-Maritime) a décidé le 5 septembre 2019 que le coq pourra continuer à chanter. Le propriétaire de Coco a eu moins de chance, mais apparemment le dossier n'est pas clos.
Il y a aussi une affaire plus ancienne de grenouilles dans une mare à Grignols, dans le Périgord. Il a été rapporté le 11 septembre 2019 que « Les grenouilles d’un étang obtiennent l’expulsion d’un couple de parisiens bruyants » Oups ! C'est le Gorafi ! Non, l'affaire est montée jusqu'à la Cour de Cassation, qui a maintenu la décision antérieure : M. Michel Pécheras doit reboucher la mare pour cause de trouble de voisinage avec astreinte de 300 euros par jour.
Problème, selon la France Agricole (réservé aux abonnés) :
« Il reste une faille : la zone d’eau abritant des espèces protégées, si le propriétaire respecte la décision du tribunal de Paris, il viole la loi. Annie et Michel Pécheras ont même reçu une lettre du ministère de la Transition écologique leur notifiant qu’ils n’ont pas le droit de reboucher cette mare. "On ne comprend pas trop car on nous empêche de la boucher et on nous oblige de la boucher." »
La lettre du Ministère a été publiée par Wikiagri. L'affaire s'est encore compliquée par une plainte d'une association de protection de la nature, la SEPANSO contre les voisins se disant importunés. Audience le 5 novembre prochain à Bordeaux.
Ce n'est pas la dernière histoire de grenouilles... Ni de nuisances alléguées par le bruit (y compris de cigales), les odeurs, les mouches, les vaches qui encombrent les routes dans leur quête de verts pâturages...
Et voici le charmant – c'est l'adjectif consacré, et en plus, ce n'est pas faux – village d'Orschwihr dans le vignoble haut-rhinois. 20 Minutes rapporte : « Haut-Rhin : Leur cheval laisse trop de crottin, leurs voisins les attaquent en justice ».
On résume : des viticulteurs s'étant mis en biodynamie en 1997 et voulant revenir aux méthodes du « bon vieux temps » ont acquis Sésame, un cheval comtois. Les voisins, qui ont transformé leur demeure en gîte, se plaignent de « l’odeur du crottin et de l’urine, la présence massive de mouches et le bruit des animaux » sur le terrain occupé par l’animal et allèguent une perte de fréquentation de leur gîte. Ils ont porté l’affaire en justice.
Le tribunal d’instance de Guebwiller a penché pour les viticulteurs en juillet 2018. Le tribunal a estimé que :
« la présence de chevaux en nombre très limité […] dans un environnement semi-rural et semi-urbain ne saurait être considérée comme anormale […]. Les désagréments occasionnés par cette présence n’excèdent pas les inconvénients habituels du voisinage. »
L'affaire est allée en appel. Audience apparemment sous peu. D'où, vraisemblablement, l'agitation médiatique.
Une pétition a été lancée sur Change.org. En faveur évidemment des viticulteurs et adressée à la Cour d'Appel de Colmar. Quelque 121.000 signatures (enfin, à vérifier) ont été recueillies. Il se trouve donc un lanceur de pétition et des milliers de signataires pour croire que la justice se rend sur la base d'une sorte d'applaudimètre sur les réseaux dits sociaux.
En définitive, pour clore le dossier des troubles du voisinage en milieu rural, il y a une solution simple : transférer les villes à la campagne…