« Comment le principe de précaution est devenu une fausse bonne idée » dans l'Opinion
Glané sur la toile 410
« Comment le principe de précaution est devenu une fausse bonne idée », dans l'Opinion, est une tribune libre de MM. Henri-Corto Stoeklé et Guillaume Vogt.
Le premier est bioéthicien, chercheur postdoctoral au laboratoire Neglected Human Genetics (NHG) et expert à l’Institut Sapiens ; le second, généticien, chargé de recherche à l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM), directeur du laboratoire NHG et également expert à l’Institut Sapiens.
Il est difficile pour un rationaliste de s'inscrire en faux, s'agissant du titre. En fait, le « principe de précaution », parfaitement raisonnable quand on le prend et l'applique au mot est immédiatement devenu une fausse bonne idée quand on l'a détourné de ses objectifs :
« L’idée est simple : si l’une de ces innovations présente le moindre risque [...], elle doit être interdite. »
Nous avons omis de la citation :
« pour l’existence des générations futures, et ce malgré de nombreux bénéfices identifiés »
La première partie restreint le propos de manière incorrecte, la deuxième n'est pas indispensable.
Les auteurs relèvent :
« Les Etats-Unis, ou la Chine, pour ne citer qu’eux, n’appliquent pas ce principe de précaution. Et le fait est que, bien que critiquables d’un point de vue social, ils le sont beaucoup moins au niveau économique. Pour quelle raison ? Grâce au choix d’une politique pragmatique, qui préfère autoriser les innovations et anticiper les risques, au fur et à mesure, plutôt que de les interdire par peur que ces risques se produisent malgré tout. »
Dommage : « bien que critiquables d’un point de vue social » pollue aussi le propos, par ailleurs fort juste. Le « point de vue social », c'est précisément l'acceptation de risques potentiels, qui, s'il sont réels, ne se dévoileront que par la mise en œuvre de l'innovation, parce que les avantages attendus sont supérieurs.
C'est ainsi que fonctionne l'innovation médicale et pharmaceutique. Aucune batterie de tests préalables à l'autorisation de mise sur le marché ne détectera les effets secondaires rares avec le niveau de certitude exigé pour se dépêtrer du principe de précaution.
C'est du reste aussi ainsi que fonctionne l'adepte des « médecines alternatives », des compléments alimentaires, des « aliments santé, de nombreuses charlataneries : la publicité sur leurs prétendues vertus l'emporte haut la main sur les mises en garde.
Les auteurs poursuivent sur cette ligne :
« Bien évidemment, il est compréhensible de vouloir préserver les générations futures. Mais il est plus que discutable de vouloir le faire par un sabotage. Car c’est ce qu’est le principe de précaution : un sabotage scientifique et technique. »
Le sabotage est aussi social : avec notre principe de précaution, Louis Pasteur et Marie Curie, évoqués dans l'article, n'aurait jamais pu, l'un, vacciner Joseph Meister et l'autre, mettre en œuvre la radiographie médicale sur les blessés de la Première Guerre Mondiale.
Les auteurs font un lien avec les crimes nazis pour la genèse du principe de précaution. C'est à notre sens fort contestable.
Mais on ne peut que partager leur conclusion :
« Quarante ans après, la recherche et l’industrie Française se meurent. Le principe de précaution n’est pas le seul responsable, mais son rôle est considérable. Outre le fait qu’il était détourné par certains pour lutter contre le libéralisme – plutôt que pour l’existence des générations futures –, il a surtout réussi à imposer l’idée que les innovations scientifiques et techniques étaient les ennemis absolus de l’homme et de la nature. C’est pourtant tout le contraire. »
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