« Une ferme urbaine de 14 000 m², la plus grande d’Europe, ouvrira à Paris en 2020 », article plutôt bon du Monde... Planète
Glané sur la toile 383
Une fois n'est pas coutume, nous avons apprécié l'anonyme « Une ferme urbaine de 14 000 m², la plus grande d’Europe, ouvrira à Paris en 2020 » du Monde Planète avec en chapô : « Installée sur le toit du Parc des expositions, dans le 15e arrondissement, elle devrait produire jusqu’à une tonne de fruits et légumes par jour en haute saison. »
C'est une resucée du « World's largest urban farm to open – on a Paris rooftop » du Guardian. Chercher des informations sur un projet français dans la presse britannique– certes amie et isopensante –, avouez que c'est un peu cocasse ; mais c'est le mois des vacances...
C'est aussi, en grande partie, un infomercial :
« "L’objectif est de faire de cette ferme un modèle de production durable reconnu mondialement, explique au quotidien britannique Pascal Hardy, fondateur d’Agripolis, l’entreprise agricole urbaine à l’origine du projet. Nous utiliserons des produits de qualité, cultivés au rythme des cycles de la nature, au cœur de Paris." »
The Guardian nous a fait le plaisir de mettre le site Web d'Agripolis en lien, ce qui permet d'en savoir un peu plus, de se faire embobiner un peu plus, et de se poser des questions.
La société utilise la technique de l'aéroponie mais, selon le Monde, « le tout [sera] cultivé avec des méthodes biologiques »... Ah bon... Selon le site Web,
« La production est locale et exclusivement réalisée avec des nutriments utilisables en agriculture biologique. Agripolis s'attaque donc au problème des productions agricoles poussées aux engrais chimiques, traitées aux pesticides, cueillies à moitié mûres, et qui parcourent de longues distances pour arriver dans l'assiette. »
Rêvez, braves bobos... Rêvez aussi à une corne d'abondance :
« "Nos produits frais seront utilisés pour nourrir les habitants du sud-ouest de la ville – soit directement, soit par le biais de jardins potagers, de magasins, d’hôtels et de cantines –, contribuant ainsi à réduire la distance parcourue pour se nourrir, explique M. Hardy. De plus, nous n’utiliserons pas de pesticides ou de produits chimiques, donc la ferme sera un havre pour la biodiversité." »
Ce que représente le « sud-ouest de la ville » – qui, de toute façon, continuera à être nourri avec des produits de base des vraies fermes – n'est pas précisé.
Mais il est dit que l'exploitation se fera avec une vingtaine de jardiniers...
« "L’idée est de favoriser la résilience environnementale et économique dans les villes de demain", explique au Guardian M. Hardy, qui s’attend à ce que la ferme commence à faire des profits dès sa première année.
Un pari ambitieux, sachant que l’agriculture urbaine est rarement rentable. "Très peu de projets sont rentables et 80 % meurent la première année, indiquait Grégoire Bleu, président de l’Association française d’agriculture urbaine professionnelle au Monde, en 2018. [...] »
Il y a d'autres bémols dans cet article comme une référence à un article scientifique néerlandais qui remet un certain nombre de choses en place.
En conclusion,
« Si l’autosuffisance semble n’être encore qu’un rêve, l’agriculture urbaine a de beaux jours devant elle. La Ville de Paris s’est engagée à végétaliser 100 hectares, dont un tiers dédié à l’agriculture urbaine, d’ici à 2020, à travers son projet "Parisculteurs". Elle a prévu d’y consacrer 8 millions d’euros durant cette mandature. »
Petits rappels dérangeants :
1. Cent hectares, c'est 1 % de la surface de Paris.
2. Huit millions d'euros, c'est 80.000 euros par hectare végétalisé ou, s'ils se rapportent à la seule « agriculture urbaine », quelque 240.000 euros par hectare.
La végétalisation dans les villes et la création de jardins potagers répondent à des objectifs divers et il serait malvenu de les dénigrer par principe. Parisculteurs est un programme que l'on peut apprécier.
Mais l'hyperbolique tapage médiatique est exaspérant. Voici de fortes – et stupides – paroles (apparemment) de Mme Anne Hidalgo :
« La Métropole sera durable et résiliente si le système agricole est modernisé, repensé et préservé. »
« Ainsi, avec “Parisculteurs” nous souhaitons promouvoir une agriculture tournée vers les consommateurs locaux et la transformation à courte distance des produits franciliens. Vitrine de la gastronomie et de la qualité des produits français, Paris dispose de nombreux atouts pour construire cette politique innovante et pour inventer de nouvelles réciprocités entre les urbains et les ruraux, de nouveaux liens avec les agriculteurs franciliens. »
Parmi les bémols de l'article du Monde (entièrement accessible), il y a deux déclarations qui nous ramènent sur terre. C'est à lire. Et figurez-vous qu'elles ont été ajoutées par le journaliste anonyme à la partie pompée dans le Guardian... Remarquable !