La lente déchéance de l'agroalimentaire français dans les Échos et l'Opinion
Glané sur la toile 370
Avec « Agroalimentaire : la France perd la main en Europe », les Échos se sont fait l'écho d'un nouveau cri d'alarme, après celui, par exemple, du Sénat (voir « Sur les marchés mondiaux, l'agriculture française a encore sa place sur un strapontin... plus pour longtemps si rien ne change »).
En chapô :
« Pour la première fois depuis la guerre, la balance commerciale agroalimentaire française avec les pays européens a été négative l'an dernier, selon l'Inra. Les exportations sont quasi-stables depuis 2011, tandis que les importations ont bondi de 24 %. La France paie son positionnement haut de gamme. »
En ouverture :
« "Il y a dix ans cela aurait été impensable", s'exclame Vincent Chatellier, économiste de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra). Pour la première fois depuis la guerre, le solde des échanges agroalimentaires de la France avec le reste de l'Union européenne est devenu négatif. La France a exporté pour 38,1 milliards d'euros en Europe (21,7 milliards hors UE) en 2018. Des chiffres stables (+2 % depuis 2011) vers l'UE face à des importations en provenance des voisins européens qui ont bondi de 24 % (à 38,4 milliards d'euros). »
Le chapô est un peu court pour l'explication :
« Pour Vincent Chatellier, la France "paie le choix du localisme à tous les étages et de son positionnement haut de gamme". Trois phénomènes se sont conjugués pour créer cette situation inédite. D'abord, "nos pays clients européens" ont tous développé leur production agricole, alors que leur population n'augmente plus. Plus grave, ils se sont trouvé des fournisseurs moins chers que la France, au rang desquels "la Pologne, qui nous a pris beaucoup de parts de marché", commente Vincent Chatellier. Un grand pays, déterminé à combler son retard et dont les ambitions agricoles s'envolent. »
On peut aussi ajouter les surtranspositions du droit européen ; la dysenterie législative au détriment de l'activité économique et au profit du paraître devant une opinion dit « publique » car largement manipulée et fantasmée (demandez aux « gilets jaunes » quelles sont leurs priorités...) ; les lourdeurs administratives ; une fiscalité dissuasive ; le refus de la modernisation et du développement (par exemple en matière d'installations de grande taille ou d'irrigation) ; les freins à la recherche-développement, voire une recherche dévoyée.
C'est en partie ce que rappelle Mme Emmanuelle Ducros dans « Agriculture française: un trésor national en danger », dans l'Opinion.
M. Sébastien Abis, directeur général du club Déméter, un think tank international et intersectoriel dédié aux enjeux alimentaires mondiaux et au rôle de la filière française, est largement cité :
« "Etre une puissance agricole, c’est aussi un enjeu de souveraineté crucial à un moment où le monde change et où il faudra bientôt, en 2050, nourrir 10 milliards d’humains, ajoute Sébastien Abis. Mais la souveraineté en matière d’alimentation, c’est un peu comme la souveraineté en matière de défense. On la croit acquise. Tant qu’on n’en parle pas, c’est qu’il n’y a pas de problème." Là, c’est la souveraineté primaire, celle qui touche chaque Français trois fois par jour dans l’intimité de son assiette, qui est menacée. »
La France a choisi l'agriculture de Martine à la ferme ou de Sylvain et Sylvette. Mieux, son ministre fait l'éloge d'une agriculture « biodynamique » qui s'en remet par exemple à la position des astres pour ses décisions techniques...
Il est un signe qui ne trompe pas : le Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation est avant-dernier dans l'ordre protocolaire, avant le Ministère des Sports. Mais au deuxième rang, derrière le Premier Ministre : la « transition écologique et solidaire » avec un ministre d'État, une ministre chargée des transports et deux secrétaires d'État... L'interdiction des assiettes en plastique a priorité sur ce qu'on met dedans...
« Quand on est riche, on a peur de mourir empoisonné par des pesticides… Quand on est pauvre, on a peur de mourir de faim. »