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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Hystérie anti-pesticides (de synthèse) : quelle vedette, cet eurodéputé Éric Andrieu

12 Février 2019 , Rédigé par Seppi Publié dans #Pesticides, #Politique, #Activisme, #critique de l'information

Hystérie anti-pesticides (de synthèse) : quelle vedette, cet eurodéputé Éric Andrieu

 

À propos aussi d'une étude sur la disparition des insectes à l'avenir médiatique assuré jusqu'à la prochaine annonce de l'apocalypse

 

 

Oui, il sera encore question dans ce billet de M. Éric Andrieu, présentement membre du Parlement Européen sous l'étiquette Parti Socialiste, et candidat non seulement à la candidature pour la prochaine législature, mais aussi pour la tête de liste socialiste en France...

 

Ah les grandes ambitions que voilà ! Il est vrai que M. Éric Andrieu déploie une activité, ou plutôt un activisme, débordante. Alors faisons incidemment un arrêt à la case politique politicienne.

 

 

Musardons : une formidable contribution à l'union de la gauche...

 

M. Olivier Faure, Premier Secrétaire du Parti Socialiste (hélas, de ce qu'il en reste), cherche à constituer une liste d'union de la gauche pour les prochaines européennes. Vu l'état de déliquescence de cette gauche, c'est une colossale gageure : en supposant que cela se fasse, il n'est même pas sûr de pouvoir placer un leader de chacun des groupuscules en position éligible...

 

M. Éric Andrieu contribue au défi de l'union avec ce merveilleux couple de gazouillis :

 

 

 

 

Musardons encore : la viande avariée polonaise au service des obsessions andriesques

 

Tout est bon pour se profiler et faire étalage de ses obsessions. La viande avariée polonaise – forcément un « scandale sanitaire » – a aussi inspiré M. Éric Andrieu :

 

 

 

 

« Il nous faut d’urgence un FBI européen aux questions sanitaires » (on peut lire sa prose sur son site)... et bien plus :

 

« […] la multiplication de ces crises sanitaires doit nous inviter à repenser notre modèle agricole. Toutes les réformes de la PAC engagées depuis les années 90 ont laissé le libre cours au seul marché productiviste et dangereux pour notre sécurité alimentaire. À juste titre, les consommateurs veulent savoir ce qu’il y a dans leurs assiettes et dans leur verre et appellent à plus de transparence et à une meilleure traçabilité. Nous devons favoriser une « reterritorialisation » de notre agriculture organisée autour de circuits courts et d’exploitations à taille humaine. »

 

Le pôvre n'a pas pu placer le mot « pesticide » dans cette envolée digne de « la terre qui ne ment pas ». Mais rassurez-vous, il a pu évoquer « le renouvellement controversé du glyphosate » en l'érigeant en scandale sanitaire aux côtés des « œufs contaminés au Friponil [(sic) et de] l’affaire du miel frelaté » (à part l'existence de fraudes rampantes, nous n'avons pas souvenir d'un « scandale sanitaire » récent).

 

 

Entrons dans le vif du sujet : le déclin des insectes

 

Cela nous amène au vif du sujet... encore un gazouillis :

 

 

 

 

« “Les insectes sont en voie d'extinction, menaçant un effondrement des écosystèmes.

L'agriculture intensive est le principal facteur de cette baisse, en particulier la forte utilisation des #pesticides. L'urbanisation et le changement climatique jouent également un rôle important” »

 

 

Un petit tour par le Guardian (incidemment, le Monde s'en est largement inspiré) nous met sur la piste de « Worldwide decline of the entomofauna: A review of its drivers » (déclin mondial de l'entomofaune : une revue de ses moteurs) de Francisco Sánchez-Bayo et Kris A.G. Wyckhuys. En voici le résumé (nous découpons) :

 

« Points forts

 

  • Plus de 40% des espèces d'insectes sont menacées d'extinction.

     

  • Les lépidoptères, les hyménoptères et les bousiers (coléoptères) sont les taxons les plus touchés.

     

  • Quatre taxons aquatiques sont en péril et ont déjà perdu une grande partie des espèces.

     

  • La perte d'habitat due à la conversion en agriculture intensive est le principal facteur de déclin.

     

  • Les polluants agrochimiques, les espèces envahissantes et le changement climatique sont des causes supplémentaires.

 

Résumé

 

La biodiversité des insectes est menacée dans le monde entier. Nous présentons ici une revue complète de 73 rapports historiques sur le déclin des insectes dans le monde et évaluons systématiquement les facteurs sous-jacents. Nos travaux révèlent des taux de déclin spectaculaires pouvant entraîner l'extinction de 40 % des espèces d'insectes dans le monde au cours des prochaines décennies.

 

Dans les écosystèmes terrestres, les lépidoptères, les hyménoptères et les bousiers (coléoptères) semblent être les taxons les plus touchés, alors que quatre taxons aquatiques majeurs (Odonata, Plecoptera, Trichoptera et Ephemeroptera) ont déjà perdu une proportion considérable d’espèces.

 

Les groupes d'insectes touchés comprennent non seulement les spécialistes occupant des niches écologiques particulières, mais également de nombreuses espèces communes et généralistes. Parallèlement, l’abondance d’un petit nombre d’espèces augmente ; ce sont toutes des espèces adaptables et généralistes qui occupent les niches laissées vacantes par celles en déclin.

 

Parmi les insectes aquatiques, les généralistes du point de vue de l’habitat et de l’alimentation, et les espèces tolérantes aux polluants remplacent les importantes pertes de biodiversité subies dans les eaux en milieu agricole et urbain.

 

Les principaux facteurs de déclin des espèces semblent être par ordre d'importance : i) la perte d'habitat et la conversion en agriculture intensive et en urbanisation ; ii) la pollution, principalement par les pesticides de synthèse et les engrais ; iii) les facteurs biologiques, y compris les agents pathogènes et les espèces introduites ; et iv) le changement climatique.

 

Ce dernier facteur est particulièrement important dans les régions tropicales, mais ne concerne qu'une minorité d’espèces dans les climats plus froids et les montagnes des zones tempérées.

 

Il est urgent de repenser les pratiques agricoles actuelles, en particulier une réduction importante de l'utilisation des pesticides et son remplacement par des pratiques plus durables et écologiques, pour ralentir ou inverser les tendances actuelles, permettre la reconstitution des populations d'insectes en déclin et préserver les services écosystémiques essentiels qu'ils fournissent. En outre, des technologies de dépollution efficaces devraient être appliquées aux eaux polluées, en milieu agricole et urbain. »

 

 

Le Monde s'est largement inspiré du Guardian, mais n'a pu s'empêcher de mettre en titre une immonde annonce de l'apocalypse – au conditionnel quand même – à l'horizon du siècle prochain…

 

 

Nous avons déjà rencontré M. Francisco Sánchez-Bayo dans nos pérégrinations, notamment dans une série d'articles du Groupe de Travail sur les Insecticides Systémiques (voir par exemple ici). C'est un scientifique militant (ou un militant scientifique).

 

Il est donc assez remarquable qu'il mette en cause principale du déclin de l'entomofaune la « perte d'habitat » – c'est certes qualifié par une référence à l'« agriculture intensive » et, dans les « points forts », cela passe sous silence l'urbanisation, etc. – et qu'il mette les « polluants agrochimiques » dans la catégorie des « causes supplémentaires ».

 

Mais pour M. Éric Andrieu, la cause de la cause principale devient la cause principale... Reprenons : la cause (la conversion à l'agriculture, qui n'est taxée d'intensive que du fait que les auteurs sont affligés d'un biais de parti pris) de la cause principale (la perte d'habitat) est devenue la perte d'habitat. Et, bien sûr, dans cette « agriculture intensive », le coupable principal, ce sont les pesticides...

 

Décidément, les obsessions...

 

On fera peut-être observer que ce renversement des choses vient du Guardian. Un Guardian qui cite M. Francisco Sánchez-Bayo :

 

« Le taux de perte annuel de 2,5 % des 25-30 dernières années est "choquant », a dit Sánchez-Bayo au Guardian : "Il est très rapide. Dans 10 ans, nous aurons un quart de moins, dans 50 ans nous n'aurons plus que la moitié et dans 100 ans plus rien." »

 

Quel scientifique qui se respecte peut-il annoncer des chiffres à l'horizon du demi-siècle et même du siècle ? Ce n'est pas sérieux ! Précisons cependant qu'écrire cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de problème de déclin.

 

Nous sommes en droit d'attendre d'un politicien qu'il vérifie ses sources avant de gazouiller et de diffuser une « information » au mieux incorrecte.

 

Et nous sommes en droit d'attendre des instances politiques dirigeantes – du Parti Socialiste en l'occurrence – qu'elles envoient des gens rationnels à Bruxelles et Strasbourg pour nous représenter et pour promouvoir nos intérêts.

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