Haine contre Monsanto : voici maintenant Hulot
Déblatérer... faire parler de soi en bien... de Monsanto en mal... se rétracter…
(Source)
Le JDD du dimanche 3 février 2019 a consacré une page et demie à... à quoi donc ?
Disons le procès de M. Paul François contre Monsanto (maintenant Bayer), dont le quatrième volet – après un passage par la Cour de Cassation – s'ouvrira le mercredi 6 février 2019 devant la Cour d'Appel de Lyon. Mais, comme l'écrit le journal sous un titre rageur – « On se moque des victimes des pesticides » – le sujet est plus vaste et plus polémique,
« Le céréalier estime avoir été intoxiqué en 2004 en inhalant accidentellement du Lasso, un herbicide retiré du marché en 2007. »
Ajoutons encore, pour poser le décor, ce propos de l'épouse de M. Paul François, maintenant décédée :
« Très vite, ce ne sera plus ton combat. »
C'est bien le cas. Et M. Paul François contribue dans le JDD, par ses propos, à l'instrumentalisation de son cas au service d'une lutte contre les pesticides (de synthèse...) qui est peut-être honnête de sa part, mais sans nul doute aussi instrumentalisée pour servir des objectifs socio-politiques et des intérêts économiques particuliers.
Cet article a un compagnon, des propos de M. Nicolas Hulot sous le titre : « Le silence et l'indifférence valent presque complicité ». Des propos hallucinants :
« Cet agriculteur de Charente fait partie des centaines de personnes en lutte, sur le plan judiciaire, contre la pire firme au monde. »
Tous les principaux poncifs de la haine contre Monsanto, « la pire firme au monde », y passent, à commencer par :
« Au-delà des pesticides, cette entreprise cherche, avec ses OGM, à mettre les ressources alimentaires en coupe réglée. »
Et dire que ce type a été un conseiller de l'ombre de plusieurs présidents de la République et même Ministre de la Transition Écologique et (accessoirement) Solidaire !
Admirons au passage ce grand moment d'hystérie avant de passer au gros scandale :
« Je ressens une profonde colère face à l'indulgence dont bénéficie Monsanto : toutes les portes lui sont ouvertes dans la plupart des institutions. Ce lobbying musclé est intense. Lors d'une visite ministérielle au Saint-Siège, à Rome - j'étais venu parler du climat -, le cardinal présidant l'Académie des sciences m'a gratifié d'un plaidoyer pro-Monsanto. »
La vérité est plus prosaïque : l'Académie Pontificale des Sciences a mené des travaux sur la question, notamment, des « plantes transgéniques pour la sécurité alimentaire dans le contexte du développement » et s'est clairement prononcée en faveur du développement technologique au service du développement humain – voir notamment ici et plus particulièrement ici (le Pape est plus réservé).
Il(s) voi(en)t Monsanto et ses maléfices partout ! Voici la suite :
« Et, quelques mois après que j'ai été nommé ministre, une personne de ma connaissance, haut placée dans une entreprise travaillant dans le domaine de l'environnement et qui pourra confirmer ce que je révèle ici, est venue me voir avec ce message menaçant : Monsanto avait demandé à une officine belge de s'occuper de ma réputation*. »
Patience pour ce curieux astérisque...
Résumons : c'est en gros « l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours » ! On ne sait pas trop ce que signifie « s'occuper de ma réputation », mais ce ne pouvait être rien de bon puisque le message était « menaçant » ! Et puis, il s'agissait d'une « officine »... Et puis, pendant tout ce temps où une « officine » s'activait à « s'occuper de [s]a réputation », M. Nicolas Hulot s'est tu... pour faire une révélation juste au moment où il reprend du service dans sa fondation.
Il n'y a rien de plus dans la version papier – à part que Mme Marie-Monique Robin « a, elle aussi, fait les frais de ces méthodes ». La pôvre ! Profitons-en pour vous remettre sur la piste du très divertissant « L'espion de Monsanto vous salue bien, Mme Robin ! »
Ce scoop se devait de monter sur le site Internet du journal. C'est le début de l'escalade dans la médiocrité. Le JDD titre en effet : « EXCLUSIF. Hulot : "Monsanto a demandé à une officine belge de s'occuper de ma réputation" » et met surtout en chapô :
« Nicolas Hulot révèle au JDD avoir été sous la menace de l'entreprise Monsanto (désormais propriété du groupe Bayer) quand il est devenu ministre de l'Ecologie. »
« ...sous la menace »... voyez-vous ça... Quant au texte – qui reprend des éléments de l'article de la version papier, notamment le morceau de bravoure cité plus haut –, il se fait tout de même « journalistique » avec un conditionnel :
« Il révèle ainsi au JDD qu'il aurait été la cible du groupe agrochimique à partir du moment où il est devenu ministre de l'Ecologie d'Emmanuel Macron. »
C'est le moment de revenir sur l'astérisque de la version papier. En bas de page et en petits caractères :
« * Sollicité par le JDD, Bayer Monsanto dément "formellement ces allégations très graves et diffamatoires". »
Voilà une manière bien curieuse de présenter l'information. Ce « journalisme » qui reprend les méthodes des rédacteurs de contrats opaques, par exemple en matière d'assurance, ne sort pas grandi, une fois de plus.
Le caveat est repris sur Internet, en fin de texte. Cependant, ce n'est guère mieux, car le lecteur aura été assommé par le titre et le chapô.
Un tel scoop se devait d'être repris par le journalisme panurgique. La recherche commence à être fructueuse sur Internet.
Le Monde remporte une médaille dans la catégorie des suiveurs. Mais pas la médaille d'honneur du journalisme... Le titre :
[Mise à jour du 5 février 2019 à 16h30 : le titre a été (subrepticement) modifié et est devenu « Nicolas Hulot critique Monsanto, qu’il considère comme "la pire firme du monde" ». La modification n'a pas été référencée en sous-titre. L'URL est resté inchangée. Bravo !]
Notez que c'est au présent, et que donc les « agissements » pour « ternir sa réputation » continuent. D'ailleurs, on le voit tous les jours : le dénigrement de sa personne est incessant, n'est-il pas ? Comme il le fut du temps où il était ministre, ne fut-il pas ?
En chapô :
« L’ancien ministre de l’écologie a révélé au "Journal du dimanche" que la multinationale s’était livrée à un lobbying agressif à son encontre quelques mois après sa nomination. »
Léger mieux, le démenti de Bayer vient immédiatement après la mise en cause. Mais cela reste du journalisme de caniveau.
Quand on se trouve en présence d'une affirmation intrinsèquement peu crédible et non étayée, d'une part, et d'un démenti catégorique et péremptoire, d'autre part, on présente au minimum une information équilibrée, sans sensationnalisme unilatéral. C'est ce que fait le Parisien, qui a sollicité séparément le point de vue de Bayer, avec « Nicolas Hulot accuse Monsanto d’avoir cherché à saper sa réputation ». Au mieux – mais ne soyons pas trop exigeant au vu du marasme déontologique actuel de la profession en général... – on procède à une enquête et on demande à l'accusateur de montrer ses biscuits.
Mais des biscuits, il n'en a pas...
La rétractation – par rapport à la surenchère activiste du Monde – est déjà tombée :
« Je n’ai jamais prétendu être victime de Monsanto. J’ai simplement fait état de propos qui m’avaient été rapportés. Ne nous trompons pas, la victime de Monsanto est Paul François. https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/02/03/nicolas-hulot-se-dit-victime-des-agissements-d-une-officine-belge-chargee-par-monsanto-de-ternir-sa-reputation_5418558_3244.html … via @lemondefr »
C'est du style de Bill Clinton : « I did not have sexual relations with that woman, Miss Lewinsky. »
Mais cela reste toujours une très grave accusation contre Monsanto. Décidément... l'aveuglement aveugle... Des agriculteurs gazouilleurs se sont chargés d'apporter des éléments de réponse.
Géraldine, don't give up the fight !