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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Évolution de la superficie des terres agricoles aux États-Unis d'Amérique

27 Janvier 2019 , Rédigé par Seppi Publié dans #Divers

Évolution de la superficie des terres agricoles aux États-Unis d'Amérique

 

Jason Lusk*

 

 

J'entends beaucoup parler des répercussions de la politique agricole fédérale sur notre système alimentaire. Il est parfois suggéré que la politique agricole est à blâmer pour la « nourriture bon marché » et donc l’obésité (voir cette belle réponse de Tamar Haspel sur Twitter) ou que bon nombre de nos prétendus problèmes agricoles et alimentaires d’aujourd’hui remontent à Earl Butz, qui était Secrétaire à l'Agriculture au début des années 1970 et avait encouragé les producteurs à planter « de limite de champ à limite de champ ».

 

Une façon d’évaluer ce type d’allégation consiste à déterminer dans quelle mesure la superficie cultivée aux États-Unis a changé au fil du temps. Voici les données fournies par l'USDA, le Service National de Statistiques Agricoles, sur la superficie des terres consacrées à neuf principales cultures de base (note : la superficie en légumes, qui ne représente qu'environ 1 % de la totalité de la superficie, n'est pas incluse ; ni la superficie en fruits ou en noix, qui représente également une très petite part du total).

 

La figure ci-dessous montre la superficie cumulée des États-Unis consacrée à neuf grandes cultures de base sur une période de 93 ans allant de 1926 à 2018. Pendant toute cette période, une moyenne de 246 millions d’acres (99,55 millions d'hectares) ont été affectés à ces neuf cultures chaque année. Sept des dix années de plantation les plus importantes sont antérieures à 1937, les trois autres sont 1980, 1981 et 1982.

 

Le coefficient de variation (l'écart type divisé par la moyenne) n'est que d'environ 7,5 %, ce qui implique une variation relativement faible dans le temps (un chiffre inférieur à 100 % serait considéré comme une variation faible). Depuis 1990, les changements d’une année à l’autre ont été relativement faibles. Au cours des 28 dernières années, environ 225,7 millions d’acres (91,34 millions d'hectares) sont emblavés chaque année pour ces neuf cultures de base, avec un coefficient de variation de seulement 1,8 %. Cette variation plus faible des dernières années est intéressante parce que la politique agricole est beaucoup plus axée sur le marché depuis 1996 et que c’est précisément la période au cours de laquelle la superficie plantée a été plus stable.

 

Le total des terres consacrées à l’agriculture (ou superficie cultivée) est aujourd’hui inférieur d’environ 12 % aux pics des années 1930 et du début des années 1980. C’est incroyable à bien des égards, étant donné que la population américaine est maintenant 130 % plus élevée qu’elle ne l’était dans les années 1930. Autrement dit, deux fois plus de personnes sont maintenant nourries avec moins d'acres cultivées.

 

 

Ligne du bas : maïs, soja, blé, cotonnier, avoine, orge, canola (colza), riz, tabac.

 

 

En allant plus loin que la superficie totale, il est instructif d'examiner la composition de la superficie (voir les deux figures suivantes). Ici, nous pouvons voir quelques changements importants dans les cultures plantées aux États-Unis au fil du temps. Par exemple, en 1926, il n'y avait que 1,9 million d'acres (769.000 hectares) de soja, mais en 2018, pour la première année de son histoire, la superficie cultivée en soja (89 millions d'acres – 36 millions d'hectares) a été supérieure à celle de toute autre culture. Auparavant, le maïs était roi chaque année, à l'exception de 1981-1983, lorsque plus d'acres étaient consacrés au blé qu'au maïs.

 

Un autre grand changement a été la réduction du nombre d'acres consacrés à l'avoine. Avant les années 1960, plus de 40 millions d’acres (16,2 millions d'hectares) d’avoine étaient semés chaque année. En 2018, seuls 2,7 millions d'acres (1,1 million d'hectare) étaient consacrés à l'avoine. Pourquoi ce changement ? Une des principales raisons est qu’il n’y a plus autant de mulets et de chevaux à nourrir. Le cotonnier a également connu une réduction abrupte de sa superficie de la fin des années 20 au début des années 60, se stabilisant un peu par la suite.

 

 

 

 

La figure suivante montre les mêmes données, mais avec la superficie dédiée à chaque culture exprimée en pourcentage de la superficie totale au cours d'une année donnée.

 

Pris ensemble, ces trois graphiques suggèrent que le grand changement n’a pas concerné la surface totale des terres agricoles utilisées, mais plutôt les surfaces dédiées aux différentes cultures. De plus, l'évolution du mix de cultures (montée du soja et baisse de l'avoine) n'avait probablement rien à voir avec la politique agricole.

 

 

 

 

Compte tenu de toutes les préoccupations exprimées au sujet des monocultures et de la perte supposée de diversité agricole/des cultures dans le temps, il est peut-être surprenant de constater qu’il existe aujourd’hui plus de diversité dans les superficies plantées (en termes de mix de cultures) que par le passé. Pour bien comprendre, j’ai calculé le coefficient de variation de la superficie consacrée à chacune des neuf cultures chaque année. Cela donne une idée de la variation des cultures dans une année donnée. Voici les résultats tracés dans le temps.

 

 

 

 

Le coefficient de variation varie d'environ 87 % à 138 %. La comparaison avec le coefficient de variation de la superficie totale utilisée (qui est de 7,5 %) implique qu'il y a plus de variations dans le temps dans le choix des cultures pour lesquelles des superficies sont consacrées une année donnée.

 

La figure ci-dessus montre que la variation du mix de cultures (au moins pour ces neuf cultures) a augmenté depuis les années 1960 et qu'elle est plus élevée au cours de la dernière décennie que jamais auparavant au cours des 80 dernières années. En ce sens, les superficies cultivées aux États-Unis sont plus diversifiées aujourd'hui par rapport à ce qui a été historiquement le cas.

 

________________

 

* Jayson Lusk est un économiste de l'agriculture et de l'alimentation. Il est actuellement professeur distingué et chef du Département de l'Économie Agricole de l'Université de Purdue.

 

Source : http://jaysonlusk.com/blog/2018/12/14/trends-in-farm-land-acreage

 

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