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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Changement climatique : les insectes vont boulotter notre blé !

17 Septembre 2018 , Rédigé par Seppi Publié dans #Article scientifique, #critique de l'information

Changement climatique : les insectes vont boulotter notre blé !

 

Mais nous ne les laisserons pas faire... sauf si l'« écologisme » imbécile l'emporte

 

 

Encore un article « scientifique » alarmiste...

 

Science – oups ! La prestigieuse revue Science – a publié – derrière un péage comme il se doit pour une revue prestigieuse – « Insect metabolic and population growth rates predict increasing crop losses in a warming climate » (les taux de croissance métabolique et de croissance des populations d'insectes prédisent une augmentation des pertes de récolte avec le réchauffement climatique) de Curtis A. Deutsch, Joshua J. Tewksbury, Michelle Tigchelaar, David S. Battisti, Scott Merrill, Raymond B. Huey et Rosamond L. Naylor.

 

 

Le résumé et les documents d'accompagnement

 

En voici le résumé (avertissement : le mot « yield » est un cauchemar pour traducteurs ; il signifie selon le cas « rendement » (par exemple des quintaux par hectare) ou des « récoltes » (sans référence à la surface)).

 

« Les insectes nuisibles réduisent sensiblement les rendements de trois céréales de base – riz, maïs et blé –, mais les modèles évaluant les effets du réchauffement climatique sur l'agriculture tiennent rarement compte des pertes de récoltes dues aux insectes. Nous utilisons des relations bien établies entre la température et la croissance des populations et les taux métaboliques des insectes pour estimer comment et où le réchauffement climatique augmentera les pertes de riz, de maïs et de blé dues aux insectes. Les pertes de récolte/rendement mondiales [global yield losses] de ces céréales devraient augmenter de 10 à 25 % par degré de réchauffement moyen de la surface de la Terre. Les pertes de récolte [crop losses] seront les plus graves dans les zones où le réchauffement augmente à la fois la croissance de la population et les taux métaboliques des insectes. Ces conditions sont centrées principalement dans les régions tempérées, où la plupart des grains sont produits. »

 

Il y a une introduction à cette page :

 

« Réchauffement, cultures et insectes nuisibles

 

Les réponses des cultures au réchauffement climatique suggèrent que les rendements diminueront à mesure que les températures de la saison de croissance augmentent. Deutsch et al. montrent que cet effet peut être exacerbé par les insectes nuisibles (voir la perspective de Riegler). Les insectes consomment déjà 5 à 20 % des principales cultures céréalières. Les modèles des auteurs montrent que pour les trois principales cultures céréalières – blé, riz et maïs –, le rendement/récolte perdu à cause des insectes [yield lost to insects] augmentera de 10 à 25 % par degré Celsius de réchauffement, l'effet le plus fort se produisant dans la zone tempérée. Ces résultats fournissent une estimation des autres impacts potentiels du climat sur l'approvisionnement alimentaire mondial et une référence pour les futures études spécifiques au niveau des régions et des champs sur les interactions plantes-ravageurs-climat. »

 

Et voici le résumé de la « perspective de Riegler » – « Insect threats to food security » (menaces des insectes sur la sécurité alimentaire)

 

« À l'échelle mondiale, une personne sur neuf souffre de faim chronique et la sous-alimentation augmente (1). Les températures moyennes à la surface du globe augmentent également et devraient augmenter de 2 à 5°C au cours du siècle, avec des effets négatifs sur la production agricole. Même aujourd'hui, malgré d'importants efforts de protection des plantes, environ un tiers des cultures est perdu à cause des insectes nuisibles, des agents pathogènes et des mauvaises herbes. Comment le réchauffement climatique affectera-t-il ces pertes de récolte [crop mosses] à l'échelle mondiale ? À la page 916 de ce numéro, Deutsch et al. (2) évaluent l'impact de la hausse des températures de surface moyennes sur les pertes de récoltes dues aux insectes pour le blé, le maïs et le riz, qui constituent des aliments de base pour des milliards de personnes. Les résultats montrent que les insectes provoqueront une perte de grains significative dans de nombreuses régions d'un monde plus chaud. »

 

 

L'« écologisme » millénariste à l'œuvre

 

À l'évidence, les Philippulus du changement climatique et de la catastrophe agricole et alimentaire s'en sont donnés à cœur joie.

 

L'impression générale qui se dégage de ces résumés et commentaires est que les auteurs se sont livrés à un exercice de masturbation intellectuelle à coup de méga-fichiers de données, d'hypothèses hasardeuses et de jongleries statistiques. Contribution des sciences agronomiques ? A priori nulle.

 

Dans « Le changement climatique accélère les pertes de récoltes dues aux insectes », Mme Joan Conrow, de l'Alliance pour la Science Cornell, a largement cité un des auteurs, M. Joshua J. Tewksbury. Celui-ci a une formation d'écologiste, et de biologiste de l'évolution et de la conservation ; son affiliation passée avec le Fonds Mondial pour la Nature (WWF) et présente avec Future Earth semble se refléter dans ses prises de positions dont nous estimons qu'elles sont d'une rare arrogance et, bien sûr, déconnexion de la réalité. Méditez :

 

« La lutte biologique contre les insectes nuisibles réussit lorsque nous connaissons de manière exceptionnelle l’histoire naturelle de nos plantes cultivées et de leurs espèces apparentées – là où elles croissaient, quels insectes mangeaient les cultures dans leur aire d'origine, ce qui a tué ces insectes. Il y a beaucoup de travail à faire pour développer ces connaissances [...] »

 

« Origine des plantes cultivées » d'Alphonse de Candolle ne date que de 1883...

 

 

Un flot de chiffres

 

Mais revenons aux chiffres.

 

Selon le résumé de l'étude,

 

« Les pertes de récolte/rendement mondiales [global yield losses] de ces céréales devraient augmenter de 10 à 25 % par degré de réchauffement moyen de la surface de la Terre. »

 

Comme ils ont tablé sur 2°C, cela fait de 20 à 50 %... une extraordinaire précision.

 

Mais cette affirmation est aussi très vague. Qu'est-ce qui est perdu ? L'introduction de Science vient à notre secours :

 

« Les insectes consomment déjà 5 à 20 % des principales cultures céréalières. Les modèles des auteurs montrent que pour les trois principales cultures céréalières – blé, riz et maïs –, le rendement/récolte perdu à cause des insectes [yield lost to insects] augmentera de 10 à 25 % par degré Celsius de réchauffement [...] »

 

Les pourcentages du résumé ne se rapportent pas au rendement ou à la récolte, mais à la partie perdue ! Prenons les cas extrêmes, pour 1°C : les pertes, rapportées à la récolte seraient augmentées de 0,5 % de la récolte totale, ou de 5 %.

 

Est-ce grave, docteur ? En admettant que la prédiction la plus calamiteuse se matérialise, il faudrait compenser, notamment par la génétique et l'amélioration des pratiques culturales, une perte qui, pour 2°C, atteindrait dans le pire cas 10 % dans quelque 30 ans. Un colossal effort (ironie) !

 

 

Un communiqué alarmiste... sans mise en perspective

 

Comme il se doit, Future Earth – M. Tewsbury est le directeur du centre du Colorado – a publié un communiqué, « Crop losses due to insects could nearly double in Europe’s bread basket due to climate » (les pertes de récoltes dues aux insectes pourraient presque doubler dans la corbeille à pain de l'Europe à cause du climat). Pourquoi ce titre, qui porte sur un aspect spécifique, le plus « sexy » ? Sensationalarmisme...

 

Le communiqué précise (enfin...) :

 

« ...l'impact des bioagresseurs [pest impacts] sur le blé européen pourrait créer un total annuel de pertes de récoltes dues aux bioagresseurs [pest-induced yield losses] qui pourrait dépasser 16 millions de tonnes. »

 

C'est en gros 10 % de la récolte annuelle de l'Union Européenne à 28. Mais que signifie précisément cette phrase ? « Bioagresseurs » n'est pas limité aux insectes, objets de l'article…

 

 

Prévision des volumes de blé produites dans l'Union Européenne (UE 28) de 2015 à 2026 (x 1000 tonnes) (Source)

 

 

Ce qu'il y a de remarquable, c'est que ces chiffres n'ont pas été mis en perspective. Le site Statista prévoit une légère augmentation de la production européenne ; il n'a probablement pas tenu compte des changements climatiques (du reste bien plus compliqués que les éternelles références à une températire moyenne). Cette augmentation serait-elle compromise par l'appétit croissant des insectes – dont on nous rabâche par ailleurs qu'ils sont en voie de disparition ?

 

 

Le Monde Planète, évidemment...

 

Le Monde Planète s'est évidemment emparé du sujet avec gourmandise... encore une mauvaise nouvelle pour la planète (et accessoirement l'humanité) qui est une bonne nouvelle pour la ligne militante de la rubrique. Selon « Le réchauffement favorise le ravage des récoltes par les insectes nuisibles »,

 

« Les chercheurs ont examiné comment les insectes nuisibles réagiraient dans le cadre de divers scénarios climatiques. Selon eux, les pertes de cultures pourraient augmenter de 10 % à 25 % par degré de réchauffement. Une hausse de la température moyenne mondiale de deux degrés entraînerait des pertes de 31 % pour le maïs, 19 % pour le riz et 46 % pour le blé. Dans ces conditions, les pertes annuelles totales de cultures atteindraient respectivement 62, 92 et 59 millions de tonnes. Cette projection constitue "le scénario le moins alarmiste, précise Curtis Deutsch, chercheur à l’université de Washington et auteur principal de l’étude. Les températures pourraient augmenter de 2 à 5 °C d’ici à la fin du siècle". »

 

Curieux ! Dans le cas du blé, ces chiffres supposent une production mondiale, avant pertes dues aux insectes, de quelque 128 millions de tonnes. Nous en sommes à quelque 730 millions selon FAOSTAT.

 

 

Le Guardian semble avoir mieux compris l'article.

 

 

L'ingéniosité humaine... contre les blocages gouvernementaux

 

Quoi qu'il en soit, cette merveilleuse étude ne semble pas tenir compte de l'ingéniosité humaine, que ce soit celle des chercheurs et des innovateurs technologiques ou des agriculteurs (qui sont aussi des innovateurs...). Selon le Monde,

 

« Les agriculteurs et les gouvernements pourraient essayer de réduire l’impact de la prolifération des insectes en utilisant la rotation des cultures ou en essayant de produire des céréales résistantes aux nuisibles, estiment les auteurs de l’étude. Mais ces modifications risquent de prendre du temps et ne sont pas accessibles à tous les pays. »

 

Les agriculteurs feront certainement mieux qu'« essayer ».

 

Quant aux gouvernements, s'agissant de l'Union Européenne, sauf sursaut salvateur, ils feront aussi mieux qu'« essayer »... mais de contrecarrer la marche du progrès génétique et agrochimique, y compris du progrès qui a précisément pour but de répondre aux défis issus du changement climatique annoncé.

 

 

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D
D'ailleurs, le "changement climatique" et sa "lutte" implique de facto une guerre contre les ruminants, coupables, aux yeux de certains d'être responsables de ces "changements" du fait des rejets de méthane. D'où la virulence des vegans, persuadés de lutter pour le bien commun.<br /> mais, étrangement, les taux de méthane dans l'atmosphère n'augmentent plus depuis plusieurs années (Albrecht Glatzle) et sont déconnectés des zones à forte concentration bovine.<br /> Bref, le réchauffement-dérèglement,-changement climatique a bon dos et empêche surtout de réfléchir.
Répondre
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire.<br /> <br /> Je ne pense pas que le véganisme se sert du changement climatique, sauf peut-être comme argument incident.<br /> <br /> Quant au taux de méthane dans l'atmosphère, ce n'est pas une question de stocks mais de flux. Si on considère le seul cas des ruminants qui en rotent, les quantités dégagées d'un côté et détruites de l'autre restent constantes si le cheptel n'augmente pas (toutes autres choses étant égales par ailleurs).
Y
il va falloir qu'ils se mettent d'accord les escrolo envoronnementeurs de tout bord!<br /> Un jour, le monde agricole est "foutu" parce qu'il a tué les insectes et sa biodiversité qui lui est indispensable......<br /> et un autre jours le monde agricole est "foutu" parce que les insectes vont nous envahir et détruire nos récoltes.<br /> il disparaissent ou ils disparaissent pas les insectes ?<br /> Il y en a trop ou pas assez?<br /> Comme le dit si bien Alain Duhamel : l'écologie est un sujet bien trop sérieux et important pour le laisser dans les mains des écologistes.<br /> Pour les cultures, les "agro de bureau" peuvent discuter , raconter ce qu'ils veulent, la seule chose de sur , c'est que les agriculteurs,trouveront leurs solutions adaptés à leurs besoins et ils maitriseront les pb insectes comme d'habitude.
Répondre
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire.<br /> <br /> Les "escrolo-environnementeurs" ne seront jamais d'accord, même l'un d'eux avec lui-même.<br /> <br /> A propos de "Terminator" -- ces semences produisant une récolte de grains qui ne pouvaient pas être utilisés comme semences pour la campagne suivante -- il doit bien y avoir du Vandana Shiva (à tout hasard, il y en a d'autres…) qui dit :<br /> <br /> Canal A : les paysans seront obligés d'acheter tous les ans, chez les méchantes multinationales (discours standard);<br /> <br /> Canal B: ça pourrait se propager au monde entier (en échappant au contrôle humain).<br /> <br /> <br /> L'ami Kindo a gravé une merveilleuse citation dans le marbre de Mediapart :<br /> <br /> https://blogs.mediapart.fr/yann-kindo/blog/240814/vandana-shiva-demythifiee<br /> <br /> « Terminator seeds are genetically modified to kill their own embryos, making them sterile at harvest. This means that if farmers save the seeds of these plants at harvest for future crops, the next generation of plants will not grow. Farmers would thus need to buy new seeds every year.<br /> <br /> After studying these seeds, molecular biologists warned of the possibility of terminator seeds spreading to surrounding food crops or to the natural environment—the gradual spread of sterility in seeding plants would result in a global catastrophe that could eventually wipe out higher life forms, including humans. Since 2001 there has been a de facto worldwide moratorium on the use of terminator technology. »<br />