Insectes anglais – 30 ans d'observation
Willy l'Agriculteur*
La discussion sur le déclin des insectes ne me laisse pas la paix. Surtout maintenant que même l'ORF, la radio autrichienne, s'appuie sur les données de la Rhénanie. Si j'écris à ce sujet maintenant, on m'accusera probablement à nouveau que je veux minimiser le sujet. Non, ce n'est pas le cas, mais je veux l'éclairer à partir d'un autre angle et faire appel à une autre source (d'Angleterre). C'est sans nul doute légitime, si on veut rendre justice au problème.
Il y a tout d'abord le terme « déclin des insectes ». Cela signifie que tous les insectes sont devenus plus rares. L'étude constamment citée des entomologistes de Krefeld n'a porté que sur les insectes volants. Plus précisément, seuls ceux qui s'attrapent dans le type de piège utilisé (pièges Malaise). Donc, pour tout ce qui ne vole pas, on ne peut faire aucune déclaration. Par exemple pour les scarabées. Parce qu'ils courent et ne volent pas habituellement. Ou les sauterelles, qui sont certes aussi capables de voler mais se déplacent surtout en sautant. Par conséquent, tous les articles de presse sur ce sujet devraient en fait se référer au « déclin des insectes volants ». Ce n'est pas une subtilité, mais la description de ce que les gens de Krefeld [de l'Université Radboud et de l'Université du Sussex] ont étudié. Vous ne pouvez parler de déclin des insectes que lorsque vous avez étudié tous les insectes. Voilà pour la précision journalistique.
En Angleterre, aussi on étudie les insectes volants. Mais contrairement à ce qui se passe à Krefeld, cela se fait par un institut de recherche scientifique, les emplacements sont répartis dans toute l'Angleterre, ils sont situés en pleine campagne, on met en place des pièges toujours aux mêmes endroits et les données brutes sont visibles pour tout le monde en ligne. Soigneusement classées en fonction des espèces d'insectes.
Dans la publication de l'Institut de Recherche Rothamsted, les scientifiques décrivent l'évolution à quatre endroits différents : Hereford, Rothamsted, Starcross et Wye. Quiconque est familier avec Google Maps peut voir le paysage depuis le ciel. Ce sont des régions de cultures sans particularités discernables. Les chercheurs britanniques ont constaté que la masse d'insectes, le simple poids, a diminué sur un site, est resté inchangée à deux endroits et a augmenté à un site. On ne peut donc pas déduire une tendance générale de ces résultats. Si vous regardez encore le nuage de points de chaque année et avez quelques notions de statistiques, vous réaliserez rapidement que la signification statistique (le coefficient de corrélation) de cette constatation est relativement faible car la dispersion d'une année sur l'autre est énorme. C'est tout à fait normal pour les paramètres biologiques. Et en fonction de la date à laquelle vous démarrez la ligne de tendance, sa pente sera différente. Tous ceux qui s'occupent de données scientifiques savent cela.
La collecte de données de la Société Entomologique de Krefeld présente des lacunes pour certaines années. Ce n'est pas grave car, après tout, les observateurs font ce suivi pendant leur temps libre. Mais il n'est pas permis mathématiquement de connecter les points d'une série chronologique avec des données manquantes par une ligne. Si j'avais fait quelque chose comme ça pendant mes études, mon professeur m'aurait à juste titre jeté mon travail à la figure. Dans le cas des données de la Société de Krefeld, on a fait cette connexion des points avec une ligne. Et personne ne s'en émeut. La Société de Krefeld a fréquemment changé l'emplacement des pièges à insectes dans la région. Ça aussi ne devrait pas être fait. Si le piège est installé une année en lisière de forêt, l'année suivante dans une prairie et la troisième, à côté d'une piscine, on obtiendra des résultats différents, même quand la distance est de quelques centaines de mètres. Cela ne dérange personne non plus. Les gens de Krefeld n'ont tout simplement pas utilisé une méthode standardisée, contrairement aux scientifiques anglais. Que l'on puisse manipuler les données – et comment on peut le faire –, je le montre dans ce fichier pdf (ci-dessous). Les lignes rouges sont de ma main ; on peut donc voir qu'on peut voir les mêmes données sous un jour très différent, n'est-ce pas ? Mais c'est une manipulation et ne devrait servir ici que pour l'illustration.
Si vous êtes intéressé par les détails de l'étude anglaise, vous trouverez les données originales ici :
https://farmlandbirds.net/sites/default/files/Decline%20flying%20insects.pdf
Si vous voulez en savoir plus sur l'Institut de recherche, les chercheurs et les dernières données, voici le lien :
https://www.rothamsted.ac.uk/insect-survey
C'est l'un des instituts du BBSCR, qui emploie environ 1.200 scientifiques et environ 2.000 étudiants en recherche à travers le Royaume-Uni.
Eh bien, chers amis, j'ai pris plusieurs heures pour étudier la publication anglaise. Aussi bien que j'aie pu le faire, avec mes compétences en anglais et en mathématiques. Il ne résulte de ce travail, qui porte sur 30 ans et sera certainement poursuivi, aucune tendance claire. Et encore une fois : c'est un travail propre et scientifique d'un organisme de recherche qui rend ses données accessibles à tout le monde à intervalles réguliers.
Je serais heureux que vous transmettiez cet article aux politiciens et aux journalistes et que vous le diffusiez aussi largement que possible. Il se peut que j'aie fait une erreur quelque part, mais cela peut être discuté. Mais cette étude scientifique doit aussi être discutée, elle doit tout autant intervenir dans la formation de l'opinion que l'ensemble de données de Krefeld. Quiconque occulte l'évaluation des scientifiques anglais, me donne l'impression qu'il ne s'occupe pas de vulgarisation, mais... (tout le monde peut compléter la phrase lui-même).
Je ne voudrais contribuer avec cet article qu'à l'objectivation. Bien sûr, vous pouvez encore m'accuser de lobbying, alors mes efforts auront été vains...
Willi, votre Agriculteur
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* Willi l'Agriculteur (Bauer Willi) exploite 40 hectares en grandes cultures (betterave sucrière, colza, céréales) en coopération opérationnelle. Il a été double-actif jusqu'à l'automne 2014. Son deuxième métier a été le suivi et le conseil aux agriculteurs pour une entreprise familiale (sucrerie). Depuis lors, il continue d'exploiter son domaine en tant que pré-retraité et a du temps pour écrire et partager son expérience.
Il contribue aussi bénévolement à l'association (fondation) des habitants de sa commune et à une coopérative agricole
Source : http://www.bauerwilli.com/englische-insekten/