Les « faucheurs volontaires » exigent le respect de l'ordre !

Les « faucheurs volontaires » exigent le respect de l'ordre !

Un lecteur m'a fait part d'un article publié par l'Alsace le 29 mars 2018 – ce n'est donc pas un poisson d'avril –, « Les faucheurs volontaires fauchés à l’université » (on peut débloquer l'article en regardant avec patience une courte vidéo de publicité).

En chapô :

« Guy Kastler, spécialiste des semences paysannes et des OGM, n’a pas pu donner sa conférence et aucun débat n’a eu lieu comme prévu le mercredi 21 mars dans un amphithéâtre de l’institut Le Bel, à Strasbourg. »

La cause ? Un enseignant-chercheur de l’Institut de Biologie Moléculaire des Plantes, a fait du ramdam en début de séance et « [p]our éviter tout dérapage, les responsables de Campus Vert ont préféré annuler la conférence, constatant avec effroi que les invectives devenaient de plus en plus violentes. »

L'enseignant-chercheur a expliqué par la suite au journaliste qu'« [o]n ne veut pas de propagande de groupes extrémistes à l’université » et qu'il croyait savoir que « lorsqu’ils ont demandé l’autorisation d’organiser cette conférence, [les membres de Campus Vert] n’ont pas fait mention des faucheurs volontaires. Ce n’est que plus tard, sur les affiches placardées, qu’ils sont apparus comme en étant les instigateurs. »

Un enseignant-chercheur qui s'oppose à une prise de parole, dans le cadre de l'Université, par des membres d'un groupe organisé qui fait usage de méthodes violentes tombant sous le coup du droit pénal – qui, en bref, se livre à la délinquance –, cela mérite d'être souligné.

A-t-il eu raison, au moins sur les faits ?

Les Amis de la Confédération Paysanne d'Alsace ont écrit une lettre ouverte à M. Michel Deneken, Président de l’Université de Strasbourg :

« Vous avez autorisé la tenue d’une conférence sur les OGM cachés le 21 mars 2018 dans les locaux de l’Université, à l’Institut Le Bel, qui sont sous votre responsabilité. Les Amis de la Confédération Paysanne d’Alsace et le Comité de Soutien aux Faucheurs Volontaires tiennent à vous en remercier. [...] »

Tiens donc ! Le Comité de Soutien aux Faucheurs Volontaires... la vitrine de la délinquance en bande organisée...

En fait, l'entourloupe est évidente : Campus Vert a demandé l'autorisation, mais les vrais organisateurs ont été les Faucheurs Volontaires et les Amis de la Confédération Paysanne, dans cet ordre.

(Source)

Le vice-président Yves Larmet – qui avait été alerté de la présence de faucheurs volontaires aux côtés de Guy Kastler dès le 15 mars 2018 – a réagi, par l’entremise du service communication :

« L’université de Strasbourg a autorisé cette conférence organisée par une association étudiante. Cette conférence n’était pas de nature à troubler l’ordre public, nous n’avions donc aucune raison de l’interdire, même si nous n’avions pas été informés de la présence d’autres groupes activistes. Rappelons que l’université s’inscrit dans une tradition de discussion et de débat contradictoire. »

Eh bien non, M. Larmet ! La tradition de discussion et de débat de l'université ne saurait tolérer la promotion, voire l'apologie, de la délinquance. La tradition de discussion et de débat ne saurait prévaloir sur le respect du droit, un des fondements de la vie en société, et la promotion du civisme.

Les organisateurs cachés – à la direction de l'Université mais pas au public – d'une conférence-débat sur les « OGM cachés » se sont donc dits « consternés de constater que, dans un lieu comme l’Université, la liberté d’expression ne soit pas respectée » du fait de « l’obstruction préméditée et délibérée d’un enseignant de votre Université. »

« …préméditée et délibérée... » Voilà un langage qu'on peut fort bien appliquer à ceux qui, nuitamment, « fauchent ». Avouez que ça ne manque pas de sel que de revendiquer le respect d'un droit fondamental par une institution universitaire et de recherche, et pour son compte, quand on viole un autre droit fondamental, en l'occurrence de propriété et de respect de l'intégrité des biens, d'autrui – des particuliers mais aussi des... institutions de recherche...

La lettre de protestation tourne aussi au pathétique :

« Pour permettre la meilleure information possible, nous avions organisé le déplacement de Monsieur Kastler, nommé par le Ministre de l’Agriculture au Comité Permanent de la Sélection, par le Ministre de l’Environnement au Haut Conseil des Biotechnologies et qui représente régulièrement la Confédération Paysanne, et la Via Campesina Internationale tout autant au Parlement qu’à la Commission Européenne, à la FAO, au Traité International sur les semences (TIRPAA) et dans d’autres instances de la gouvernance internationale. »

Tout cela ne l'empêche pas de proférer et de diffuser des âneries et des contre-vérités.

Que dit l'affiche des organisateurs cachés d'une conférence-débat (débat en principe entre gens de même obédience) ?

« Jusqu’à présent, les OGM étaient obtenus par transgénèse.

En France, la culture d’OGM est pratiquement interdite.

Pour contourner cette interdiction, Monsanto et les autres concepteurs d’OGM ont mis au point une autre technique : la mutagénèse.

Cette nouvelle technologie pourrait ne pas être considérée comme des OGM.

De ce fait, la cultures de ces plantes, obtenues également par manipulation génétique, risque d’être autorisée en France, avec les mêmes problématiques. »

Que vient faire Monsanto ici ? Ah oui, c'est le cri de ralliement de la contestation. Et la mutagénèse... Hermann J. Muller la pratiquait déjà sur des drosophiles à l'aide des rayons X en... 1927 ! À peu près à la même époque, Lewis J. Stadler commençait à utiliser les rayons X sur l'orge. Le laboratoire commun de l'AIEA et de la FAO – qui produit des mutations de plantes par irradiation a fêté son 50e anniversaire en 2014... Voilà des faits objectifs qui nous dispensent de regarder de plus près les sinistres manœuvres alléguée de « Monsanto et [des] autres concepteurs d’OGM ».

Et que dit M. Kastler ?

« Depuis quand l’Agence internationale de l’énergie atomique s’occupe-t-elle d’agriculture ?

Elle travaille depuis une dizaine d’années, en partenariat avec la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) sur l’augmentation de la production alimentaire des Etats membres. Ils justifient le recours à la mutagenèse par le besoin de trouver des plantes dès maintenant pour nourrir le monde. »

Et voici pour la route :

« La connaissance des lois de la mutation doit tôt ou tard conduire à la possibilité d'induire des mutations à volonté et ainsi d'engendrer des caractères parfaitement nouveaux chez les animaux et les plantes. Et de même que le processus de sélection nous a permis de produire des races améliorées, de plus grande valeur et beauté, un contrôle du processus mutatif placera entre nos mains le pouvoir de produire des espèces animales et végétales améliorées en permanence. » – Hugo De Vries, 1909