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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Campylobacter chez le poulet : pourquoi il faut mettre les distributeurs français à contribution

10 Mars 2018 , Rédigé par Seppi Publié dans #Santé publique, #Albert Amgar

Campylobacter chez le poulet : pourquoi il faut mettre les distributeurs français à contribution

 

Albert Amgar*

 

 

Dans un précédent article en octobre 2017, je rapportais qu'au « Royaume-Uni, les résultats définitifs de la troisième enquête annuelle dans la distribution montrent que les niveaux de Campylobacter chez le poulet continuent de baisser. Je me posais aussi la question quid en France ? ».

 

Rassurez-vous vis-à-vis de Campylobacter, il ne se passe pratiquement rien en France en termes d'informations que vous devriez savoir... ou alors si peu...

 

As usual, l'Anses fournit des conseils d'hygiène :

 

Les risques de campylobactériose peuvent être largement limités par l’adoption de bonnes pratiques d’hygiène à la maison. Il est ainsi essentiel de :

 

  • se laver les mains après la manipulation de viandes crues.

     

  • utiliser une planche à découper (bois ou plastique) pour les viandes et poissons crus, et une autre pour les autres aliments.

     

  • nettoyer rigoureusement la planche, le plat et les ustensiles ayant servi à l’assaisonnement et à la préparation de la viande crue avant réutilisation.

     

  • s’assurer d’une cuisson suffisante (> 65 °C à cœur) des viandes de volailles et de boucherie, notamment la cuisson au barbecue : la jointure cuisse/haut de cuisse du poulet ne doit pas être rosée ou présenter de traces de sang.

     

  • manipuler ces viandes dans de bonnes conditions d’hygiène lors de la préparation et de la consommation de ce type de denrées.

     

  • ne pas consommer de viande de volaille crue (de type « carpaccio »).

 

Bien entendu ces règles d'hygiène sont essentielles, mais on doit pouvoir faire mieux en termes de maîtrise de la contamination des poulets entiers réfrigérés ; nous verrons plus loin que c'est possible...

 

Le ministère de l'agriculture nous dit :

 

La campylobactériose est une zoonose bactérienne transmise principalement par voie alimentaire. La campylobactériose est la zoonose d’origine alimentaire la plus fréquemment signalée dans l’Union européenne. En France, on estime l'incidence à environ 842 cas/100.000 habitants par an. 

 

J'invite aussi le lecteur de cet article à lire le document de ce ministère sur « Comment fonctionne le système d'alerte sanitaire en France ? » afin de savoir si oui ou non une alerte liée à Campylobacter dans le poulet peut être détectée.

 

L'InVS a précisé les enjeux et rapporte dans un article « Estimation de la morbidité et de la mortalité liées aux infections d’origine alimentaire en France métropolitaine, 2008-2013 » :

 

Les infections à Campylobacter spp. se classent au 2e rang en nombre de cas (392 177 cas, 26% du nombre total), en première position en nombre d’hospitalisations (5 524 hospitalisations, 31% du nombre total) et en 3e position en nombre de décès (41 cas décédés, 16% du nombre total).

 

Dans ce contexte, on peut légitimement se poser la question de savoir pourquoi les contrôles ne sont pas en mesure de détecter les problèmes rencontrés chez l'homme.

 

Selon le ministère de l'agriculture, dans un document de 2012, Campylobacter la bactérie du poulet, sans doute obsolète,

 

Chaque année, plus de 60 000 prélèvements sont effectués par les services de la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL) correspondant à 100 000 analyses en laboratoire. Une fois la contamination avérée, des mesures de retrait ou de rappel de produits pour protéger le consommateur ainsi que des mesures préventives ou correctives pour le producteur ou le distributeur sont prises.

 

Je n'ai jamais entendu parler en France de mesures de rappel de produits en raison d'une contamination par Campylobacter, mais je veux bien lire...

 

Soit, mais peut-on mieux faire ?

 

Les Anglais (source Food Standards Agency, équivalent de l'Anses au Royaume-Uni) nous montrent la voie depuis plusieurs années avec cette nouvelle enquête parue le 8 mars 2018 dans laquelle on apprend que les distributeurs britanniques, parfois si réticents comme leurs homologues français dans leur communication en matière de sécurité des aliments, ont été mis à contribution :

 

Les neuf premiers distributeurs du Royaume-Uni ont publié sur leurs sites Internet respectifs les résultats de leurs analyses microbiologiques de la contamination par Campylobacter de poulets entiers réfrigérés produits au Royaume-Uni (couvrant les mois d'octobre à décembre 2017).

 

Les chiffres montrent qu'en moyenne, sur le marché, 4,5% des poulets ont été testés positifs pour le plus haut niveau de contamination, il s'agit des poulets porteurs de plus de 1.000 unités formant des colonies par gramme (ufc/g) de Campylobacter. Le chiffre positif avec le plus haut niveau de contamination pour le trimestre précédent (juillet-septembre 2017) était de 5,14%.

 

Un tableau comparatif est proposée entre la période juillet-septembre 2017 et la période plus froide d'octobre à décembre 2017 et il montre que les résultats vont dans le bon sens...

 

Ainsi donc les distributeurs britanniques suivants présentent leurs résultats sur leurs sites Internet respectifs, et les consommateurs peuvent juger des progrès réalisés ou non...

 

 

Mais au fait, pourquoi cela ne serait-il pas possible en France ? Vu le nombre de cas de maladies infectieuses à Campylobacter, cela serait une action à entreprendre rapidement... oui, mais quand ?

 

On a appris récemment que Carrefour avait lancé la première blockchain alimentaire sur des poulets entiers. Ça permet aux acheteurs de ce poulet fermier d’avoir accès à un maximum d’informations sur la traçabilité du produit.

 

Y compris Campylobacter ?

 

À l'heure où les inspections en sécurité des aliments sont en baisse (le nombre d'inspections est ainsi passé de 76.000 en 2015 à 55.000 en 2016, grâce au mérite de l'ancien ministre de l'agriculture (un « formidable ministre de l'Agriculture » pour le journaliste Périco Légasse, c'est dire...), mettre à contribution les distributeurs serait une action d'utilité voire de santé publique... à suivre... et notamment pourquoi ne pas transférer aux distributeurs les coûts de la surveillance des poulets réfrigérés de France vendus en supermarché...

 

______________

 

* Albert Amgar a été pendant 21 ans le dirigeant d'une entreprise de services aux entreprises alimentaires ; il n'exerce plus aujourd'hui, car retraité, mais au travers de son blog (quand il s'y remettra...), vous livre des informations dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité des aliments. En attendant qu'il s'y remette, je l'accueille avec plaisir.

 

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