La cupidité, les mensonges, et le glyphosate : les « Portier Papers »
Risk-monger*
Voici un exposé sur la façon dont un scientifique, Christopher Portier, porte atteinte à la réputation de la science, aux avis scientifiques en matière de réglementation et à une agence de l'OMS. Il incite à s'interroger sur le financement, la transparence et la motivation des activistes anti-glyphosate, sur le rôle du CIRC dans les pratiques américaines en matière de contentieux dirigés contre les entreprises et sur la qualité des scientifiques qui s'engagent aux côtés des activistes. Il démontre que toute la campagne contre le glyphosate a été construite sur la cupidité et la tromperie.
Cet article se fonde sur les déclarations figurant dans la déposition faite par Christopher Portier lors d'une audition dans le cadre des litiges en matière de responsabilité, des instances introduites contre le Roundup de Monsanto (les pièces du dossier sont communément appelées les « Monsanto Papers »). Portier a été l'expert invité, le conseiller spécial externe du groupe de travail du CIRC qui a produit la fameuse décision de classer le glyphosate en « probablement cancérogène ». Cet article mettra en évidence les informations suivantes :
Au cours de la semaine dans laquelle le CIRC a publié son avis sur la cancérogénicité du glyphosate, Christopher Portier a signé un contrat juteux en tant que consultant en litiges pour deux cabinets d'avocats se préparant à poursuivre Monsanto au nom de victimes d'un cancer dont la cause a été attribuée au glyphosate.
Ce contrat a rémunéré Portier à hauteur d'au moins 160 000 $US (jusqu'en juin 2017) pour les premiers travaux préparatoires en tant que consultant en litige (les frais de voyage en sus).
Ce contrat contenait une clause de confidentialité selon laquelle Portier devait s'abstenir de déclarer de manière transparente cet emploi aux tiers avec lesquels il serait en contact. De plus, Portier a même déclaré qu'il n'a pas touché un centime pour le travail qu'il a fait sur le glyphosate.
Il est devenu clair, dans les courriels fournis lors de la déposition, que le rôle de Portier dans le mouvement pour l'interdiction du glyphosate a été crucial. Il a promis dans un courriel adressé au CIRC qu'il protégerait sa réputation et la conclusion de la monographie, et qu'il s'occuperait des rejets des conclusions du CIRC prononcés par le BfR et l'EFSA.
Portier a admis dans la déposition qu'avant les réunions du CIRC sur le glyphosate, dans lesquelles il était le seul conseiller expert externe, il n'avait jamais travaillé sur le glyphosate et n'avait aucune expérience au sujet de cette substance.
Je suis encore trop choqué pour savoir par où commencer ! Peut-être un peu d'histoire.
Le glyphosate est un herbicide modérément toxique largement utilisé par les agriculteurs de l'UE pour lutter contre les mauvaises herbes et permettre des pratiques agricoles de conservation qui protègent et améliorent la santé des sols. Cette substance est tombée dans le domaine public en 2000 et a été utilisée efficacement pendant plus de 40 ans ; dans une large mesure, elle répond toujours aux attentes et aux besoins des agriculteurs, à moindre coût et de manière durable. En dehors de l'Europe, elle est également utilisée en association avec des semences modifiées, résistantes à cet herbicide (le glyphosate est essentiellement connu comme étant à la base du Roundup de Monsanto utilisé avec les semences Roundup-Ready).
Le 20 mars 2015, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a annoncé ses conclusions sur le glyphosate (et plusieurs insecticides), estimant que l'herbicide était probablement cancérogène (la monographie, publiée fin juillet 2015, est ici). Cela a déclenché une vague de campagnes au sein de la communauté des militants écologistes, des ONG anti-OGM et du lobby du biobusiness pour une interdiction du glyphosate. Tous les autres organismes scientifiques et instituts de recherche ont rejeté la conclusion du CIRC, sans exception. La Commission européenne tente depuis deux ans de renouveler l'autorisation du glyphosate, mais à chaque étape elle a été bloquée par l'absence de majorité dans les votes des États membres. Il est probable que la dernière tentative qui aura lieu ce mois-ci ou le prochain échouera et que le glyphosate sera retiré des marchés européens.
Christopher Portier a présidé en 2014 un comité du CIRC qui a proposé que le glyphosate soit une substance étudiée par un groupe de travail sur les monographies, au sein duquel il a été ensuite nommé comme seul spécialiste technique invité. J'ai été stupéfait de voir Portier rattaché à ce panel du CIRC, étant donné son affiliation à l'Environmental Defense Fund, une ONG américaine qui mène des campagnes anti-pesticides depuis les années 1960. Depuis deux ans, je documente comment le CIRC, et Portier en particulier, ont agi avec un zèle militant pour faire avancer un agenda manifestement anti-glyphosate et anti-Monsanto (et j'ai écrit plus de 20 articles sur ce scandale). Portier fait partie de ce que j'ai appelé la vague de carpetbaggers, d'activistes américains anti-OGM amenant des fonds, du personnel et des stratégies de Washington sur le terrain du lobbying en faveur de la précaution beaucoup plus fertile de Bruxelles.
Voilà qui semble être un phénomène de portes tournantes : d'abord un travail pour classer une substance comme cancérogène (probable), suivi d'un travail pour poursuivre les entreprises en justice.
Portier a fait sa déposition dans les locaux du cabinet d'avocats Weitz & Luxenberg le 5 septembre 2017. Cet article se fonde sur ses déclarations telles que consignées dans la retranscription de cette réunion, publiée par l'USRTK. Toutes les captures d'écran sont prises de ce document, les numéros de page étant bien visibles. Le Q se réfère à l'avocat du défendeur [Monsanto] et le A est la réponse fournie par Portier. Portier a également soumis un rapport d'expert avant cette réunion (ci-après : « le rapport »).
Il n'a aucune idée du montant ? Moi, je me rendrait compte qu'une somme de 160.000 $US a été versée sur mon compte...
Au moment où le CIRC a publié ses conclusions sur le glyphosate, Christopher Portier a rejoint deux cabinets d'avocats (Lundy, Lundy, Soleau & South, et Weitz & Luxenberg) en tant que consultant en contentieux. Il avait même été en contact avec M. Hunter Lundy deux mois avant de rejoindre la réunion du groupe de travail du CIRC sur le glyphosate. En tant que consultant, le taux de facturation de Portier, selon le rapport qu'il a soumis avant la déposition, a été de 450 $US de l'heure.
Jusqu'en juin 2017, Portier a facturé à Lundy, Lundy, Soleau & South 160 000 $US pour la préparation initiale des documents.
Son rôle a été de lire des documents et de conseiller les avocats sur des questions scientifiques, les deux sociétés ayant préparé des poursuites contre Monsanto. Que Lundy, Lundy, Soleau & South et Weitz & Luxenberg (voir la coupure de presse ci-dessous) aient planifié une stratégie de litige contre Monsanto avant même que le CIRC ait tenu sa réunion du groupe de travail sur le glyphosate ne devrait pas être une surprise – ces avocats spécialisés dans les actions de groupe sont une race particulière d'opportunistes.
Mais Portier ne pensait pas comme un scientifique quand il a planifié ce régime de complément de retraite.
Je me demande combien Chris facturera pour lire mon article...
On peut imaginer qu'une série de procès contre Monsanto traînant en longueur serait très lucrative pour le bon scientifique. Ce que j'ai trouvé remarquable, tout comme les avocats de la défense, c'est la méticulosité avec laquelle le Dr Portier a fait ses recherches. Il a facturé au cabinet d'avocats 19 heures de travail pour lire une note de deux pages.
19 heures pour lire deux pages (à 450 $US/heure) !
Cela laisse entendre que le cabinet d'avocats a assez d'argent à dépenser, ou des pratiques comptables très laxistes, ou qu'il a permis à Portier de facturer d'autres frais qu'ils préféreraient garder en dehors des livres de comptes. J'ai mon idée là dessus.
Cette surfacturation pourrait compenser la vie trépidante que Portier a menée pour se rendre dans des capitales, d'Auckland à Ottawa, partout où il y a eu des réunions pour promouvoir l'interdiction du glyphosate. Je ne pense pas qu'il a fait cela par bonté.
Mais comment donc ces scientifiques peuvent-ils motivés par des intérêts économiques ?
Cela dit, le Risk-monger n'est pas envieux (il a assez d'argent pour bien vivre et consacrer suffisamment de temps libre pour bloguer), sauf que je ne peux pas m'empêcher de remarquer l'hypocrisie. Les conseils du défendeur ne pouvaient pas non plus le faire. Voici donc un scientifique qui retire des tombereaux d'argent pour lire quelques documents (ou mémos) et part à l'attaque militante pour critiquer les chercheurs financés par l'industrie ou ceux qui pourraient tirer des conclusions biaisées en fonction de « motivations économiques ».
Du côté positif, chaque fois qu'elle finance des recherches, l'industrie divulgue généralement le financement. Je me demande si le Dr Portier est aussi transparent s'agissant de savoir qui paie son loyer.
L'un des problèmes avec le contrat de Portier avec le cabinet d'avocats est que, comme pour de nombreuses relations juridiques, il était impératif de préserver la confidentialité. Une sorte de « secret des relations entre avocat et client », mais pour des scientifiques. En d'autres termes, Chris pouvait être payé aussi longtemps qu'il ne disait à personne qu'il agissait en tant que consultant en litige.
Je me demande ce qu'en pense Saint Martin de la Transparence [Martin Pigeon, de Corporate Europe Observatory]. Je suis sûr qu'il va essayer de le maquiller !
Portier n'a pas été autorisé (par contrat) à être transparent. Il ne pouvait pas dire aux médias, aux journaux, au public ou à d'autres experts qui payait son loyer. En fait, si quelqu'un tentait de forcer le bon scientifique à divulguer ses sources de financement, il pouvait appuyer sur le bouton de panique et ses avocats interviendraient, le représenteraient et le mèneraient en lieu sûr. (« Je pense que c'est ce que dit la partie C » – page 82 de la déposition). Maintenant, vous pouvez dire que je suis naïf, mais je pensais que ce type de protection n'était fourni qu'aux comptables mafieux.
Au cours de la déposition, l'avocat du défendeur a examiné systématiquement chaque réunion, chaque papier, lettre ou activité et Portier a reconnu à chaque fois qu'il n'avait pas identifié son conflit d'intérêts ni fait référence aux cabinets d'avocats. Mais il attaque toujours Monsanto à ce sujet.
Portier voyage ainsi à travers le monde, rencontre le Commissaire Européen à la Santé, se rend à l'Agence Européenne des Produits Chimiques pour prendre le thé, conseille le Bundestag allemand et rencontre presque tous les ministres de la santé de l'Union Européenne pour mener le bon combat pour faire interdire le glyphosate tout en empapaoutant Monsanto. Mais au fond de lui, il devait y avoir cette gêne latente et lancinante, cette crainte qu'à un moment ou un autre de la conversation, n'importe quelle conversation, quelqu'un se tournerait vers lui et lui dirait : « Alors, dis-moi, Chris, qui finance tes activités ? »
Il a fallu quatre pages à l'avocat de la défense pour convaincre Chris qu'il avait menti avec effronterie.
Au moment de la déposition, quand tout fut finalement dévoilé et mis sur la table, Portier aurait dû se sentir soulagé de ce fardeau.
Au contraire, Christopher Portier semblait être à l'aise avec son mensonge sur son financement. Il a même embelli son histoire de manière hyperbolique. Alors qu'il avait reçu au moins 160 000 $US pour financer ses activités, il s'est retourné et a déclaré à un journaliste que « personne ne lui avait versé un centime » et qu'il « n'avait absolument aucun conflit d'intérêts ». « Absolument aucun », Chris ? Vraiment ? Aviez-vous vraiment besoin d'ajouter « absolument » alors que vous étiez entièrement acheté et payé ?
Extrait de "Oh, brother: CropLife questions makeup of glyphosate panel", d'Agri Pulse.
Dans la défense de Portier, il pourrait s'agir d'une simple question d'ignorance. Il est peut-être l'un de ceux qui pensent que le « conflit d'intérêts » ne se produit que chez les personnes liées à des entreprises mal intentionnées. Dans le CV qu'il a déposé dans son rapport, Portier n'a pas mentionné qu'il travaillait pour l'Environmental Defense Fund. Lors de la déposition (p. 38-39), il s'est aussi moqué de ceux qui pensaient que son travail pour l'EDF pouvait être « perçu » comme un conflit d'intérêts. Peut-être que figurer dans la liste des participants au groupe de travail de la monographie comme un simple « spécialiste invité » doit toujours le ronger.
Après la publication de sa déposition, ses employeurs ont dû reculer. Lors de son apparition devant le Parlement Européen hier [le 11 ocotbre 2017], Portier a fait pénitence en reconnaissant qu'il travaillait pour des avocats [ma note : et il a poursuivi en disant qu'il s'exprimait en tant que simple citoyen...].
Chasse aux victimes du cancer. En petits caractères : si aucune indemnité n'est allouée, nous ne facturerons ni honoraires ni frais !
On a beaucoup glosé sur l'argent de l'industrie qui influe sur les débats politiques, mais on n'a guère prêté attention à la façon dont certains cabinets d'avocats spécialisés dans les actions de groupes utilisent des preuves peu convaincantes (généralement du CIRC) pour organiser des actions judiciaires à grande échelle contre les entreprises.
Au moment des procès contre le tabac, une certaine race d'avocats a émergé – ceux qui pouvaient identifier les victimes et négocier des règlements rapides. Leurs profits ont bien augmenté, que ce soit par le biais des dommages-intérêts conséquents alloués par des jurys ou de compromis rapides. Les avocats attirent les « victimes » avec des programmes « sans honoraires et sans frais d'avance », les frais juridiques n'étant acquittés par les « victimes » que s'il y a un paiement (ils représentent parfois jusqu'à 50 % des sommes allouées).
Mais lorsque l'industrie du tabac a négocié une trêve avec le gouvernement américain (en échange d'un peu d'honnêteté sur les effets du tabagisme), ces avocats ont dû aller voir ailleurs pour leur cash-flow. Chaque monographie du CIRC crée un nouveau secteur d'activité potentiel pour nourrir ces serpents.
Ces cabinets d'avocats s'engagent aussi dans des campagnes et dans le débat public pour créer et entretenir une indignation publique à propos des victimes de malversations alléguées d'entreprises ; ils créent des sites de communication astucieux et, dans le cas de Weitz & Luxenberg (l'un des parrains de Portier... et d'Erin Brockovich), travaillent aussi avec des ONG comme USRTK.
Du site de Weitz & Luxenberg. Les piècers du dossier atterrissent par miracle à l'USRTK...
C'est ce que j'appellerais le principe d'Oreskes. Naomi Oreskes a organisé en 2012 une conférence avec l'Union of Concerned Scientists, y compris avec des juristes peu scrupuleux, des acteurs d'ONG et des universitaires, pour voir comment « tabaciser » d'autres industries. Cette stratégie ouvertement affichée – quel scandale ! – cherche des moyens de faire pression sur les entreprises sur le plan judiciaire jusqu'à ce qu'elles changent de stratégie ou cessent leurs activités. En 2012, ils ont cherché des moyens de poursuivre des compagnies pétrolières comme ExxonMobil à propos du changement climatique et, bien sûr, quelques années plus tard, le procureur général de New York a assigné Exxon (et ses consultants) à comparaître pour avoir possiblement induit les investisseurs en erreur sur les effets potentiels sur le changement climatique.
Le but principal du principe d'Oreskes est de mener des campagnes fondées sur l'émotion avant de passer devant le jury, de susciter suffisamment d'indignation publique pour qu'aucun jury ne soit jamais capable d'être objectif et de faire la distinction entre les faits et les fictions de la campagne de peur. Manipulez la perception publique, suscitez la peur ou l'indignation en coopérant avec des activistes, des gourous et des ONG, trouvez une entreprise bouc émissaire... et plaidez contre eux. Cela vous semble-t-il familier ?
Toujours du site de Weitz & Luxenberg.
Cette stratégie est maintenant appliquée non seulement contre Monsanto, mais aussi contre Johnson & Johnson – qui est actuellement aux prises avec plus de 4500 procès (avec une décision récente portant sur 417 millions $US contre l'entreprise) sur la base du lien présumé entre le cancer et le talc (encore une monographie récente, lamentable, du CIRC). Il existe plusieurs autres exemples d'actions collectives en cours intentées sur la base des travaux du CIRC (de certains solvants industriels aux gaz d'échappement des moteurs diesel). Avec chaque monographie basée sur le danger, le CIRC crée une aubaine pour des avocats sans scrupules, lesquels peuvent aller à la chasse aux victimes et tromper un jury scientifiquement analphabète. Il suffit d'ajouter un consultant en litiges issu du groupe de travail de la monographie originale pour ajouter de la crédibilité et guetter les revenus.
L'un des problèmes que j'ai avec ce modèle (en fait, j'en vois des douzaines) est que les cabinets d'avocats (en particulier de la race des avocats d'actions collectives) ne sont pas du tout transparents. Nous savons par exemple que Weitz & Luxenberg travaille avec l'USRTK ; ils l'ont dit (mais seulement parce que Carey Gillam gère leur service des victimes) ; mais nous ne savons pas combien ils paient l'ONG pour aider à « amadouer » les jurés potentiels, ni s'ils financent d'autres ONG. Quel soutien ces cabinets d'avocats apportent-ils aux groupes activistes ?
On peut se demander si le CIRC est conscient de cela, s'il contribue au contraire aux litiges et si les scientifiques des groupes de travail du CIRC sont conscients des perspectives de gain en se faisant « consultant en contentieux ». Il est clair que Portier savait et qu'il a eu de la peine à attendre que l'encre soit sèche sur la monographie avant de passer à la caisse.
Attaquer l'EFSA et le BfR pour sauver le CIRC ? Ou pour sauver le pot de miel ?
Dans un courriel adressé aux directeurs du CIRC, Portier a pris l'initiative de sauver « héroïquement » la monographie du glyphosate du CIRC et de défendre la réputation du CIRC en tant que leader dans la lutte pour changer la façon dont les substances sont évaluées. Dans le message posté ici, Portier a vaillamment promis à ses amis du CIRC d'être le défenseur de l'agence ! Cela suggère qu'il a été, depuis la clôture de la réunion du groupe de travail de la monographie du CIRC, le principal acteur de la défense à la fois du CIRC et de sa décision sur le glyphosate.
Alors, que signifierait la disgrâce de Portier pour la monographie du glyphosate du CIRC ? Si la monographie était retirée, qu'arriverait-il à tous ces recours collectifs contre Monsanto ? Qu'arriverait-il à tous ces juteux honoraires de consultation ?
Je ne crois pas que Portier ait travaillé avec tant de zèle au cours des deux dernières années en raison de la nécessité de défendre l'exactitude de la science ou le souci de la santé publique ; mais si le CIRC était obligé de rétracter cette monographie :
Les milliers de procès intentés contre Monsanto seraient perdus ;
Le contrat de consultation lucratif de Portier avec ces deux cabinets d'avocats serait perdu ;
Sa réputation scientifique serait perdue.
Par cupidité, Christopher Portier a donc mené une attaque de deux ans contre l'EFSA et le BfR pour miner leur crédibilité scientifique sur le glyphosate, visité les capitales européennes, interféré dans les activités des agences de régulation et vécu une vie de tromperie totale. Extraordinaire !
Mais la science n'est pas au rendez-vous. Le glyphosate, selon toutes les normes d'évaluation des risques, n'est pas cancérogène. Aucune autre agence n'a soutenu la conclusion controversée du CIRC. Pas une !
Et voici la partie vraiment terrible de cette histoire terrible.
Portier – le conseiller expert – a reconnu qu'avant la réunion du groupe de travail du CIRC, il n'avait jamais examiné de preuves scientifiques sur le glyphosate.
Christopher Portier a admis dans sa déposition qu'avant de se présenter au CIRC pour être l'expert externe, le conseiller spécial, pour la monographie 112 sur le glyphosate, il n'avait jamais travaillé sur le glyphosate – qu'il n'avait jamais regardé aucune des preuves sur la cancérogénicité du glyphosate. Il est statisticien de formation et a travaillé auparavant sur une grande variété de sujets, y compris les téléphones portables.
Beaucoup peuvent se demander pourquoi le CIRC aurait invité Portier à être le seul expert-conseil invité s'il n'avait jamais travaillé ni publié sur le glyphosate et ne s'était jamais frotté à la communauté de la toxicologie des pesticides en général et du glyphosate en particulier. Eh bien, tous ceux qui ont observé cette petite agence à Lyon comprendront que le CIRC n'est pas vraiment scientifique mais agit plutôt comme un club de scientifiques activistes et de porteurs d'intérêts particuliers. Kurt Straif et Kate Guyton connaissaient Chris très bien – la vraie expertise scientifique n'avait aucune d'importance !
Ce qui est plus intéressant, c'est de savoir pourquoi Portier a décidé d'accepter cette fonction importante sur ce qu'il savait être une monographie controversée, alors qu'il savait qu'il n'avait pas de formation universitaire crédible et qu'il avait clairement un conflit d'intérêts (travailler pour une ONG anti-pesticides) et aucune raison réelle de participer. A-t-il accepté la tâche en raison du contrat de consultation lucratif qu'il obtiendrait ensuite en tant que conseiller des cabinets d'avocats qui envisageaient déjà de poursuivre Monsanto ? Était-ce sa haine de la science de l'industrie et des conspirations de Monsanto qu'il avait déjà rendue publique ? Souhaitait-il changer l'approche des évaluations des risques (avec le glyphosate comme rampe de lancement) ? Probablement toutes ces raisons, mais je crois qu'après la publication du classement du CIRC, sa motivation a été largement guidée par l'intérêt personnel et la cupidité.
Une chose est claire : son raisonnement n'a pas été guidé par le désir de faire avancer la science ou de faire en sorte que les décisions politique soient fondées sur une science solide !
Je ne peux m'empêcher de penser à l'énormité des doubles standards dans cette affaire. Christopher Portier a manifestement agi par intérêt personnel pour un contrat de consultation lucratif ; il n'a pas révélé qui le payait alors qu'il faisait du lobbying au plus haut niveau ; ses intérêts étaient alignés sur la croyance persistante que le glyphosate était cancérogène ; et il a amené les gens à croire qu'il était un expert du glyphosate. Ses actions agressives ont ruiné la confiance dans la science, la confiance dans les règlements et la confiance dans l'agriculture conventionnelle. Il s'est aligné sur une armée de lobbyistes et d'activistes intéressés qui accusent Monsanto de ce que Christopher a admis dans sa déposition avoir fait.
La science n'est pas du côté de Portier... pas du tout. La vérité n'est pas non plus de son côté. Ni les normes fondamentales de décence humaine.
Demain, j'irai donner une conférence et voir mon cardiologue. Cet article sera peut-être diffusé ; peut-être y aura-t-il une réimpression ou deux parmi ceux qui sont d'accord que la science doit être respectée. Les militants du lobby du bio vont largement ignorer tout cela et continuer à attaquer Monsanto (ils pourraient même dire, sur un ton machiavélique, que Chris avait besoin de faire tout cela pour amener les gens à voir à quel point Monsanto est horrible). Les fabricants de slogans astucieux dans le mouvement peuvent même élever Portier au niveau messianique parce que j'ai utilisé des adjectifs moins que polis (et je ferai l'objet d'attaques de gens payés pour haïr). D'ici la semaine prochaine, cela sera oublié et j'écrirai quelque chose sur les perturbateurs endocriniens, par exemple.
Comment pouvons-nous sortir de ce récit outrageusement stupide ? Comment amener les gens à se réveiller et à voir que tout le mouvement pour interdire le glyphosate, nuire aux agriculteurs et affecter les consommateurs a été fondé sur la cupidité et les mensonges ? Comment pouvons-nous amener les régulateurs à faire preuve de courage et à faire leur travail ?
Je ne peux pas répondre à cette question... Je ne peux qu'espérer que d'autres commencent à poser aussi de telles questions.
Ceux qui suivent le Risk-monger auront remarqué les attaques dont j'ai fait l'objet ces dernières semaines, en particulier dans les médias belges et français, en lien avec la campagne anti-glyphosate, avec des affirmations sans fondement selon lesquelles je serais le porte-étendard du lobbying de Monsanto. Ils se rappelleront que j'ai commencé à critiquer la monographie 112 du CIRC il y a plus de 30 mois, juste après la publication des conclusions sur le glyphosate et que les médias dominants ne se sont intéressés au scandale du CIRC-gate qu'un an plus tard, et seulement après que les activistes aient réussi à faire fermer mon ancien blog à cause de ma défense du glyphosate. Ils verront les attaques quotidiennes contre moi sur les réseaux sociaux (hier environ 300 insultes sur mon compte twitter), et je m'émerveille devant le fait que je puisse me sentir conforté dans mes positions par la lecture de la déchéance infamante de Portier.
Je me sens vraiment triste.
Triste pour ce que ces activistes ont fait à la réputation de la science.
Triste pour la perte de confiance du public dans les agences régulant les produits phytosanitaires.
Triste pour la façon dont les agriculteurs ont été laissés sans voix et perdus dans le brouhaha des attaques opportunistes du lobby du biobusiness.
Triste que la déposition de Portier ait été publiée il y a une semaine maintenant, et que je suis la première personne à attirer l'attention sur elle.
Triste que les régulateurs bruxellois voient cette information, mais continuent de s'orienter vers la sortie du glyphosate par crainte de la fureur de la foule chimiophobe que ce lobby a créée dans chaque capitale européenne.
J'ai honte quand je vois que des personnages comme Carey Gillam de l'USRTK, Martin Pigeon du CEO et Bart Staes du Parti Vert Européen se soient présentés hier au Parlement Européen pour condamner Monsanto et jeter le doute sur la sécurité du glyphosate alors qu'ils connaissent bien les mensonges et la tromperie qui sont issus du travail chaotique du CIRC et de Christopher Portier (assis à côté d'eux) et sur lesquels reposent toutes leurs campagnes.
Il est triste qu'ils ignorent aujourd'hui que toute leur attaque contre le glyphosate est fondée sur des mensonges et la cupidité et non sur des faits scientifiques ; et que, demain, Carey, Martin, Bart et des milliers d'autres lobbyistes activistes bien payés se lèveront de nouveau pour répandre toute leur haine et déployer toute leur énergie pour faire interdire un autre produit agricole utile, non pas pour des raisons environnementales ou de santé publique, mais simplement pour gagner... pour gagner une campagne cynique financée par une industrie qui construit son marché sur la peur du public.
Il est triste de penser que demain je vais me lever à nouveau, en vain, pour essayer d'amener les gens à voir ces mensonges et cette cupidité.
Je suppose que l'intégrité ne paie pas le loyer.
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* David pense que la faim, le SIDA et des maladies comme le paludisme sont les vraies menaces pour l'humanité – et non les matières plastiques, les OGM et les pesticides. Vous pouvez le suivre à plus petites doses (moins de poison) sur la page Facebook de Risk-Monger.
Source : https://risk-monger.com/2017/10/13/greed-lies-and-glyphosate-the-portier-papers/
Extrait de "Audition de Monsanto sous haute tension au Parlement européen" d'Euractiv.