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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Les mathématiques du blé et du pain

4 Août 2017 , Rédigé par Seppi Publié dans #Divers

Les mathématiques du blé et du pain

 

 

La récolte de blé s'achève, une nouvelle campagne de commercialisation commence.

 

Les consommateurs – dont certains sont experts dans l'art de donner des conseils aux agriculteurs et de définir la politique agricole qui devrait être celle de la France – savent-ils combien ils paient l'agriculteur quand ils achètent une baguette ?

 

Figurez-vous que trouver les données sur la toile n'est pas chose facile ! On peut raisonnablement supposer que la chose n'intéresse pas grand monde... le coût de nos aliments de base n'est plus un problème sauf pour ceux qui tirent le diable par la queue (et qui ne sont probablement pas de bons « clients » pour l'internet). Mais on peut aussi regretter que la profession agricole ne soit pas plus active.

 

L'idée de ce billet nous a été donnée par notre ami allemand Willi l'Agriculteur, qui nous a aiguillés vers le site food-monitor, qui a pris ses informations au Rheinischer Landwirtschafts-Verband (RLV – association rhénane de l'agriculture), qui a pris...

 

Nous prendrons une partie des informations du web pédagogique – en persiflant qu'il ne connaît pas les règles de trois... Mais ne critiquons pas davantage : il s'est penché sur un problème intéressant avec des données et des résultats fort crédibles.

 

Un kilogramme de blé permet de faire 750 grammes de farine blanche. Ajoutez 450 grammes d'eau, 20 grammes de sel et la levure... de quoi faire en gros 1.200 grammes de pâte, presque 5 baguettes de 250 grammes.

 

Le Ministère allemand de l'Agriculture et de l'Alimentation indique qu'il faut 850 grammes de blé « du champ » pour produire un kilogramme de pain de froment. Ce qui donne 1,18 kilogrammes de pain pour 1 kilogramme de blé. Les chiffres sont similaires.

 

Ajoutons que ces 850 grammes correspondent à 17.000 grains de blé. Un grain de blé = 0,05 gramme. En agriculture, on travaille beaucoup avec le poids de 1.000 grains. Ici, c'est 50 grammes (c'est beaucoup – la FAO donne une fourchette de 35 à 50 grammes).

 

Selon une estimation récente, la récolte française de 2017 se situerait à 70,4 quintaux/hectare, proche de la moyenne quinquennale de 70,9 quintaux/hectare pour 2012-2016 (très impactée par la mauvaise récolte de 2016 ; elle était à 73,9 l'année dernière et évolue normalement autour de 73 quintaux/hectare). Mais il faut bien manger l'année prochaine, donc ressemer. Enlevons 150 kilogrammes pour la semence. Il reste 69,4 quintaux.

 

Un hectare fournit donc 6940 kilogrammes de blé, soit 34.700 baguettes.

 

En juin 2017, la tonne de blé était payée en moyenne 148 euros au producteur. Au même prix, l'agriculteur toucherait 1027 euros pour sa nouvelle récolte.

 

Divisez par 34.700, et cela fait... 0,0296 euro par baguette.

 

L'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires donne 0,18 euros au kilo de baguette pour le blé (soit 0,045/baguette), mais ce prix inclut les coûts de l'organisme stockeur.

 

Le site France-inflation donne le prix de la baguette au premier trimestre de 2017 à 0,87 euro, quasi stable depuis 2011/2012. La part de l'agriculteur dans le prix de la baguette est donc de 3,4 %. Le food monitor allemand annonce 4 %.

 

Il est une autre donnée importante en ces temps d'États Généraux de l'Alimentation : si on doublait le prix payé à l'agriculteur pour son blé, sans répercussion sur les marges des intervenants suivants de la filière, la baguette augmenterait de... 3 centimes.

 

Avant de sauter sur les cibles favorites de la contestation que sont les intermédiaires, il faut souligner qu'ils ont aussi des frais et des charges. Ainsi, le site boulangerie.net a calculé des salaires et charges salariales équivalant à 53 % du prix de la baguette en 2011.

 

D'après le site France-inflation, la consommation moyenne de pain serait de 153 grammes par jour. Le Figaro a donné 120 grammes par jour pour 2015. Avec un hectare de blé, l'agriculture fournit donc la consommation annuelle de pain de 198 personnes. Exprimé autrement, il faut 50,5 mètres carrés pour fournir le pain d'un Français.

 

Bien entendu, si on passe au bio, les données changent. Le rendement était de 29 quintaux/hectare en 2015 ; enlevez 200 kilogrammes pour la semence (il en faut plus en bio), et vous fournissez le pain de 77 personnes seulement ; leur empreinte « pain » passe à 130 mètres carrés/personne, 2,6 fois plus. Qui dit que l'agriculture biologique est respectueuse de l'environnement ?

 

 

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S
Hallucinant cette conclusion. Le reste de l’article est très bien étayé et sourcé, et la conclusion se base juste sur le bio a besoin de plus de surface (limite une tautologie, pas besoin de source là) et que donc ce n’est pas respectueux de l’environnement. A vomir. <br /> Enfin bref d’autres l’ont déjà signalé et j’ai lu votre défense. C’est pauvre. Dommage. Le coup du déplacement de la fertilité causée par le méchant cultivateur bio... la perte de crédibilité. Aïe.
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C
Il y a en effet un raccourci qui me laisse pantoise. Dommage, le reste de l'article était intéressant. L'auteur aurait été plus avisé d'aborder l'aspect politique. Pourquoi n'augmente-t-on pas le pain, ni le pouvoir d'achat de l'agriculteur ? Parce que, ce faisant, il faudrait augmenter les bas salaires. En fait, l'augmentation du prix du pain est la clé de voûte de la révolution !
S
@ Slyslewslown le lundi 13 avril 2020 à 13:52<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire.<br /> <br /> C'est bien d'admettre que le bio a besoin de plus de surface. Quant à la suite, difficile de lutter contre des croyances indurées.
M
Quel raccourci fallacieux cette conclusion !<br /> Faut pas avoir honte pour résumer l'impact environnemental à la surface cultivée, sans jamais mentionner les apports chimiques et l'impact de leur production.<br /> Du coup on se demande si le reste de l'article est aussi biaisé.
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C
Bien d'accord avec vous Manu. La mauvaise foi de la conclusion fait douter du reste de l'article. Pourtant les chiffres sont justes, j'e les ai vérifiés avec d'autres sources. Un agriculteur-boulanger qui travaille en bio, fait son blé et fait son pain ne gagne que 26000€ à l'hectare, frais non déduits (salaires, stockage, commercialisation, entretien, assurances, emballages, transport). Donc, pour gagner sa vie, il faut au moins 3 hectares. Toutefois, sachant que les cultures doivent tourner, il est préférable de disposer de 4 ou 5 hectares.
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire.<br /> <br /> Non, la conclusion n'est pas un raccourci fallacieux.<br /> <br /> Oui, une "empreinte pain" qui passe de 50,5 mètres carrés par consommateur/habitant à 130 mètres carrés est un facteur important pour juger des empreintes écologiques respectives. C'est une augmentation d'un facteur 2,57. C'est passer de le superficie d'un petit département comme le Haut-Rhin ou le Rhône au sixième plus grand département métropolitain, la Saône-et-Loire.<br /> <br /> Oui, il faut aussi tenir compte des impacts des intrants et des itinéraires techniques.<br /> <br /> Mais sans oublier que quand un agriculteur bio épand de la matière organique de son élevage, il déplace de la fertilité des prairies vers son champ, appauvrissant l'un pour enrichir l'autre. Et quand la matière organique provient d'élevages conventionnels, il apporte pour partie des engrais "chimiques" qui sont devenus "organiques" par le passage par l'estomac d'un animal. Les choses ne sont pas simples...<br /> <br /> Et non, votre réticence à accepter la constatation finale n'influe en rien sur ce qui précède. Vous aurez peut-être remarqué que j'ai fait l'effort de citer à chaque fois deux sources pour montrer que les affirmations ne sont pas invraisemblables.<br /> <br /> <br /> <br /> pour fournir le pain d'un Français. <br /> <br /> Bien entendu, si on passe au bio, les données changent. Le rendement était de 29 quintaux/hectare en 2015 ; enlevez 200 kilogrammes pour la semence (il en faut plus en bio), et vous fournissez le pain de 77 personnes seulement ; leur empreinte « pain » passe à 130 mètres carrés/personne, 2,6 fois plus. Qui dit que l'agriculture biologique est respectueuse de l'environnement ?
J
Conclusion totalement biaisées.<br /> Comment comparez vous la surface cultivée a l impact environnemental?<br /> Vous voulez parler environement, intégrez donc tout les intrants dans vos calculs, calculez la perte de productivité du sol en agri traditionnelle. A et pourquoi pas le nombre de gramme de pesticide ingéré par an par habitants.
Répondre
A
100% d'accord avec Johnn<br /> L'impact environnemental et moindre en bio voir en permaculture.<br /> Ainsi que les couts de production car en traditionnelle il faut sans cesse nourrir le sol qui est appauvrie .