Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Agriculture biologique : une fabrique du mensonge !

5 Mai 2017 , Rédigé par Seppi Publié dans #Agriculture biologique, #critique de l'information, #Activisme

Agriculture biologique : une fabrique du mensonge !

 

 

GAGNANT catégorie Cycle 2: Ecole des Cèdres d’Aurheillan (65)

Générations Futures – la petite entreprise incorporée sous forme d'association loi 1901 et qui a pour « partenaires » des grands noms du commerce et de l'industrie du bio – a mis en ligne les dessins du concours « Mon jardin au naturel » organisé en partenariat avec la FCPE et Kokopelli (voir ici, notre coup de gueule). Si la grande majorité des productions est plutôt neutre, il y a tout de même celle-ci, de l'École des Cèdres d’Aurheillan (65). Elle a bien sûr été primée par un «  jury composé de membres des trois associations partenaires » (Kokopelli... association ?...).
 

 

Nos pérégrinations sur la toile nous ont amenés à The Organic Center, une entité états-unienne qui dit être une organisation à but non lucratif de recherche et d'éducation. C'est un diverticule de The Organic Trade Association, autrement dit le lobby (utilisons donc ce mot qui fâche) du bio états-unien.

 

Montage fort classique : optimisation fiscale plus écran de fumée pour les visiteurs qui croient consulter une source d'informations neutre, objective, et sans liens d'intérêts.

 

Le TOC affirme ainsi péremptoirement qu'il est « votre source de référence, fiable, d'informations sur la recherche scientifique sur les produits et l'agriculture biologiques ». Il ne faut pas chercher loin pour s'apercevoir que c'est une officine qui fait la promotion des effets – forcément et exclusivement – bénéfiques du bio pour la santé et l'environnement. Y compris par le dénigrement de l'agriculture conventionnelle et de ses produits. En définitive, rien que de très ordinaire en ce bas monde.

 

Un article a retenu notre attention : « Organic mixed cropping systems have high energy efficiency » («les systèmes de cultures mixtes biologiques ont une efficacité énergétique élevée).

 

En voici le texte (nous coupons en paragraphes) :

 

« De nouvelles recherches menées en Allemagne montrent que les systèmes de cultures mixtes biologiques ont une efficacité énergétique plus élevée que de multiples autres systèmes agricoles. L'article, publié dans European Journal of Agronomy, a examiné les différences d'efficacité énergétique entre les cultures mixtes biologiques et conventionnelles, l'agriculture arable et les systèmes agroforestiers.

 

L'efficacité de l'utilisation de l'énergie est un indicateur important de l'impact environnemental, de la consommation de ressources et de la performance économique d'un système agricole.

 

Les résultats ont montré que l'agriculture mixte biologique a surpassé d'autres systèmes dans le contexte de l'efficacité de l'utilisation de l'énergie, du rendement en matière sèche et de la production d'énergie. "Sur la base des résultats, nous avons conclu que l'agriculture mixte est l'une des meilleures façons de produire de la nourriture avec une efficacité énergétique élevée dans les conditions de l'agriculture biologique", ont écrit les chercheurs. »

 

L'article, mis en lien, c'est « Effects of changing farm management and farm structure on energy balance and energy-use efficiency—A case study of organic and conventional farming systems in southern Germany » (effets de l'évolution de la gestion de la ferme et de la structure de la ferme sur le bilan énergétique et l'efficacité de l'utilisation de l'énergie – une étude de cas sur des systèmes agricoles biologiques et conventionnels dans le sud de l'Allemagne), de Hung-Chun Lin, Julia A. Huber, Georg Gerl, Kurt-Jürgen Hülsbergen. Trois auteurs sont de l'Université Technique de Munich, chaire d'agriculture biologique et de systèmes agricoles, le quatrième du Centre Helmholtz de Munich qui a accueilli les essais dans son domaine de Scheyern.

 

L'article se trouve derrière un péage. Il ne nous sera donc pas possible de donner des détails, en particulier sur le sens exact à donner aux différentes expressions.

 

Selon un des « points forts » du résumé, « Les systèmes mixtes biologiques présentaient l'efficacité de l'utilisation de l'énergie (EUE) la plus élevée ».

 

Est-ce bien vrai ? Voici le résumé de l'article :

 

« L'apport en énergie fossile, la production d'énergie et l'efficacité de l'utilisation de l'énergie (EUE) sont des indicateurs importants des effets environnementaux, de la consommation de ressources et de la performance économique des systèmes agricoles. Dans cette étude, le bilan énergétique (analyse de processus) et l'EUE de différents systèmes agricoles biologiques et conventionnels – agriculture mixte [polyculture-élevage ?], agriculture arable et agroforesterie – ont été analysés en raison de leur importance en Allemagne. L'analyse a été fondée sur des essais à long terme dans la ferme expérimentale Scheyern, dans le sud de l'Allemagne.

 

Les résultats ont montré que la conversion d'une agriculture mixte biologique multi-structurée en un système spécialisé d'agriculture arable biologique réduisait légèrement l'apport d'énergie fossile dans la production végétale (de 5,9 à 5,5 GJ/ha/an), mais a considérablement réduit le rendement en matière sèche (de 5,4 à 2,5 t/ha/an), la production d'énergie (de 99 à 46 GJ/ha/an) et l'EUE (de 16,8 à 8,3). L'amélioration de la gestion du système conventionnel d'agriculture arable (avec des variétés à haut rendement et une meilleure gestion de N) a réduit l'apport énergétique de 14,0 à 12,2 GJ/ha/an, augmenté la production d'énergie de 155 à 179 GJ/ha/an, et relevé l'EUE de 11,1 à 14,6. L'établissement d'une agroforesterie avec des arbres à rotation courte (sans fertilisation ni utilisation de pesticides) a entraîné une réduction de l'apport énergétique.

 

Sur la base des résultats, nous avons conclu que l'agriculture mixte est l'une des meilleures façons de produire de la nourriture avec des EUE élevés dans les conditions de l'agriculture biologique. Par conséquent, la conversion d'une agriculture mixte biologique en un système d'agriculture arable biologique n'est pas recommandée. Nos résultats pour l'agroforesterie provenaient de la première étape d'un essai à long terme; il n'a montré aucun effet négatif sur le rendement en matière sèche et la production d'énergie et des effets positifs sur l'efficacité de l'utilisation de l'énergie à ce stade. Cependant, d'autres recherches sont nécessaires pour connaître l'influence à long terme de l'agroforesterie. »

 

Mettons tout cela sous forme de tableau avec une terminologie moins alambiquée, que nous espérons juste.

 

 

Apport d'énergie (GJ/ha/an)

Production matière sèche (t/ha/an)

Production d'énergie

(GJ/ha/an)

Efficacité de l'utilisation de l'énergie (EUE)

Conventionnel sans élevage

14.0

[8,4]

155

11,1

Conv. sans élevage optimisé

12,2

[9,7]

179

14,6

Polyculture-élevage bio

5,9

5,4

99

16,8

Polyculture sans élevage bio

5,5

2,5

46

8,3

 

Nous avons inséré entre crochets la production estimée de matière sèche des systèmes conventionnels en utilisant le ratio énergie/matière sèche du bio.

 

Avez-vous relevé les arnaques ? Car il s'agit bien de cela ! L'omission de la production de matière sèche pour les systèmes conventionnels – des chiffres « parlants » pour les spécialistes – n'est qu'un péché véniel.

 

La grosse – l'énorme – arnaque a consisté à comparer le « bio » à des systèmes conventionnels sans bétail, donc sans fumure organique d'origine animale à mettre dans les champs (nous répéterons incidemment : au détriment des prairies si celles-ci ne reçoivent pas un complément de fertilisation). Les chiffres à comparer sont, pour l'EUE, les 8,3 du bio sans élevage (que l'on doit considérer comme optimisé vu l'affiliation des auteurs à une unité de recherche sur le bio) et 14,6 du conventionnel optimisé sans élevage.

 

Insistons : le conventionnel sans élevage a une efficacité d'utilisation de l'énergie de 76 % supérieure au bio sans élevage.

 

La liste des points forts est aussi éclairante :

 

« Les bilans énergétiques des systèmes agroforestiers biologique(s) et conventionnel(s) ont été présentés. »

 

Oui, mais pas dans le résumé (nous avons mis « (s) » ne sachant pas combien de systèmes il y avait).

 

« L'agroforesterie peut réduire l'apport énergétique et améliorer l'efficacité de l'utilisation de l'énergie (EUE). »

 

C'est un « peut... », et c'est pour des résultats préliminaires.

 

« Les systèmes mixtes biologiques présentaient l'efficacité de l'utilisation de l'énergie (EUE) la plus élevée. »

 

C'est l'objet de ce billet.

 

« L'amélioration de la gestion des exploitations a augmenté les EUE et a maintenu des performances élevées. »

 

Ce n'est pas dans le résumé, et c'est une conclusion qui ressortit à la lapalissade.

 

Mais on aura aussi remarqué qu'il n'y a strictement rien sur les aspects défavorables au bio. En particulier, en partant de notre estimation de la production de matière sèche du conventionnel optimisé, le bio est dans ces essais à quelque 56 % (avec élevage – lui-même moins performant qu'il ne le serait en conventionnel) et 26 % du conventionnel.

 

Il ne faut pas prendre ces chiffres pour une vérité d'Évangile : ce sont des résultats d'essais dans des conditions particulières. Mais ils donnent des indications. Si on les prend à leur valeur faciale, ce qu'ils disent, est ceci : si nous succombons aux lubies à la mode en matière agricole et alimentaire – bio et végan  [correction du 5 mai 2018 : voir le fil de commentaires ci-dessous] – il faudra quatre fois plus de surface arable pour produire la même quantité de nourriture.

 

On rétorquera peut-être qu'une partie de la production actuelle part à l'alimentation animale, ce qui dégagera des surfaces, mais cela vient aussi avec un bouleversement considérable des rotations. Ainsi, les légumineuses comme le trèfle et la luzerne ne serviraient plus que comme engrais verts.

 

Quant au TOC, son mensonge le plus grossier est peut-être :

 

« Les résultats ont montré que l'agriculture mixte biologique a surpassé d'autres systèmes dans le contexte [...] du rendement en matière sèche et de la production d'énergie. »

 

Un rendement, grosso modo, de moitié celui de l'agriculture conventionnelle dans les essais en question... La moitié est supérieure au double, en résumé !

 

Ainsi va la « recherche » sur le bio. Ainsi va l'« information » sur nombre de sites qui font la promotion du bio...

 

 

« Les classes gagnantes vont recevoir des graines bio à semer de chez Kokopelli ainsi qu’une affiche du film “Zéro phyto 100% bio” », est-il dit !

Voici ce qui risque d'être durablement affiché dans une salle de classe et d'imprégner de petits cerveaux (y compris la publicité liminaire du bandeau du bas de l'affiche).

 

 

Résultat de recherche d'images pour "Zéro phyto 100% bio affiche"

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
W
Bonjour merci pour cet article mais quel est rapport avec la "lubie vegane" ?
Répondre
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre réponse.<br /> <br /> Le véganisme qui accepte ce que le bio refuse nous met, dans l'article commenté ci-dessus, dans la rubrique "conventionnel sans élevage". Vous avez raison... et je corrige.
W
D'accord merci, c'est dû au fait que les animaux peuvent valoriser de la matière non commestible pour nous ? Au manque de matière organique a retourner au champs ? Dans ce dernier cas n'est ce pas possible de jouer le rôle de l'animal avec du "fumier humain" ?<br /> Enfin, pourquoi associer végane et bio, il n'y a absolument aucun rapport non ?<br /> Témoignage personnel (donc sans grande valeur mais que je partage quand même), les véganes que je connais n'ont rien de spécial contre "la chimie" au contraire, ont une bonne opinion des ogms, ainsi que de l'électricité nucléaire ou des vaccins si on veut faire dans le cliché.
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire et votre question.<br /> <br /> si nous succombons à la lubie vegane, nous nous retrouverons -- au mieux -- dans le scénario "polyculture sans élevage bio" -- à moins d'envisager l'hypothèse d'un véganisme qui ne serait pas bio. On se retrouve avec une production d'énergie qui représente le tiers ou le quart de celle de l'agriculture conventionnelle.
L
Pathétique cet article ! Du bio-scepticisme à l'état pur, sans fondements ni argumentation concrète. La critique pour la critique et alors on fait quoi maintenant ? des propositions ?
Répondre
C
Votre remarque, Léo, décrit beaucoup mieux votre propre commentaire que le billet en question. Que fait-on? On commence par redevenir rationnel, on n'élimine pas par principe tout une série de solutions possibles par pur dogmatisme. On ne s'insurge pas contre Coca-Cola Ou Kellogg's embrigadent dans les écoles pour aussitôt applaudir des deux mains lorsque l'industrie de la bio fait de même. Ce serait un bon début.
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour votre commentaire.<br /> <br /> Il est toujours instructif de voir que l'idéologie, les partis pris et les préjugés résistent à la confrontation avec l'évidence (documentée, démontrée et expliquée).<br />
Y
Superbe le champignon choisi pour le dessin!!!<br /> il ressemble à la perfection aux Psilocybe bien connu de ceux qui veulent "halluciné".(a ce niveau de ressemblance le hasard n'a plus de place).<br /> Il est classé comme stupéfiant en France. <br /> De vrai clowns (tristes) ces intégristes de l'AB.
Répondre
S
Bonjour,<br /> <br /> Merci pour cette remarque.<br /> <br /> Effectivement !<br />