Perturbateurs endocriniens : le naufrage militant de Mme Barbara Demeneix
Pour la réalité aux USA: " Quelles multinationales financent Greenpeace ". En France ? Mystère
Dans « Perturbateurs endocriniens : le scandale de scientifiques se livrant à la diffamation collective », nous avions dénoncé une tribune – d'une remarquable indigence intellectuelle et éthique – d'une centaine de scientifiques (ou se prétendant tels) ayant accusé leurs collègues ne pensant pas comme eux d'être, en bref, des mercenaires à la solde de l'industrie. La tribune, « Perturbateurs endocriniens : halte à la manipulation de la science », avait été publiée dans le Monde le 20 novembre 2016 (c'est la date que porte l'article sur Internet).
La première signature était de M. Andreas Kortenkamp, et nous avons vu qu'il ne pouvait guère se prévaloir d'une virginité en termes de conflits d'intérêts. La deuxième était de Mme Barbara Demeneix, dont on avait constaté, avec Forumphyto, que « les déclarations publiques de la chercheuse B. Demeneix incitent à élargir le marché de l’entrepreneuse Barbara D. »
Cette lamentable manœuvre tendant à influencer la politique communautaire sur la gestion des perturbateurs endocriniens a pris un nouveau pli avec « En 10 ans le QI moyen de la France a chuté de près de 4 points, et voici ce qui est en cause » publié sur Atlantico le 1er février 2017.
Droit au but, à la conclusion de l'interview de Mme Demeneix (c'est nous qui graissons) :
« Nous avons démontré que la proximité avec des zones utilisant des pesticides entraine un risque plus élevé de développer des troubles neurologiques à la naissance. – A l'échelle européenne, la législation interdisant les pesticides a encore été repoussée. Et cela malgré la forte volonté de Ségolène Royale en France, de la Suède, du Danemark. Pour convaincre les politiques au niveau européen, il faudrait s'engager auprès d’associations telles que WWF, Greenpeace, et écouter les scientifiques qui tirent la sonnette d’alarme depuis longtemps. »
Nous y voilà ! Après une carrière qui – pour nous qui ne sommes pas spécialistes de la question – paraît très honorable, Mme Demeneix s'est embarquée dans une lamentable aventure et tentative d'influencer un processus réglementaire ; et dans la promotion des adhésions à des organisations dites « non gouvernementales ».
Le paragraphe précité figurait déjà, tel quel, avec ses fautes d'orthographe, dans « Pourquoi la baisse de 4 points du QI moyen des Français entre 1999 et 2009 devrait nous faire changer d’urgence nos habitudes de consommation » du 25 juin 2016... Le militantisme est affirmé !
On pourrait s'arrêter là. Mais c'est que le point de départ de l'interview est aussi – disons – cocasse. C'est certes le journal, Atlantico, qui écrit :
« De nombreuses études montrent un recul général du quotient intellectuel moyen. En France, la population a perdu en moyenne près de quatre points de QI entre 1999 et 2009. Un phénomène inquiétant qui à pour cause de nombreux facteurs, notamment les perturbateurs endocriniens présents dans les pesticides. »
Toujours cette obsession des « pesticides »... Rappelons que ceux avec lesquels nous sommes le plus fréquemment en contact sont... domestiques. Mais en fait de « nombreuses études », il nous semble que le point de départ est « A negative Flynn Effect in France, 1999 to 2008–9 » de Dutton et Lynn.
Passé inaperçu lors de sa publication, l'article a fait une paire de piges dans les médias, notamment le Monde... de M. Stéphane Foucart. Le début de son propre article est fort pertinent :
« En 2015, Edward Dutton (université d’Oulu, Finlande) et Richard Lynn (université d’Ulster, Royaume-Uni) publiaient, dans la revue Intelligence, une étude, passée inaperçue, mais dont les journaux auraient, peut-être, pu faire quelques manchettes. L’affaire est en effet d’une importance cardinale : les deux chercheurs documentaient, pour la première fois, une chute du quotient intellectuel (QI) moyen en France. Selon leurs estimations, ce dernier aurait perdu près de quatre points entre 1999 et 2009. A l’échelle d’une population, c’est énorme.
Ce genre de travaux essuie généralement un haussement d’épaules ou un revers de main. D’autant plus qu’en l’occurrence les auteurs ont fondé leurs calculs sur un petit échantillon de quatre-vingts personnes. Mais, à bien y regarder, l’étude des deux chercheurs britanniques mérite au contraire toute notre attention. »
« ... quatre-vingts personnes... » – en fait 79, âgées de 30 à 63 ans ? Poubelle (normalement)...
Mais non ! M. Foucart lui a trouvé une vertu exprimée dans son titre, « Le cerveau assiégé par les perturbateurs endocriniens » et résumée dans le chapô :
« Les perturbateurs endocriniens n’ont pas seulement des incidences sur les maladies hormonales "classiques". Ils ont aussi un impact sur nos cerveaux et notre quotient intellectuel. »
C'est d'autant plus intéressant que Dutton et Lynn, qui s'étaient aventurés à conjecturer des explications, n'avaient pas mentionné les perturbateurs endocriniens. Ils avaient en revanche évoqué, pour les écarter ou les minimiser, au moyen de quelques contorsions : la baisse de la qualité de la nourriture ; la baisse de qualité de l’éducation et du goût pour la lecture ; les familles les plus nombreuses qui ne seraient pas les plus favorables au développement de l’intelligence ; et l'immigration massive... on est dans le glauque...).
En fait, ce lien allégué avec les perturbateurs endocriniens est le thème central de « Le Cerveau endommagé: Comment la pollution altère notre intelligence et notre santé », un fort volumineux ouvrage de Mme Demeneix paru en mai 2016.
Mme Demeneix a ouvert un blog pour, essentiellement, recenser les activités médiatiques à l'appui de son livre et de sa thèse.
Elle vient donc de franchir un pas de plus en appelant, à nouveau, à « s'engager auprès d’associations telles que WWF, Greenpeace ».
Allez ! On se quitte ! Non sans avoir mentionné qu'en juillet 2016, la chaîne LCI a présenté un « débat » avec Mmes Stéphane Horel, Michèle Rivasi, Barbara Demeneix et M. Jean-Charles Bocquet. Extraordinaire : trois contre un ! Le titre sur Youtube est du reste explicite : « Trois Femmes et un Lobby des Pesticides ».
P.S. : On peut lire (ou relire) avec intérêt « Pesticides-QI = Euros : les calculs acrobatiques du CNRS » sur les acrobaties statistiques et économiques de « Neurobehavioral deficits, diseases, and associated costs of exposure to endocrine-disrupting chemicals in the European Union » de Martine Bellanger, Barbara Demeneix, Philippe Grandjean, R. Thomas Zoeller et Leonardo Trasande.