Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Cinq façons dont l'édition de gènes rend les cultures résilientes au climat

9 Février 2022 Publié dans #NGT

Cinq façons dont l'édition de gènes rend les cultures résilientes au climat

 

Joseph Maina*

 

 

Image : Un champ de blé souffre de la sécheresse aux Pays-Bas. Photo : Shutterstock

 

 

Notre monde subit des changements climatiques qui ont déclenché une série de perturbations calamiteuses sur la production agricole et la sécurité alimentaire globale.

 

Des dévastations causées par les typhons tropicaux aux sécheresses de plus en plus répandues et sévères, il semble que la nature annonce haut et fort sa volonté de nous fournir un nouvel ordre de marche. Dans le contexte agricole, les plantes et le bétail doivent faire face à une batterie de nouvelles conditions écologiques qui dépassent de loin leur rythme naturel d'adaptation.

 

« Les effets du changement climatique ont déjà commencé à se manifester et vont sans aucun doute s'aggraver », indique une étude publiée en septembre 2021 dans Frontiers in Sustainable Food Systems. « Des baisses mondiales de rendement et d'adéquation des cultures sont prévues au cours du siècle en tant que conséquences directes du changement climatique. »

 

Un certain nombre d'industries et de domaines scientifiques étudient des technologies innovantes pour atténuer les effets du changement climatique dans l'agriculture. L'une de ces méthodes est l'édition de gènes, une technique qui facilite les modifications programmables et très précises des génomes des organismes. Ces modifications peuvent consister à supprimer, réduire au silence ou insérer des gènes souhaités.

 

Voici cinq façons dont l'édition de gènes apporte à l'agriculture la résilience climatique dont elle a tant besoin :

 

 

1. Améliorer la tolérance à la sécheresse

 

Le stress de la sécheresse fait payer un lourd tribut à la productivité des cultures et constitue la première cause de pertes agricoles dans le monde. Grâce aux techniques d'édition de gènes, les scientifiques sont en mesure d'aider les plantes à s'adapter à divers stress abiotiques liés au changement climatique, notamment la sécheresse. Parmi les autres stress abiotiques figurent la salinité, les fluctuations de température (élevée/basse) et la présence de métaux lourds dans le sol.

 

Lorsque les plantes sont soumises à la sécheresse, elles présentent diverses caractéristiques pour s'adapter aux conditions. Afin d'aider les plantes à tolérer les stress abiotiques, y compris la sécheresse, les chercheurs identifient les gènes particuliers qui sont impliqués, puis modifient ces gènes pour faciliter la résilience des plantes.

 

« Certains gènes végétaux renforcent les effets délétères des stress abiotiques, ce sont les gènes de sensibilité (gènes Se) », indique un article intitulé « CRISPR-Based Crop Improvements : A Way Forward to Achieve Zero Hunger » (améliorations des cultures fondées sur CRISPR : une voie à suivre pour atteindre la faim zéro), publié dans le Journal of Agricultural and Food Chemistry.

 

« Les stratégies d'édition du génome, en particulier CRISPR-Cas, ont été utilisées dans plusieurs espèces végétales, y compris les céréales, des légumes et des fruits, pour améliorer la tolérance au stress abiotique en perturbant ces gènes Se. »

 

Des recherches sont également en cours pour utiliser l'édition de gènes fondée sur CRISPR pour améliorer la tolérance à la sécheresse chez le blé, le manioc, le papayer, la canne à sucre et le cotonnier.

 

 

2. Gestion des maladies

 

Le changement climatique peut accroître la gravité et la probabilité des maladies des plantes.

 

« On s'attend à ce qu'une majorité de maladies affectant les plantes et les animaux deviennent plus répandues avec le changement climatique », indique une étude publiée dans Frontiers in Sustainable Food Systems. « L'augmentation du nombre de vecteurs, la hausse des températures favorisant la reproduction des agents pathogènes et l'augmentation de la sensibilité des organismes hôtes aux agents pathogènes sont quelques-unes des nombreuses causes d'aggravation des maladies induites par le changement climatique. »

 

Pour contrer cette menace, les scientifiques s'efforcent de conférer une résistance aux maladies au bétail et aux cultures vivrières sans recourir aux insecticides et aux fongicides.

 

Par exemple, le virus de la striure du bananier est activé dans des conditions de stress telles que la sécheresse et la chaleur extrême, qui devraient accompagner le changement climatique en Afrique, en particulier dans les régions où les bananes sont largement cultivées comme une importante culture alimentaire. Pour contrer ce problème, une équipe de recherche dirigée par Mme Leena Tripathi, de l'Institut International d'Agriculture Tropicale de Nairobi, au Kenya, a été la première à appliquer la technologie d'édition de gènes CRISPR pour désactiver le virus de la striure du bananier chez les plantains.

 

 

3. Augmenter les rendements

 

Dans un contexte plus large, à quelques exceptions près, le changement climatique mondial risque de réduire le rendement des cultures et la productivité du bétail. Alors que les populations s'accroissent dans de nombreuses régions, augmentant ainsi la demande de nourriture, la baisse des rendements pourrait nécessiter le défrichage de davantage de forêts pour l'agriculture.

 

Si les techniques de sélection traditionnelles ont été utilisées dans le passé pour augmenter le rendement des cultures, la demande croissante de nourriture crée le besoin d'approches plus efficaces et plus rationnelles pour améliorer les cultures et obtenir de meilleurs rendements. La technologie CRISPR-Cas9 est la technique la plus prometteuse à ce jour pour répondre à ce besoin.

 

Un certain nombre de modifications génétiques ont permis de produire des cultures plus résistantes et aux rendements plus élevés. Dans le cas du riz, par exemple, la modification génétique a produit des lignées dont les rendements ont augmenté de 11 à 68 %. CRISPR/Cas9 a également été utilisé pour augmenter la taille des tomates, tandis que d'autres outils de modification ont contribué à augmenter la masse musculaire du bétail.

 

 

4. Survivre à la salinité du sol

 

La salinité du sol est un stress abiotique grave qui entrave la croissance des plantes et qui devrait s'aggraver avec le changement climatique.

 

« L'expansion des terres arables touchées par la salinité est apparue comme une menace majeure pour la sécurité alimentaire mondiale. Environ 6 % de la surface cultivée est détruite par la salinisation des sols, avec une augmentation continue de 1 à 2 % chaque année dans le monde, ce qui entraîne des pertes de rendement importantes pour les cultures céréalières de base comme le maïs, le riz et le blé », indique l'étude dans Frontiers in Sustainable Food Systems.

 

Le changement climatique s'accompagne souvent d'une raréfaction de l'eau, ce qui oblige les agriculteurs à utiliser une eau d'irrigation de moindre qualité qui peut contenir du sel, ce qui entraîne une augmentation de la salinité des sols. Les phytologues mettent au point des cultures qui peuvent mieux tolérer la sécheresse extrême et la salinité du sol. La salinité élevée du sol a affecté diverses cultures, comme les tomates commerciales. Les scientifiques ont maintenant utilisé avec succès CRISPR pour conférer aux tomates une forte tolérance à la salinité.

 

Dans un autre exemple, des scientifiques de l'Université Agricole de Huazhong et du Centre de Génétique Agrobiologique de Shanghai ont éliminé un gène dans le riz pour améliorer sa tolérance aux concentrations élevées de sel dans le sol.

 

 

5. Combattre les mauvaises herbes

 

Les herbicides, tout comme les insecticides et les fongicides, sont des produits chimiques importants dans l'agriculture mondiale. Leur valeur est susceptible de croître, étant donné qu'il a été constaté que le changement climatique modifie l'abondance et la distribution des insectes nuisibles et les dégâts qu'ils causent. Les mauvaises herbes, dont on peut dire qu'elles sont l'ennemi numéro un des agriculteurs, causent des dommages colossaux à l'agriculture mondiale, réduisant considérablement les rendements et les revenus des agriculteurs. En Inde, par exemple, des estimations ont montré que les mauvaises herbes réduisent le rendement des cultures de 31,5 %.

 

La lutte contre les mauvaises herbes a également un coût social. Dans de nombreux pays en développement, les femmes et les enfants sont chargés de désherber à la main, ce qui réduit leur capacité à aller à l'école ou à saisir des opportunités économiques.

 

Parmi les facteurs qui favorisent la prolifération des mauvaises herbes dans le contexte du changement climatique figurent l'augmentation des concentrations de dioxyde de carbone (CO2) et les modifications associées de la température et des précipitations mondiales.

 

« Les mauvaises herbes sont susceptibles de faire preuve d'une plus grande résilience et d'une meilleure adaptation aux changements des concentrations de CO2 et à l'augmentation de la température en concurrence avec les cultures, en raison de leur patrimoine génétique diversifié et de leur plus grande plasticité physiologique », indique une étude menée par le département d'agronomie de l'Université d'État du Kansas.

 

Il a également été démontré que les variations climatiques influent sur l'utilisation des herbicides, des insecticides et des fongicides en modifiant leur efficacité et leur persistance. L'une des solutions proposées pour atténuer le défi consiste à développer de nouveaux produits chimiques, car la tolérance des cultures aux produits chimiques devrait être réduite par le changement climatique.

 

L'édition de gènes constitue une solution efficace au problème. Dans un excellent exemple, les scientifiques ont utilisé l'édition de gènes par CRISPR pour développer un allèle tolérant à des herbicides dans le riz. En plus d'offrir aux agriculteurs une stratégie flexible et plus facile de gestion des mauvaises herbes, la résistance à des herbicides leur permet de pratiquer une agriculture sans labour (no till) ou à façons culturales réduites, ce qui contribue à réduire l'érosion des sols et à minimiser les émissions de gaz à effet de serre en réduisant la consommation de combustibles fossiles et la perturbation des sols.

 

________________

 

* Source : 5 ways gene editing is making crops climate-resilient - Alliance for Science (cornell.edu)

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article