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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Bio : douche froide, crise d'adolescence ou crise systémique ?

19 Février 2022 Publié dans #Agriculture biologique, #Economie, #Politique

Bio : douche froide, crise d'adolescence ou crise systémique ?

 

Glané sur la toile 914

 

 

Une excellente vidéo (source)

 

 

On s'intéresse assez ces jours à la crise du bio, bien que ce soit plutôt à bas bruit après les alertes de la fin janvier.

 

Sur Agriculture et Environnement, M. Gil Rivière-Wekstein nous propose une analyse, conforme à ses standards d'excellence, « Douche froide sur le bio ».

 

Un texte court qui relève essentiellement de la revue de presse. En conclusion :

 

« Il est donc assez cocasse de constater que certains candidats à l’élection présidentielle, certes assez hors-sol, tels Jadot, Mélenchon ou encore Zemmour, continuent à vouloir encourager les conversions au bio, alors que "le consommateur ne suit pas", comme le constate avec pertinence Frédéric Chartier, à la tête de deux poulaillers bio dans les Côtes-d’Armor. »

 

« ...cocasse » est un euphémisme...

 

 

(Source)

 

 

Dans l'Opinion du 17 février 2022, Mme Emmanuelle Ducros écrit en sur-titre « Ça eut payé » et en titre : « Après avoir beaucoup grandi, le marché du bio entame sa crise d’adolescence ».

 

En chapô :

 

« Les ventes de produits bio en grandes surfaces ont baissé de 3% en 2021. Une partie des produits, plus coûteux à produire, doivent être bradés. Pendant ce temps, l’offre ne cesse de croître. »

 

Pour étayer son analyse, Mme Emmanuelle Ducros fait beaucoup appel à Mme Emily Mayer, directrice de la prospective chez IRI, entreprise spécialisée dans l'étude de la grande consommation, et M. Philippe Goetzmann, spécialiste de la grande distribution.

 

Prix et pouvoir d'achat, concurrence de nouveaux produits comme les boissons végétales, concurrence des nouveaux signes de qualité comme la Haute Valeur Environnementale – que la filière bio combat avec énergie)...

 

« Mais le malaise est plus profond : dans les linéaires des hypers, l'émulation s’est tarie. En 2019, quand la croissance de la grande distribution reposait pour moitié sur le bio, 60 nouvelles références de produits de grande marque avaient été lancées (Chocapic, Babybel...). Des lancements trois fois moins nombreux en 2020. "Le bio représente, dans un hypermarché, 8% de l’assortiment et 5% du chiffre d’affaires, compte Emily Mayer. Il est moins rentable au mètre carré que les produits conventionnels. Quand le bio se vend moins bien, la tentation est forte d’en réduire les surfaces. Et donc, on en lance moins. Et donc, on le voit moins. Et donc, il se vend moins bien." Cercle vicieux. »

 

Mais que réserve l'avenir ?

 

« Il y a un déphasage entre l’offre primaire – abondante, et qui va l'être de plus en plus, maintenant que les conversions engagées en 2018 arrivent au bout de leurs trois ans de transition – et la demande. »

 

L'imprévoyance et la naïveté, à la fois des gouvernements va-t-en-bio et des instances de l'agriculture biologique... Mme Laure Verdeau, récemment nommée directrice de l'Agence Bio, opine :

 

« Pour l’instant, il n’y a pas de mouvement massif de retrait des agriculteurs bio [...] La France a perdu 2209 fermes bio l’an passé, la moitié pour départ à la retraite, la moitié pour renoncement. C’est 0,15% de plus qu’en 2019... Une proportion plus faible que dans les fermes conventionnelles. »

 

C'est du style de l'optimiste qui, chutant du 127e étage d'un gratte-ciel, trouve que tout va bien au niveau du 75e...

 

 

(Source)

 

 

Mme Laure Verdeau voudrait maintenant faire plus de pédagogie en mettant l’accent « sur les nuances plutôt que sur le noir et blanc ». Vraiment ?

 

« Le segment du bio doit expliquer comment il travaille, justifier sa différence de prix. C’est une agriculture dans laquelle la collectivité investit beaucoup. Les consommateurs, qui sont aussi des contribuables, doivent savoir à quoi cela sert : les effets positifs sur l’eau et sur la biodiversité, et sa plus forte intensité en emplois. »

 

Il faut sans doute nuancer : les contribuables – qui sont aussi des consommateurs, certains de produits bio, d'autres de produits conventionnels par choix ou obligation compte tenu de la minceur de leur pouvoir d'achat – doivent savoir à quoi ça sert.

 

 

(Source)

 

 

Dans un autre article, Mme Emmanuelle Ducros fait parler M. Laurent Pahpy, auteur de « Le mirage Bio » et contributeur de l'Institut Sapiens. Tout est dit, ou presque, dans le titre :

 

« Laurent Pahpy : "Le soutien public artificiel crée une crise de surproduction bio" »

 

et le chapô :

 

« Les prix restent trop élevés pour que cela devienne un mode de consommation de masse .»

 

S'agissant de l'avenir :

 

« […] Soit l’agriculture biologique demeure technophobe, refusant par exemple les technologies d'édition du génome pour obtenir des plantes plus résistantes aux ravageurs et plus productives, et elle sera condamnée à rester chère, militante, et à s’adresser à une niche de consommateurs. Soit elle engage une révolution mentale, révise son cahier des charges. Cela lui permettra de devenir plus productive, plus compétitive. Ce sera une façon de s’adresser à un public plus large. »

 

Manifestement, la filière biologique n'est pas prête à faire sa révolution culturelle. Quant à devenir plus productive... Peut-être en termes relatifs par le déclassement de l'agriculture conventionnelle en application de la stratégie européenne « de la ferme à la table » et d'autres fantaisies.

 

 

(Source)

 

 

D'autres médias se sont aussi emparés du sujet. Citons le Parisien avec « Crise des Amap : Sophie n’arrive plus à écouler ses paniers de légumes bio et "cela met la ferme en danger" » (réservé aux abonnés).

 

En chapô :

 

« Installée depuis 2017 à Servon, en Seine-et-Marne, Sophie Van de Velde alimente deux Amap en Île-de-France. C’est la première fois cette année qu’il lui manque des adhérents. »

 

 

(Source du premier)

 

 

Ou encore Ouest-France et « À Rennes, Scarabée Biocoop face à "une situation préoccupante" » (derrière un péage).

 

En chapô :

 

« La société coopérative a vu la fréquentation de ses magasins et restaurants baisser depuis l’été. Elle appelle ses adhérents à se mobiliser pour revenir consommer chez Scarabée. »

 

Ces deux titres illustrent le fait que la crise est généralisée, systémique. On ferait bien de la prendre au sérieux dans les milieux dotés d'un pouvoir de décision.

 

 

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