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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Séralini absent lors de la conférence sur l'agro-écologie au Kenya, mais...

27 Juin 2019 , Rédigé par Seppi Publié dans #Activisme, #Agriculture biologique, #Agro-écologie, #Gilles-Éric Séralini

Séralini absent lors de la conférence sur l'agro-écologie au Kenya, mais…

 

Verenardo Meeme*

 

 

Le professeur Gilles-Éric Séralini, dont les recherches maintenant discréditées ont contribué à la décision du Kenya d’interdire les organismes génétiquement modifiés (OGM) en 2012, n’a pas assisté à une conférence internationale sur l’agro-écologie à Nairobi cette semaine pour faire part de ses travaux.

 

Le scientifique français, dont le papier sensationnel selon lequel le maïs OGM provoquait des tumeurs chez le rat, a été rétracté par le journal qui l'avait publié et ensuite réfuté par trois études européennes indépendantes, avait été présenté comme l'un des principaux orateurs de la conférence. L’événement a eu lieu alors que les autorités kényanes se demandent s'il convient d'annuler l’interdiction des OGM imposée par le pays en partie sur le fondement de ce document.

 

Le gouvernement du Kenya a annoncé fin avril qu'il réexaminait l'interdiction, alors que plus d'un million de ses citoyens ont besoin d'une aide alimentaire humanitaire d'urgence en raison de la sécheresse prolongée. Des scientifiques kényans mènent actuellement des recherches sur le terrain sur un maïs GM résistant à la sécheresse et à des insectes, ainsi que sur le cotonnier, le sorgho et le manioc génétiquement modifiés.

 

Bien que Séralini ait finalement fait une présentation par vidéoconférence, les scientifiques kényans et internationaux participant à la conférence avaient des points de vue tout à fait opposés sur l'utilisation et la sécurité des OGM.

 

Mais tous les scientifiques ont convenu que le système alimentaire devait être renforcé en Afrique et que tous les efforts devaient être déployés pour soutenir l'agriculture.

 

Le Dr David Amudavi, expert en éducation des adultes et vulgarisation chez Biovision Africa Trust, a plaidé en faveur de l’adoption par le Kenya de systèmes de production agricole postérieurs aux années 1990, affirmant qu’ils sont sûrs et durables. Mais le professeur Ratemo Michieka, expert en malherbologie et en environnement à l'Université de Nairobi, a exprimé son désaccord, affirmant que de nombreux outils agricoles devaient être utilisés pour produire suffisamment d'aliments sûrs pour la population sans cesse croissante.

 

« Les cultures génétiquement modifiées telles que le cotonnier Bt qui fait l’objet d’essais sur le terrain au Kenya ont un mécanisme intégré pour lutter contre des ravageurs et c’est un grand pas en avant dans la réduction de l’utilisation des pesticides », a déclaré Michieka. « La santé des cultures fait face à de nombreuses menaces et elle est importante pour la sécurité alimentaire et la durabilité environnementale. »

 

Les rendements des cultures vont diminuer à mesure que la température de la saison de végétation augmente en raison du changement climatique, a averti Michieka. Les insectes nuisibles, qui consomment déjà entre 5 et 20 pour cent des principales cultures céréalières, peuvent exacerber les pertes.

 

En marge de la conférence, Robert Wager, biologiste moléculaire à la Vancouver Island University au Canada, s'est dit d'accord avec Michieka, affirmant que les OGM sont cultivés et consommés dans le monde entier et qu'ils ont un bilan de sécurité fantastique. En fait, en raison des tests et de la réglementation, ils sont plus sûrs que les cultures conventionnelles, a-t-il déclaré, notant que les cultures Bt, par exemple, présentent un niveau de contamination fongique moins élevé et donc moins de toxines fongiques.

 

Wager, intervenant dans le débat sur les pesticides qui faisait partie des priorités de la conférence, a déclaré que le glyphosate, comme d’autres pesticides, avait été mal utilisé. Il doit être utilisé de manière appropriée afin de minimiser sa propagation dans les zones non ciblées.

 

« Les anti-OGM ont commencé leurs présentations en discréditant les régulateurs, car ce sont eux qui veillent à ce que la science soit sûre », a observé Wager. « Si vous ne faites pas confiance aux régulateurs, vous risquez d'ignorer ce qu'ils disent. Le fait est que les OGM sont réglementés de la même manière dans le monde avant leur commercialisation » et ce fait a été ignoré dans les exposés anti-OGM.

 

« La biotechnologie est une science complexe et, malheureusement, ceux qui ne sont pas familiarisés avec la science sont souvent induits en erreur par des arguments émotionnels, par opposition à des arguments scientifiques », a-t-il déclaré.

 

Bien que certains des discours de la conférence aient pu sembler scientifiques pour la moyenne des participants, ils ne l’ont pas été, a déclaré Wager à la presse kenyane. « Cela a un impact significatif sur les pays qui hésitent à envisager l'utilisation de cette technologie. Cela met beaucoup de pression sur les gouvernements lorsque cette peur est générée par la désinformation et qu'elle se répand. »

 

Lors de la conférence, Wager et d'autres scientifiques ont convenu que l'agriculture biologique ne peut à elle seule nourrir la population croissante, mais que certaines pratiques doivent être intégrées dans les systèmes d'exploitation.

 

Michieka et Wager ont convenu que les agriculteurs du monde entier devaient utiliser le meilleur de toutes les formes d'agriculture, y compris le mode biologique, la gestion intégrée des pesticides, les OGM, les hybrides conventionnels et les cultures modifiées par édition de gènes, si l'on veut qu'ils produisent suffisamment de nourriture pour nourrir la population croissante de la planète sur la même surface ou une surface diminuée.

 

La 1ère Conférence Internationale sur l'Agro-écologie intitulée : « Transformer l'agriculture et les systèmes alimentaires en Afrique » a réuni des scientifiques locaux et internationaux, ainsi que des acteurs de l'agriculture de différents pays. Elle a été présentée comme un forum permettant d'intensifier la pratique de l'agro-écologie, considérée par certains comme une impasse pour l'Afrique, et de promouvoir le commerce des produits biologiques. Outre Séralini, les Américains Tyrone Hayes et Don Huber faisaient partie de la liste des opposants aux OGM.

 

La présence de Séralini avait été prévue en raison du rôle de premier plan que son étude sur les rats avait joué dans l’interdiction des OGM au Kenya en 2012. Comme l'a rapporté Forbes, Beth Mugo, alors Ministre de la Santé Publique du Kenya, avait cité l’étude de Séralini, établissant un lien entre le cancer chez le rat et la consommation de maïs GM résistant à un herbicide, en recommandant une interdiction immédiate les produits génétiquement modifiés ainsi que les importations. L'Institut de Recherche Médicale du Kenya, qui relève du Ministère de la Santé Publique, avait également soutenu l'interdiction fondée sur l'étude Séralini. Le Président avait accepté la recommandation de Mugo et décrété l’interdiction.

 

Depuis lors, la revue Food and Chemistry Toxicology a rétracté l'article après que les auteurs ont refusé de le retirer et trois études distinctes financées par l’Union Européenne ont réfuté les conclusions principales de Séralini sur la toxicité du maïs tolérant un herbicide (Roundup Ready). La recherche n'a identifié aucun risque potentiel lié au produit.

 

En plus de répondre aux préoccupations soulevées par l’étude Séralini, la recherche visait à indiquer à l’UE s'il était nécessaire de mener des essais d’alimentation d’une durée de deux ans sur des rats nourris avec des denrées alimentaires/aliments pour animaux pour évaluer la cancérogénicité, étant donné le grand nombre d’animaux requis.

 

« Ces nouvelles études contredisent la proposition de Séralini sur la nécessité de mener des études à long terme », a déclaré l'Association Française des Biotechnologies Végétales (AFBV).

 

Malgré le rejet scientifique généralisé à la fois des recherches de Séralini et de sa campagne de relations publiques visant à les promouvoir, il a refusé de revenir en arrière sur ses allégations. Son travail discrédité est encore fréquemment cité par les activistes anti-OGM.

 

____________

 

* Source : https://allianceforscience.cornell.edu/blog/2019/06/seralini-no-show-kenya-agroecology-conference/

 

 

Mes notes

 

Voir aussi « Dénigrement de l'agriculture conventionnelle en Afrique : à quand le « crime contre l'humanité » ? »

 

L'article ci-dessus est fondé en partie, nous semble-t-il, sur un communiqué de presse de la Kenya News Agency, repris par le journal kényan Business Today. On peut se réjouir du fait que l'on ait interviewé essentiellement MM. Ratemo Michieka et Robert Wager. Ce dernier n'a pas été un orateur de la conférence, ce qui rend l'article du journal – en fait – encore plus remarquable.

 

Cette conférence a réellement été un monument de désinformation. On trouvera des vidéos ici.

 

Voir notamment ce fil Twitter de M. Robert Wager sur les « exploits » de M. Don Huber (illustrés par deux images dans notre article précédent).

 

La « performance » de M. Gilles-Éric Séralini se trouve dans la première vidéo, entre 1:10:50 (les tentatives d'établir la communication), 1:12:10 (vrai début) et 1:26:35. Bon courage !

 

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