Glyphosate : la réponse du BfR aux accusations de plagiat et de collusion avec les « industriels »
La dernière tentative – chronologiquement, pas au sens d'ultime, car nous attendons le prochain cyclone médiatique – de déstabilisation des opinions publiques et des gouvernements dans le dossier du renouvellement de l'autorisation de mise en marché du glyphosate a consisté à accuser les autorités européennes d'avoir copié-collé des pages entières d'un document de Monsanto et d'avoir repris sans vérification propre les évaluations de cette entreprise.
Nous avons évoqué cette affaire en détail dans « Glyphosate : les petits Goebbels à la manœuvre... les médias suivent » et cité une partie de la réponse du Bundesinstitut für Risikobewertung (BfR).
Le BfR vient de publier son communiqué en version anglaise – ce que ne fait pas notre ANSES nationale, mais il est vrai que, ne publiant pas grand chose en français, il n'y a pas de matière à traduction. Et notre ami Albert Amgar en a produit une traduction française. La voici :
« Glyphosate : le BfR a examiné et évalué les études originales des demandeurs en détail
En réponse aux demandes de renseignements concernant le renouvellement du rapport d’évaluation sur le glyphosate, l’Institut fédéral d’évaluation des risques (BfR) d’Allemagne souhaite expliquer la procédure légalement suivie. Des articles dans les médias (ici la référence du journal Le Monde, mais il y en a eu beaucoup d’autres qui ne font que répéter ce que le premier a dit –aa) ont suggéré que le BfR ait copié son évaluation à partir de la demande d’autorisation du demandeur. En réalité, le BfR a minutieusement et en détail, examiné et évalué sous sa propre responsabilité à la fois les études légalement requises du candidat ainsi que toutes les autres études pertinentes et disponibles.
Pour les sections du renouvellement du rapport d’évaluation concernant les méthodes de surveillance analytique, la toxicologie, le métabolisme et l’évaluation des résidus, le BfR a évalué toutes les études et publications soumises par le candidat, ainsi que des études publiées dans des revues scientifiques, qui ont fait l’objet de recherches par le BfR.
La procédure légalement suivie pour l’approbation de substance active au niveau de l’UE stipule explicitement que le candidat doit présenter des résumés d’étude. Pour des raisons de transparence, le BfR a également décrit la description détaillée de l’étude et les évaluations du candidat. Dans le volume 3 du renouvellement du rapport d’évaluation, pour les études toxicologiques d’origine, mais il a ajouté ses propres commentaires critiques (en italique). En conséquence, le lecteur peut déterminer si le BfR et le demandeur sont parvenus à des évaluations identiques ou différentes dans le cas de chaque étude individuelle. En d’autres termes, le BfR énumère ses propres évaluations indépendantes de la pertinence, de la qualité scientifique et de la validité de toutes ces études et publications conformément aux dispositions légales. L’évaluation sanitaire indépendante du BfR pour l’intégralité des études soumises par la candidat et la littérature sur la recherche se trouvent dans le volume 1.
Dans la procédure de renouvellement, l’Institut fédéral pour l’évaluation des risques (BfR) d’Allemagne était chargé d’évaluer le risque pour la santé de la substance active glyphosate. Cette évaluation était la partie initiale de la procédure d’approbation européenne, qui a fait l’objet d’une évaluation par des experts des Etats membres et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) dans le cadre d’un processus d’évaluation transparent, et qui a confirmé les déclarations de base faites par le BfR.
Au cours des consultations publiques et des experts de l’EFSA sur le glyphosate, les commentaires de la communauté scientifique, le public, les décideurs, l’industrie et les organisations non gouvernementales ont été intégrés dans le processus conformément à la procédure établie au niveau de l’UE qui régit toutes les substances actives. Les évaluations pour le renouvellement du rapport d’évaluation sur les risques sur la santé et l’environnement ont été soigneusement examinés, commentés et discutés en profondeur par l’EFSA et les experts des autorités compétentes des Etats membres. Dans la conclusion de l’EFSA, la majorité des experts européens confirment également l’évaluation sanitaire de l’Institut fédéral pour l’évaluation des risques (BfR) d’Allemagne indiquant que, lorsqu’il est utilisé correctement et en conformité avec son intention dans l’agriculture, on ne s’attend pas à ce que le glyphosate ne pose aucun un risque cancérogène, mutagène ou reprotoxique [corrigé le 21 septembre 2017]. L’EFSA a publié sa conclusion sur son site Internet avec d’autres documents, dont le renouvellement du rapport d’évaluation.
À la suite de leurs propres évaluations utilisant une méthode normalisée toxicologique établie, reconnue internationalement, toutes les autorités d’évaluation du monde qui ont eu accès à ces documents originaux sur les données originales ont abouti à la conclusion que le glyphosate ne devrait pas être classé comme cancérogène en fonction des connaissances actuelles.
Ces autorités comprennent :
L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ainsi que les experts et les autorités en évaluation des risques des Etats membres de l’UE
L’ Environmental Protection Agency (EPA) aux Etats-Unis
L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) du Canada
L’ Australian Pesticides and Veterinary Medicines Authority (APVMA)
La Japanese Food Safety Commission
L’EPA de Nouvelle-Zélande
Réunion conjointe FAO/OMS sur les résidus de pesticides (JMPR)
L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) »
Le titre n'est pas glorieux : le BfR n'a pas examiné... « les études originales des demandeurs », mais les études signalées par les demandeurs – la Glyphosate Task Force. Et d'autres études originales.
Les journalistes sérieux qui font de l'information – la vraie – disposeront donc d'au moins deux sources en français pour la réponse du BfR, l'institution qui a été mise en cause de manière scandaleuse par une manœuvre que l'on peut comparer au « vrai-faux charnier » de Timisoara – sauf qu'ici on ne veut pas abattre le dictateur Nicolae Ceaușescu, mais une molécule d'une très grande utilité pour l'agriculture et l'environnement.
Les autres journalistes qui sont tombés dans le piège de la manœuvre, pour certains avec délice, auront aussi deux sources... pour se racheter.