Un scandale dont personne ne parle... les peintures de façades
Willi l'Agriculteur*
Qui ne veut pas que sa maison ait longtemps un aspect agréable ? À cet effet, on utilise des peintures de façades. Celles-ci contiennent des « biocides »... ça sonne plutôt bien avec le préfixe « bio »... Mais ce que presque personne ne sait, c'est que les biocides sont des matières actives que l'on peut aussi trouver dans les pesticides. Cependant, les matières actives des revêtements de façades sont soumises à des exigences inférieures à celles qui régissent l'autorisation de leurs contreparties agricoles.
Mais le vrai scandale est ailleurs : des matières actives comme le diuron, la terbutryne et la carbendazime sont interdites dans l'agriculture et, selon le cas, depuis de nombreuses années. Mais elles peuvent encore être utilisées dans les peintures de façades et finissent donc, souvent directement, dans le système d'assainissement public et donc dans les installations de traitement des eaux usées, avec l'eau de pluie [ma note : quand les réseaux ne sont pas séparés]. Quand on les trouve dans l'eau, on explique souvent que c'est du fait des agriculteurs qui se débarrassent de leurs stocks.
Voici trois exemples d'un fabricant. Dans la fiche technique n° 161 de Caparol, d'août 2016, pour le produit PermaSilan NQG on peut lire : « contient les produits biocides suivants : carbendazime [...], isoproturon [...], terbutryne [...] et 2-octyl-isothiazole-3-one [...] ». La fiche technique n° 150, d'août 2016, décrit le produit Duparol qui contient du diuron et également de la carbendazime et d'autres substances. Dans la fiche technique n° 151, de mai 2016, on peut lire que le produit Fungizid, qui peut être mélangé comme additif à toutes les peintures de façades, contient les matières actives isoproturon, terbutryne, pyrithione de zinc et octylisothiazolinone. Ici aussi, il est précisé que le produit est « toxique pour la vie aquatique, avec des effets durables ». C'est là probablement une des raisons pour lesquelles ces substances ne peuvent plus être utilisées dans l'agriculture. Ainsi, le diuron est interdit depuis 1996, la terbutryne depuis 1997. Voilà pour les résidus de pesticides dans l'agriculture. L'interdiction est maintenant vieille de 20 ans !
Dans une analyse de l'Agence Fédérale de l'Environnement on peut lire ceci sur les points d'entrée dans l'environnement : « Sur la façade, les biocides ne sont efficaces que s'ils peuvent sortir de la matrice de la façade, entrer dans la phase aqueuse et atteindre ainsi les organismes cibles. Pour obtenir une efficacité de longue durée, les produits sont conçus de telle sorte que les biocides se diffusent vers la surface lorsque l'humidité est suffisante dans la façade (Burkhardt et al., 2009). Ainsi, les biocides sont disséminés à chaque événement pluvieux efficace. Dans des études de laboratoire, on a mis en évidence une lixiviation du diuron, de l'irgarol, de la terbutryne et de la carbendazime à partir des panneaux de façade, lors d'épisodes de pluies battantes ; dans les conditions expérimentales, les concentrations dans le ruissellement ont diminué avec le temps de manière exponentielle sur près de 2 ordres de grandeur ».
En clair, cela signifie qu'une grande quantité de substances actives est lessivée dans les premières années. Ainsi, Caparol écrit aussi dans sa fiche technique n° 151 : « une protection indéfinie contre les moisissures et les algues ne peut pas être assurée. » La peinture doit donc être régulièrement réappliquée.
Dès lors, l'Agence Fédérale de l'Environnement étant au courant de toutes ces corrélations, pourquoi Mme Hendricks, la ministre de l'environnement, n'entreprend-elle rien pour y remédier ? C'est un scandale. Les médias en parlent de temps à autre, mais personne ne s'en préoccupe, pas même les écologistes. Et cela aussi est un scandale...
...dit Willi l'Agriculteur
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* Willi l'Agriculteur (Bauer Willi) exploite 40 hectares en grandes cultures (betterave sucrière, colza, céréales) en coopération opérationnelle. Il a été double-actif jusqu'à l'automne 2014. Son deuxième métier a été le suivi et le conseil aux agriculteurs pour une entreprise familiale (sucrerie). Depuis lors, il continue d'exploiter son domaine en tant que pré-retraité et a du temps pour écrire et partager son expérience.
Il contribue aussi bénévolement à l'association (fondation) des habitants de sa commune et à une coopérative agricole.
Source : http://www.bauerwilli.com/ein-skandal-von-dem-niemand-redet/